Les éco-organismes semblent engagés dans une bataille tarifaire. Comment la vivez-vous ?
Il faut bien avoir à l'esprit que les éco-organismes ont une très faible marge de manœuvre. Les données du problème sont figées, les études de marché de l’Ademe, notamment celle de préfiguration de la filière servant de socle à l’estimation de la mise en marché. 24 millions de tonnes de produits sont mises sur le marché chaque année dans la catégorie 2 (second œuvre), et 9 millions de tonnes de déchets sont mises au rebut chaque année. La trajectoire des éco-organismes sur cinq ans est, de plus, balisée par deux jalons, en 2024 et 2027, avec des obligations croissantes de taux de collecte. Enfin, l'obligation de reprise gratuite des déchets triés, en déchetteries comme sur les chantiers générant plus de 50 m3 de déchets à partir de 2024, ne laisse pas beaucoup de latitude sur les tarifs, surtout dans un contexte fortement inflationniste.
L'État vous a reproché, ainsi qu'à Ecominero, d'avoir modifié vos tarifs à la hâte, depuis le 10 octobre. Comment ces évolutions sont-elles possibles si vous n'avez pas de latitude ?
Écomaison avait publié initialement un barème stable sur deux ans, 2023 et 2024, notamment pour prendre en compte les demandes de la Capeb et de la FFB de pouvoir anticiper les hausses des prix des matériaux au moins neuf mois à l'avance. Mais la publication des barèmes nous fait entrer dans une courte phase de concurrence intensive pour convaincre les metteurs sur le marché, phase d'autant plus importante qu'une entreprise change ensuite rarement d'éco-organisme. Or, Valobat a publié des tarifs bas, pour la seule année 2023, sans rien dire de la trajectoire pour les années suivantes. Ecomaison ne pouvait prendre le risque de rater cette phase, nous avons donc dû réagir dans l'urgence.
Les coûts sont donc amenés à augmenter fortement ?
C'est un système mutualiste, dans lequel les produits mis sur le marché contribuent pour ceux qui en sortent. À partir du moment où les volumes de déchets collectés sont appelés à augmenter fortement, et où les volumes de produits neufs mis sur le marché restent relativement stables, la contribution augmentera nécessairement du fait des objectifs élevés de recyclage en 2024.
J'invite d'ailleurs tous les metteurs sur le marché à interroger les éco-organismes non seulement sur leur barème, mais aussi sur leur trajectoire en termes opérationnels pour le déploiement de la collecte et des solutions de recyclage et en termes économiques pour financer ces actions. Et j'appelle tous les éco-organismes à la transparence sur ce point. Nous le sommes avec toutes les parties prenantes de la filière et les entreprises. Laisser entendre que les tarifs d'appel pour 2023 resteraient stables serait mensonger.
L'État a souligné le manque de formalisme de votre modification de barème, et n'a toujours pas publié votre agrément au Journal officiel. Quelles en sont les conséquences ?
Tout d'abord, Ecomaison est agréé, la non-publication au JO n'y change rien. L'agrément est un acte réglementaire individuel dont la seule notification, que nous avons reçue le 30 septembre, suffit. J'ai réuni en urgence un comité des parties prenantes, exigé par la réglementation, pour valider cette modification tarifaire. Nous repasserons le 26 octobre prochain, avec tous les éco-organismes, devant la Commission interfilières des REP (Cifrep), pour faire valider notre trajectoire opérationnelle et financière. Je rappelle que nos équilibres ne sont en rien modifiés, avec des marches successives liées aux obligations de collecte.