La réduction de l’artificialisation des sols et l’éradication des passoires thermiques viennent en tête de la démonstration gouvernementale, à mi-parcours des délibérations parlementaires consacrées au projet de loi Climat et résilience.
Sur ces deux thèmes, le ministère de la Transition écologique revendique une « rupture assumée » par rapport aux pratiques antérieures, à l’issue d’un débat sans précédent dans la mandature actuelle, par sa durée comme par sa richesse : plus de 1000 amendements ont enrichi les 69 articles, après plus 200 heures de discussions, soit des scores rarement atteints sous la Vème république.
Territorialisation des objectifs
La fin des projets de centres commerciaux offre un symbole de la détermination affichée par le ministère de la Transition écologique, sur la voie tracée par la loi : aller vers le zéro artificialisation nette en trois décennies, et commencer par réduire de moitié la consommation d’espaces dans les 10 ans à venir, par rapport à la moyenne annuelle supérieure à 20 000 hectares, enregistrée durant les années 2010.
Tout en validant les objectifs, les débats parlementaires l’ont infléchi dans leur déclinaison territoriale, à l’échelle des régions et des collectivités intercommunales. Le bilan des années écoulées servira de juge de paix : « Un effort moindre pèsera sur une commune en forte croissance démographique, et qui aura mis l’accent sur la construction verticale et la reconversion de friches. A l’inverse, la Corrèze devra sans doute dépasser l’objectif d’une diminution de 50 % de ses consommations d’espaces dans les 10 ans à venir », décrypte un porte-parole de la ministre de la Transition écologique.
Passoire pour l’e-commerce
La porte laissée ouverte à la forte croissance de l’e-commerce ne remet pas en cause la trajectoire impulsée par la convention citoyenne pour le climat, à en croire les exégètes gouvernementaux : « Non ouverts au public, les entrepôts génèrent moins d’artificialisation indirecte liées aux infrastructures routières », tempèrent-ils.
Pour éviter un développement anarchique de ces bâtiments, la loi recommande leur inscription dans la planification locale, en vue d’un encadrement « concerté et anticipé ». « Ces dispositions encourageront des implantations sur des terrains déjà artificialisés. Les préfets vérifieront que les porteurs de projets ne choisiront des terrains vierges qu’en l’absence de friches disponibles », assure le ministère.
Echéanciers pour les logements énergivores
Le même optimisme préside au décryptage des dispositions sur la rénovation énergétique des logements, assorti d’un échéancier des locations interdites : dès 2025 pour les locaux de classe énergétique G, à partir de 2028 pour la classe F et de 2034 pour la classe E. « Au total, ce calendrier s’impose à plus de 4 millions de logements », calcule le gouvernement.
Fruit de la mission confiée à Olivier Sichel, directeur de la Banque des territoires, sur la question du reste à charge imposé aux foyers les plus précaires, l’accompagnement acté par les députés ouvre une voie de déblocage, sous la forme d’un prêt dont le capital ne devient exigible qu’à l’issue d’une mutation ultérieure.
Une issue pour les plus précaires
« Ce prêt avance ressource existe déjà, mais fonctionne peu. Pour le relooker, Olivier Sichel a émis l’idée d’une contre-garantie publique en cas de défaillance. Nous y travaillons avec la direction générale du Trésor et plusieurs banques », détaille le ministère de la Transition écologique. Les taux, le montant maximal et les conditions d’éligibilité restent en suspens, mais les arbitrages privilégieront les ménages précaires et les personnes âgées.
Selon les porte-parole du législateur, l’adéquation des moyens par rapport aux objectifs constitue la principale valeur ajoutée du projet de loi, en complément des autres grands textes du quinquennat : lois d’orientation des mobilités, énergie climat, Egalim, pour l'économie circulaire. Les sources gouvernementales y ajoutent le volet environnemental du plan de relance. Selon elles, ce cumul met la France en situation d’atteindre l’objectif de réduction de 43% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, conformément aux objectifs de la stratégie nationale bas carbone.
Après la délibération solennelle de l’Assemblée nationale ce 4 mai, le projet va passer par le crible sénatorial, puis sans doute par celui d’une commission mixte paritaire en juillet. Si cette dernière ne parvenait pas à une entente, la seconde lecture occuperait l’agenda parlementaire de la rentrée.