Il aura fallu un an aux pouvoirs publics pour étendre les deux nouvelles conventions collectives nationales (CCN) des Etam (employés, techniciens et agents de maîtrise) du secteur*. Le 12 juillet 2006, fédérations patronales et syndicales tombaient d’accord, après un an de négociation, sur le contenu du futur statut des Etam du secteur. Les deux textes étaient ouverts à signature jusqu’au 26 septembre 2006. La CCN des travaux publics était finalement paraphée par quatre syndicats (CGC, CFDT, CFTC et FO), le texte bâtiment par deux seulement (CFTC et FO).
La publication au « JO » du 28 juin 2007 des deux arrêtés d’extension (voir le cahier « Textes officiels » du numéro précédent) les rend obligatoires à toutes les entreprises du BTP à partir du 1er juillet 2007. Rappelons que ce n’était juridiquement pas le cas des actuelles CCN des Etam qui n’étaient pas étendues. De ce point de vue, c’est une nouveauté importante. Les deux nouvelles conventions collectives s’imposent aux entreprises françaises mais également aux entreprises de travaux de l’Union européenne qui viennent effectuer une prestation de services en France. Présentation de ce qui change pour les Etam du BTP et leur employeur.
1. Un contrat de travail écrit
Tout engagement d’un Etam doit faire l’objet d’un contrat de travail écrit mentionnant sa fonction, sa classification, sa rémunération, sa durée du travail et les organismes de retraite et de prévoyance auxquels il est affilié.
2. Période d’essai
Elle est allongée. De trois mois maximum auparavant, elle est :
• Dans les TP : de deux mois renouvelables une fois pour une durée identique (quatre mois maximum) pour les Etam de niveau A à D, trois mois renouvelables une fois pour une durée identique (six mois maximum) pour les Etam de niveau E et plus.
• Dans le bâtiment : de deux mois renouvelables une fois pour une durée identique (quatre mois maximum) pour les employés, trois mois renouvelables une fois pour une durée identique (six mois maximum) pour les techniciens et agents de maîtrise.
Dans les deux cas, un délai de prévenance de huit jours est nécessaire avant de renouveler la période d’essai.
Passé le premier mois d’essai, employeur et salarié devront respecter un préavis de deux semaines avant de rompre le contrat.
3. Modification du contrat
Toute proposition de modification du contrat doit être notifiée par écrit au salarié. Comme pour les cadres, l’Etam dispose d’un mois pour réfléchir. S’il refuse, il est licencié, à charge pour son employeur de justifier d’une cause réelle et sérieuse de licenciement.
4. Durée du préavis
En cas de licenciement ou de démission, l’Etam effectue :
• Un mois de préavis s’il a moins de deux ans d’ancienneté dans l’entreprise.
• Deux mois au-delà de deux ans d’ancienneté (auparavant c’était un mois en cas de démission).
• Trois mois si l’Etam est licencié et qu’il a plus de 55 ans et 15 ans d’ancienneté dans l’entreprise.
5. Heures de recherche d’emploi
Pendant son préavis, l’Etam licencié pourra s’absenter cinq jours (ou dix demi-journées) par mois. Ces jours peuvent être pris en une ou plusieurs fois ; ils sont fixés pour moitié au gré du salarié, pour moitié au gré de l’employeur. Auparavant, l’Etam avait droit à 50 heures par mois, qu’il ait été licencié ou démissionnaire.
6. Indemnité de licenciement
Elle est revalorisée et son mode de calcul simplifié.
L’Etam de moins de 65 ans qui justifie de deux ans d’ancienneté dans l’entreprise perçoit en cas de licenciement 2,5/10e de mois par année d’ancienneté entre deux et quinze ans de présence dans l’entreprise, 3,5/10e pour les années au-delà de quinze ans.
Le montant de l’indemnité de licenciement est plafonné à dix mois de salaire. S’il a plus de 55 ans, l’Etam voit son indemnité majorée de 10 %.
7. Mise à la retraite
Conformément à l’accord signé le 13 avril 2004 par les partenaires sociaux du BTP (actuellement applicable), l’Etam mis à la retraite par son employeur à partir de 60 ans a droit à une indemnité égale à 1,5/10e de mois s’il a entre deux et dix ans d’ancienneté, 2,5/10e pour les années au-delà de dix ans.
Le montant de l’indemnité de mise à la retraite est plafonné à huit mois. Le salarié mis à la retraite effectue un préavis de trois mois.
8. Départ à la retraite
L’Etam qui choisit de partir à la retraite à partir de 60 ans, ou avant s’il peut justifier d’une carrière longue, percevra une indemnité égale à 1/10e de mois s’il a entre deux et dix ans d’ancienneté, 1,5/10e de mois pour les années au-delà de dix ans.
Le montant de l’indemnité de départ à la retraite est plafonné à cinq mois. Le salarié effectue un préavis de deux mois s’il a plus de deux ans d’ancienneté (un mois autrement).
9. Délégation de pouvoirs
Elle est encadrée. Seuls peuvent avoir une délégation de pouvoir les Etam à partir de la position V pour le bâtiment et à partir du niveau F pour les travaux publics.
