Même si la crise n’épargne pas le secteur du bricolage, les distributeurs font le pari qu’elle ne remettra pas en cause une tendance lourde en France : la hausse continue du nombre de bricoleurs depuis quelques années.
Des clients pour qui bricoler est non seulement une nécessité – justement en raison de la crise – mais aussi, de plus en plus, un loisir. Ces dernières années, on a en effet assisté à une forte augmentation du bricolage « loisir » : constitué d’une population assez jeune, plutôt urbaine et féminine. Des clients bien rémunérés, pour qui le pouvoir d’achat n’est pas forcément un problème, mais qui se préoccupent de l’environnement et s’intéressent beaucoup à la décoration. Sur ce marché en croissance, les majors du secteur telles que Castorama et Leroy Merlin, qui ont misé, depuis longtemps déjà, sur la décoration, le rapport qualité-prix plutôt que la recherche du prix le plus bas, sont les grandes gagnantes.
De leur côté, les enseignes « dépôt » et « low cost » profitent elles aussi du boom du bricolage, mais avec une clientèle différente : moins urbaine, davantage masculine, et bricoleuse depuis de nombreuses années. Pour ces clients, le prix reste un critère essentiel, même si les mentalités évoluent extrêmement vite. L’argument « vert » a fait une entrée en force ici aussi. Et puis, cette clientèle économe recherche aussi un minimum de qualité, pas toujours au rendez-vous dans les magasins « dépôt ». Au final, les magasins de type « entrepôt » ont atteint un niveau élevé de fréquentation, qui se maintiendra très probablement, mais sans croître au même rythme que dans le passé. Même si, lorsqu’on les interroge, les enseignes concernées prévoient qu’en 2009, le critère « prix » sera prépondérant.
Les enseignes « déco » jouent la carte des services
Selon la FMB, si le modèle « dépôt » a atteint ses limites, c’est notamment parce qu’il propose peu – ou pas – de services. Alors que le consommateur est de plus en plus demandeur de services, et exigeant en matière de conseils. Le temps où chaque client venait en magasin pour acheter son produit et repartir aussitôt avec est révolu. L’explication ? Avec l’augmentation du temps libre, liée notamment à la réduction du temps de travail, près d’un Français sur deux s’adonne maintenant aux joies du bricolage. Un chiffre historiquement élevé. Mais ces nouveaux bricoleurs du dimanche sont souvent inexpérimentés, d’où un besoin fort en conseils, voire en services annexes de type cours de bricolage ou pose. Le numéro deux du secteur, Castorama, l’a bien compris. L’enseigne mise de plus en plus sur la décoration et l’aménagement de l’intérieur. Le bricolage devient un outil au service de ces deux concepts. Pour preuve, l’ouverture en 2008 d’un magasin (à La Défense, près de Paris) presque entièrement axé sur la décoration. Les articles n’y sont plus regroupés par secteur, mais par pièce de la maison. Un service payant de « coaching » y est proposé, où le client se voit expliquer comment allier tel papier peint à tel meuble, tel parquet à tel lit. Même évolution chez Adeo. En 2007, le groupe a lancé, à Massy (91), une nouvelle enseigne, « Zodio », où le bricolage est entièrement mis au service de la décoration. Avec là aussi un service d’accompagnement très important. Ce concept « déco » poussé à son paroxysme reste pour l’heure localisé, mais a vocation à s’étendre dans les régions où la demande existe. Il traduit une tendance de fond qui dépasse largement La Défense et Massy : le bricolage et la décoration vont maintenant de pair pour de nombreux consommateurs. Un constat qui s’avère déterminant lors des réaménagements de magasins et des nouvelles ouvertures.
Le développement durable devient incontournable
La distribution doit aussi prendre un compte un second facteur : la demande croissante en terme de développement durable. Dans ce domaine, les résultats d’une enquête réalisée par LH2 pour l’enseigne Brico Pro sont clairs : neuf bricoleurs sur dix estiment que les produits ne doivent pas être nocifs pour l’environnement, et 77 % des sondés sont d’accord pour payer des produits plus chers s’ils sont particulièrement respectueux de l’environnement. Le verdict est donc sans appel, et les temps ont bien changé.
Toutes les enseignes l’ont plus ou moins compris, mais certaines ont plus de mal que d’autres à réagir. Un paradoxe s’est créé : les consommateurs veulent des produits moins chers, tout en acceptant de payer plus cher lorsque l’avenir de la Terre est en jeu. C’est notamment le cas pour la nouvelle clientèle, plus féminine, plus jeune et plus exigeante que la clientèle classique.
Le prix, tout en restant une donnée importante, est jugé au regard du service proposé, et aussi, de plus en plus, du caractère « écologique » ou pas du produit. Les enseignes à bas prix répondent rarement à ces attentes, elles qui ont fondé toute leur stratégie sur la recherche permanente du prix le moins cher. De leur côté, les magasins « déco » comme Leroy Merlin et Castorama se frottent les mains : le développement durable est pour eux une aubaine, dans la mesure où ils ont les moyens de s’adapter aux demandes des clients, voire de les devancer. Et puis, l’argument « vert » permet aux enseignes de résister quelque peu à la pression de la baisse sur les prix. Permettant tout à la fois de satisfaire le consommateur, de protéger la planète et de maintenir les marges, l’offre « durable » risque de devenir omniprésente dans les mois qui viennent.
2207 : Nombre total de points de vente GSB

Bricomarché | 533 |
Groupe Mr.Bricolage | 485 |
Adeo | 438 |
Le Club/Les Briconautes | 200 |
Cofaq | 191 |
Kingfisher | 184 |
Bricorama | 80 |
Brico E.Leclerc | 71 |
Samse (L’Entrepôt du Bricolage et La Boîte à Outils) | 25 |