Après une formation et une carrière tournée vers la finance, Emmanuel Cartigny, petit-fils du fondateur, a rejoint l’entreprise familiale de maçonnerie. Les chiffres ne lui font donc pas peur, ce qui est particulièrement utile dans le bâtiment où la gestion au sens large tient une place non négligeable, notamment lorsqu’il s’agit de bien acheter aux négociants. Mais attention, un principe prévaut dans l’entreprise : on ne doit pas « tordre le cou de ses fournisseurs, comme on ne doit pas se faire tordre le cou par ses clients et vice versa. Le respect est la base de nos relations, avec nos clients comme avec nos fournisseurs. Et nous attendons la même chose des uns et des autres ».
L’esprit et le savoir-faire de l’actuel dirigeant ont été modelés par le contexte familial : « C’est une culture dans laquelle j’ai toujours été bercé. Ma première expérience, je l’ai acquise lors de travaux pendant l’été. Mais depuis sept ans, je suis véritablement sur les chantiers : c’est la meilleure manière de maîtriser tout le domaine technique, ce qui est essentiel pour se faire respecter ».
Savoir s’effacer…
Côté relation avec les fournisseurs, c’est la recherche d’efficacité qui prime : chez Cartigny il n’y a pas de bureau d’achat. Les quelques personnes en charge de la direction de l’entreprise se partagent la tâche en fonction des besoins du moment. Et puis, indique le dirigeant : « Nous sommes dans une activité qui ne nécessite pas un grand éventail de produits et de fournisseurs. Chez certains d’entre eux, nous sommes de très vieux habitués. Si nous ne sommes pas prescripteurs à proprement parler, nous préférons tout de même mettre directement en relation nos clients avec certains fournisseurs qui ont toute notre confiance, afin qu’ils fassent leurs choix. Ensuite, nous entrons en scène et nous négocions les achats en fonction de critères variables selon les chantiers à engager… Et si le client n’est pas d’accord avec ce principe, il passe totalement en direct mais l’expérience prouve qu’il ne fait pas forcément une bonne affaire ».
…mais pas avec n’importe qui
Pour Emmanuel Cartigny, cette transmission de témoin ne peut se faire qu’après s’être respectivement appréciés : la confiance et la reconnaissance mutuelles entre un entrepreneur très implanté sur son marché et le négoce sont au cœur de la fiabilité du système, laisse entendre le dirigeant pour qui cette situation n’est qu’une évidence toute simple : « Nous ne mettons pas nos fournisseurs en concurrence et ils nous le rendent bien. » Du coup, Cartigny et Cie assure ne pas connaître de problème majeur, notamment lors des facturations des fournisseurs fréquentés de longue date : « Lorsque nous travaillons ponctuellement avec d’autres entreprises, nous choisissons de payer comptant ». Et lorsque les achats sont effectués en fonction des chantiers (il y en a une dizaine en cours simultanément, en moyenne), on évite les stocks chez Cartigny : deux personnes tournent en quasi-permanence entre les points de vente et les chantiers afin d’assurer les enlèvements et les livraisons.
Les fournisseurs doivent aussi fournir de l’information
Les chantiers sont le fait de particuliers mais aussi de syndics et surtout d’architectes qui apportent une bonne moitié des affaires traitées par Cartigny : un portefeuille constitué sur la durée, sans publicité autre que celle qui figure sur les véhicules de l’entreprise, grâce au bouche à oreille. Une approche efficace : « A Neuilly-sur-Seine, par exemple, nous sommes ainsi restés deux ans dans la même rue : notre travail plaisait, cela s’est su et nous sommes passés ainsi d’un immeuble à l’autre sans pouvoir partir », raconte Emmanuel Cartigny. En résumé : Cartigny ne se livre pas à l’exercice aléatoire des appels d’offre. Il a la chance de ne pas en avoir besoin.
Dans ce contexte, il faut savoir se tenir au courant des nouveautés même si le secteur n’est pas source de fréquentes révolutions technologiques : des visites de commerciaux y contribuent ainsi que certaines animations organisées sur les points de vente susceptibles d’attirer l’entrepreneur. La presse professionnelle et la chambre syndicale régionale à laquelle appartient l’entreprise sont aussi pourvoyeurs d’informations utiles et pratiques… Et ceci malgré des journées de travail d’une bonne douzaine d’heures.
