La ratifie deux ordonnances majeures adoptées en 2016. Objectifs : mettre le droit national en conformité avec le droit européen et faciliter la mise en œuvre des projets par une simplification de l'évaluation environnementale et une meilleure participation du public.
Approche par projet. D'une part, est ainsi ratifiée l'ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes (complétée par le ). Ce texte vise à simplifier et clarifier le dispositif en privilégiant une approche « par projet » et non par procédure, ainsi qu'en soumettant à évaluation les projets considérés comme ayant le plus d'incidences sur l'environnement. A noter que le nouveau champ d'application de l'évaluation environnementale n'a pas été modifié par la présente loi.
Compétences nouvelles pour la CNDP. D'autre part, la loi ratifie l' portant réforme des procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement (complétée par le ). Est ainsi acté l'élargissement de la saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) aux plans et programmes de niveau national faisant l'objet d'une évaluation environnementale (comme le schéma national d'infrastructures de transport). La CNDP se voit attribuer de nouvelles compétences. La procédure de concertation préalable est étendue aux projets, plans et programmes soumis à évaluation environnementale mais ne donnant pas lieu à la saisine de la CNDP. La concertation peut désormais être déclenchée à l'initiative du maître d'ouvrage ou de la personne responsable du
plan/ programme, de l'autorité compétente pour autoriser le projet ou alors résulter d'un droit d'initiative citoyen. In fine , la loi adoptée va plus loin et apporte un certain nombre de modifications.
L'évaluation environnementale étoffée
Concernant la première ordonnance, la loi enrichit l'a : elle prévoit ainsi que l'avis de l'autorité environnementale (AE) fait l'objet d'une réponse écrite de la part du maître d'ouvrage, laquelle est mise à la disposition du public avec l'étude d'impact.
Systématisation du mémoire en réponse. Si, en pratique, les porteurs de projet produisent déjà souvent un mémoire en réponse, cette systématisation est la bienvenue. En effet, jusqu'à présent, une fois l'avis émis et le projet soumis à enquête publique, le maître d'ouvrage ne pouvait ni le modifier significativement, ni produire des études complémentaires pour pallier une éventuelle insuffisance de l'étude d'impact initiale.
Or, non seulement les opposants reprennent les insuffisances pointées dans l'avis de l'AE pour étayer leur requête, mais la jurisprudence récente confirme que le juge s'appuie sur cet avis pour annuler des projets majeurs au motif de l'insuffisance de l'étude d'impact (voir l'annulation de la délibération du Conseil de Paris déclarant d'intérêt général l'opération d'aménagement des berges de la rive droite de la Seine) ; ou encore celle de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise autorisant la création de la ZAC du Triangle de Gonesse (1).
La loi modifie par ailleurs le contenu de l'étude d'impact. Elle doit désormais comporter, en fonction des caractéristiques du projet, des informations relatives à l'incidence prévisible de celui-ci « sur la consommation d'espaces agricoles, naturels et forestiers » (art. L. 122-3, II, 2°, f) du C. env. ). On relèvera enfin qu'après d'âpres débats, le gouvernement a rejeté l'amendement visant à introduire en droit interne la « clause-filet » retenue par la Cour de justice de l'UE (2).
Le délai ouvrant le droit d'initiative citoyenne a été allongé à quatre mois, contre deux auparavant.
La participation du public musclée
S'agissant de la seconde ordonnance, les principales modifications apportées par la loi concernent le droit d'initiative, conféré aux citoyens, de saisir le préfet d'une demande de concertation, à condition de représenter 20 % de la population des communes du périmètre du projet ou 10 % de celle des départements ou régions concernés (art. L. 121-19 du C. env. ). Il peut aussi être exercé par un conseil régional, départemental ou municipal ou l'organe délibérant d'un EPCI, ainsi que par une association agréée au niveau national, ou deux associations ou une fédération d'associations agréées dans la région ou le département.
Droit d'initiative. Selon l'ordonnance, ce droit d'initiative peut s'exercer pour les projets sous maîtrise d'ouvrage publique, soumis à évaluation environnementale et ne relevant pas du champ de compétence de la CNDP, et dont le montant des dépenses prévisionnelles ou de subventions publiques dépasse 10 millions d'euros. C'est aussi le cas des plans et programmes soumis à évaluation environnementale et ne donnant pas lieu à saisine de la CNDP (art. L. 121-17-1 du C. env. ). Ce droit d'initiative est par ailleurs conditionné par une obligation de « déclaration d'intention ». La publication électronique de celle-ci par les porteurs de projets, plans et programmes est effectuée en amont de la phase d'instruction.
Afin de rendre plus effectif ce mécanisme, la loi allonge à quatre mois le délai ouvrant le droit d'initiative citoyenne. Auparavant, le préfet devait être saisi dans les deux mois suivant la publication de la déclaration d'intention. Surtout, la loi réduit de moitié le seuil de financement public fixé à 10 millions d'euros, les parlementaires ayant pointé que ce dernier ne concernerait en réalité qu'un projet tous les cinq ans. L'abaissement par voie législative de ce seuil fixé à l'origine par le décret du 25 avril 2017, fut très débattu ; certains élus craignant que cet encadrement du seuil par la loi rende difficile toute adaptation ultérieure.
Rôle-clé du préfet. Malgré cette ouverture, le champ d'application du droit d'initiative exclut de nombreux projets privés. La procédure, toujours, très complexe, reste soumise au préfet qui « apprécie la recevabilité de la demande, notamment au regard du territoire susceptible d'être affecté par le projet, plan ou programme compte tenu de ses principaux impacts environnementaux et de ses retombées socio-économiques ».
En outre, la loi prévoit que la concertation préalable pourra désormais porter sur l'opportunité des projets, plans ou programmes (art. L. 121-15-1 du C. env. ). Elle permet à la CNDP, sur demande du maître d'ouvrage ou de l'autorité compétente pour autoriser le projet, de désigner un garant chargé de veiller à la bonne information et à la participation du public entre la fin de la concertation préala ble et le début de l'enquête publique, afin de créer une « procédure continue de consultation du public » (art. L. 121-16-2 du C. env. ).
Si l'on peut saluer les modifications apportées au droit d'initiative et la systématisation de la réponse à l'avis de l'AE, on regrettera la complexité persistante du champ d'application de la concertation préalable : les textes donnent une impression de superposition de procédures sans réelle articulation. Il est aussi dommage que le renforcement en amont de la participation du public ne s'accompagne pas d'un allégement en aval des procédures d'enquête publique ou de participation dématérialisée.
