Crise des matières premières : "Le comité sera mobilisé tant qu'il le faudra", Pierre Pelouzet

Le médiateur des entreprises s'est vu confier par le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, la direction d'un "comité de crise", chargé de gérer les conflits éventuels sur les chantiers de l'Etat, nés de la pénurie et de la flambée du prix des matières premières. Il revient pour Le Moniteur sur les tenants et les aboutissants de sa mission.

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Pierre Pelouzet, médiateur des entreprises.

Le comité de crise annoncé le 15 juin dernier par Bruno Le Maire est-il un comité ad hoc ou une cellule au sein de la Médiation des entreprises que vous dirigez ?

C’est un comité spécial qui rassemble les organisations professionnelles de la filière (1) présentes lors de la réunion à Bercy le 15 juin autour du ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, de la ministre déléguée au Logement, Emmanuelle Wargon et du ministre délégué aux PME, Alain Griset. J’en assure la présidence en tant que Médiateur des entreprises mais c’est une mission, particulière pour moi, qui n’est pas une mission de pure médiation.

L’idée, c’est de faire remonter au travers de toutes ces organisations professionnelles, les noms des acteurs économiques qui n’auraient pas une attitude solidaire et de pouvoir ensuite intervenir auprès de ces acteurs économiques.

Tous les maillons de la chaîne peuvent avoir une attitude intelligente et coopérative, de dialogue avec les autres, ou au contraire une attitude de blocage et de rapport de force systématique. Si ce sont des petits acteurs, on ne va pas s’en occuper. Si en revanche des gros acteurs de la filière se mettent à avoir une attitude de blocage systématique, dans un sens ou dans l’autre, c’est-à-dire soit comme client soit comme fournisseur, soit comme intermédiaire, soit comme distributeur soit comme industriel ou fabricant, il faut qu’on les identifie. Parce qu’un gros acteur qui commence à avoir une attitude de rapport de force cela peut détruire tout une chaîne de valeur.

Comment s’appliquerait le name and shame qu'a évoqué Bruno Le Maire ?

Nous allons intervenir de manière confidentielle auprès des acteurs concernés. Je ne citerai pas de nom (rires). Par exemple, si une entreprise X est identifiée comme refusant systématiquement tout retard et appliquant des pénalités à tous ses fournisseurs, nous intervenons auprès d’elle pour lui demander des explications et un changement d’attitude. Si elle obtempère et que le comité note des améliorations rapides, tout va bien. Dans le cas contraire, nous remontons cette situation au ministre de l’Economie qui a effectivement annoncé qu’il pourrait user du « name and shame ».

Mais l’attitude de l’acheteur public sera, elle aussi, surveillée ?

Oui. La circulaire qu’a annoncée le ministre rappellera le devoir de solidarité des acheteurs publics. Si néanmoins, il y avait un acteur public qui était identifié comme ne jouant pas le jeu, il faut qu’on puisse intervenir auprès de cet acteur public.

Un allongement global tacite des délais n’aurait-il pas suffi ?

Non. Parce que malheureusement, nous allons être face à une série de cas particuliers. Dans certains cas on peut allonger les délais, dans d’autres on ne le peut pas. Il y a des endroits où l'on peut accepter des prix plus hauts (n’oublions pas que la situation de pénurie fait mécaniquement monter les prix) et ailleurs non. Soit on est face à deux entreprises - ou une entreprise et un acheteur public - qui ont du mal à se mettre d’accord et à qui on va proposer une médiation pour trouver le meilleur équilibre, soit on est face à un acteur qui a toujours la même attitude, celle d’imposer son point de vue, et là le comité de crise doit intervenir.

Notez qu'en parallèle de ce comité de crise est lancée une médiation de filière qui aura pour but de regarder, sur l’ensemble de la chaîne, là où ça bloque. Ces deux mouvements de pénurie et de hausse des prix créent des blocages et des difficultés et il faut que toute la filière se mette d’accord sur comment les traiter. On commence à appeler les gens pour avoir leur point de vue et une première réunion est prévue à la rentrée.

Combien de temps ce comité de crise va-t-il exister ?

Il n’y a pas de date sur la lettre de mission. Evidemment, le jour où le problème disparaît, le comité disparaît avec lui. On espère que ce sera le plus tôt possible mais aujourd’hui on a un peu de mal à savoir. Certains nous disent que la situation va se stabiliser à la rentrée, d’autres que ça va durer plusieurs mois, voire un an. Nous serons en tout cas mobilisés tant qu’il le faudra.

(1) Organisations patronales (Medef, CPME, U2P), du secteur du BTP (FFB, Capeb, FNTP, CNATP), des producteurs et négociants de matériaux de construction (AIMCC, FDMC, CGI, Fieec) et les représentants de clients professionnels (Orcab, USH, FPI)

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