Toute délégation doit être écrite et indiquer de manière précise les fonctions occupées, les pouvoirs transférés au délégataire et dans quels domaines, les procédures ordinaires ou urgentes par lesquelles le délégataire rend compte de sa délégation, les moyens matériels, humains et financiers dont il dispose pour assurer ses responsabilités, son pouvoir de sanction, la durée de la délégation et, le cas échéant, les formations lui permettant d’avoir les compétences requises.
Aucun Etam ne peut recevoir de délégation d’un autre Etam.
10. Temps de travail
Les deux CCN reprennent les dispositions des accords de branche en vigueur. C’est sur ce point que l’arrêté d’extension formule le plus de réserves, afin de rappeler le respect du Code du travail (durées maximales, repos hebdomadaire, respect du contingent légal de 130 heures en cas de modulation des horaires…).
11. Forfait jours
La loi du 2 août 2005 permettait aux entreprises d’étendre le forfait jours (jusque-là réservé aux cadres) aux non-cadres autonomes dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la durée du travail ne peut pas être prédéterminée.
Les nouvelles CCN du BTP introduisent cette possibilité pour les Etam à partir de la position V dans le bâtiment et à partir du niveau F pour les travaux publics. Le forfait est de 215 jours travaillés par an.
La mise en œuvre du forfait suppose un entretien avec l’Etam et un avenant au contrat signé par le salarié. S’il le refuse, cela ne peut pas « justifier la rupture de son contrat ».
L’Etam qui accepte de passer au forfait jours bénéficie d’une majoration de 15 % du salaire minimum correspondant à sa qualification.
12. Travail de nuit, le dimanche, un jour férié
Le travail exceptionnel de nuit, le dimanche ou un jour férié donne droit pour l’Etam à une majoration de 100 % du paiement des heures effectuées. Cette majoration ne se cumule pas avec celles applicables aux heures supplémentaires.
Pour le travail habituel de nuit, un accord spécifique a été conclu. Il vise tout salarié du BTP qui travaille habituellement de nuit, c’est-à-dire qui accomplit au moins deux fois par semaine dans son horaire habituel au moins trois heures de travail entre 21 heures et six heures ou qui effectue dans l’année au moins 270 heures entre 21 heures et six heures.
En contrepartie, le salarié a droit à un repos compensateur (un jour par période comprenant entre 270 et 349 heures de nuit, deux jours à partir de 350 heures de nuit), une compensation financière déterminée dans chaque entreprise, une pause quotidienne de 30 minutes (la loi n’exige que 20 minutes) et une indemnité de panier.
13. Congés payés et autorisations d’absence
Les nouvelles CCN ne changent rien en matière de congés payés. Les Etam conservent leurs jours de congés pour ancienneté. Elles alignent en revanche sur les cadres le nombre de jours d’absence rémunérés dont bénéficient les Etam lors d’événements familiaux.
Ils auront ainsi droit à quatre jours s’ils se marient, trois jours pour un Pacs, un jour pour le mariage d’un enfant, trois jours pour les obsèques du conjoint, d’un enfant ou d’un de leurs parents, un jour pour le décès d’un autre membre de la famille, trois jours pour la naissance ou l’adoption d’un enfant.
Les nouvelles CCN intègrent aussi le congé de paternité. Le père a droit à onze jours calendaires consécutifs, lesquels s’ajoutent avec les trois jours prévus par la convention en cas de naissance. De la même façon, la convention intègre les dispositions légales en matière de congés pour enfant malade.
14. Maladie : subrogation
En cas de maladie, d’accident ou de maternité du salarié, l’entreprise lui maintient sa rémunération et se fait rembourser les indemnités journalières directement par la Sécurité sociale. Cette subrogation concerne à la fois les Etam des travaux publics et du bâtiment.
Lors de l’embauche, l’employeur doit remettre au salarié un formulaire de subrogation afin que celui-ci puisse opter pour cette solution.
15. Indemnités de repas et de déplacement
Les Etam non sédentaires des entreprises de TP bénéficient comme les ouvriers des indemnités de repas et de transport.
16. Déplacements
Comme pour les cadres, les Etam du BTP en déplacement professionnel en France d’une durée supérieure à une semaine et qui, de ce fait, sont éloignés de leur famille, bénéficieront d’un voyage de détente hebdomadaire vers leur lieu de résidence.
Pour les déplacements à l’étranger de moins de trois mois, les nouveaux textes imposent la remise d’une lettre de mission, signée par l’intéressé et précisant le lieu d’exercice de la mission, la durée du déplacement, les modalités du retour. Si le déplacement excède trois mois, un avenant au contrat de travail est nécessaire. Il doit être signé par l’Etam avant son départ.
17. Entrée en vigueur
Les deux nouvelles conventions collectives s’appliquent à toutes les entreprises du bâtiment et des travaux publics depuis le 1er juillet 2007.
Important ! De par son extension, elles s’imposent également aux entreprises du BTP de l’Union européenne qui effectuent en France une prestation de service.
