Le pôle Fibres-Energivie est devenu Build & Connect. Pourquoi ce changement ? Quelles sont vos missions ?
Ismail Tahtaci (directeur général du pôle Build & Connect) : Le pôle a changé de nom lors de notre assemblée générale de juin 2023 pour le lier à notre colloque éponyme et gagner ainsi en lisibilité. La marque du colloque devient ainsi celle du pôle de compétitivité, avec un bénéfice complémentaire : ce nom reflète des activités qui étaient déjà présentes chez nous en lien avec les objets connectés et le smart building en particulier.
Nos objectifs restent d’accompagner l’innovation aussi bien pour les industriels que pour les maîtres d’ouvrage et les entreprises du bâtiment pour passer d’un modèle carboné à des constructions décarbonées, saines et respectueuses de l’environnement. Notre priorité est également l’adaptation au changement climatique.
Pour ce faire, nous travaillons à l’échelle des territoires comme à celle du bâtiment ou du parc immobilier. Nos experts s’y connaissent ainsi aussi bien en matériaux durables et en économie circulaire qu’en systèmes énergétiques et en numérique.
De quels moyens disposez-vous pour remplir vos missions ?
Ismail Tahtaci : Notre modèle économique est basé sur des recettes et des dépenses. Nous fonctionnons ainsi grâce à 52% de financements privés, en l’occurrence les cotisations de nos 230 adhérents, mais aussi des prestations de service et du mécénat.
Enfin, les financements publics représentent 48% de notre budget, grâce à la région Grand Est et l’Eurométropole de Strasbourg. Notre budget annuel est ainsi compris entre 1,8 et 2M€.
Quels sont les principaux résultats que vous avez obtenus ?
Ismail Tahtaci : Notre plus grande fierté est de nous être imposé comme un pôle essentiel du bâtiment et des matériaux durables grâce à 600 projets labellisés par un comité d’experts de l’innovation depuis notre création en 2010. Cela signifie que nous avons correctement remplis notre mission qui est de stimuler la R&D. Ces projets ont bénéficiés de 800 millions d’euros pour les accompagner, dont 300 millions d’aides publiques.
Pour ne citer qu’un exemple, je prendrais celui du groupe Burger et Cie basé en Alsace que nous avons accompagné dans la mise en place d'une production de modules 3D préfabriqués. Il s’agissait de prendre en compte les savoir-faire de la R&D interne et d’apporter un appui sur les questions spécifiques de mixité des matériaux et d’assemblages innovants, puis d’intégrer ces nouveaux processus dans les usines de la société. Aujourd’hui, ils produisent des modules 3D de façon industrielle.
En octobre dernier, vous avez mis en place « L’institut du digital ». Quels sont les rôles et les ambitions de cette nouvelle entité ?
Rémi Dornier (référent de la commission numérique et compétitivité du pôle) : Notre ambition est grande puisque nous voulons devenir l’institut national qui porte le développement du numérique pour l’ensemble de la filière construction, ce que, bien sûr, nous ne ferons pas seuls. En attendant de discuter davantage avec les organisations professionnelles et les administrations publiques, nous déclinons notre activité selon trois axes principaux : inspirer, former et incuber.
Inspirer signifie organiser des événements, des conférences et des webinaires afin d’inciter toute la filière à s’emparer des grands enjeux actuels. Ce sera notamment le cas lors de notre Build & Connect Summit qui se déroulera à Strasbourg les 12 et 13 juin prochains. Puis d’autres manifestations suivront.
Former fait référence à l’évolution des cursus de formation initiale et continue, afin de rendre rapidement nos étudiants et nos entreprises plus performantes en matière de numérique et d’intelligence artificielle. Enfin, incuber cela veut dire miser davantage sur les expérimentations et les tests de solutions innovantes. Nous voulons réaliser davantage de projets de R&D, tester les solutions sur des chantiers, avec de nouveaux logiciels, des méthodes et des process renouvelés. A chaque fois, l’enjeu est de vérifier que l’innovation répond bien aux cas d’usages de la filière.
Quant à notre modèle économique, il dépendra de notre feuille de route, qui est elle-même en phase de définition.
A qui s’adresse le Build & Connect Summit ?
Cédric Simonin (président du pôle) : L’événement s’adresse à tous les acteurs du secteur de la construction au sens large : petites, moyennes ou grandes entreprises, artisans, architectes, ingénieurs, étudiants, secteur privé ou public. Il vise à répondre à leurs attentes dans ce contexte de crise de la construction neuve et de mutation du secteur liée aussi bien aux nouvelles compétences à acquérir qu’aux réglementations actuelles et futures.
L’un des objectifs de la journée est donc bien de mobiliser le plus grand nombre pour partager les problématiques liées aux évolutions des réglementations, identifier les innovations, les solutions et les analyses des experts. Il s’agit ainsi de maintenir la compétitivité, et même, n’ayons pas peur de le dire, de la survie des entreprises du secteur.
Quels sont les points forts du programme ?
Cédric Simonin (président du pôle) : Notre colloque va démarrer avec un atelier sur l’Ordre de grandeur des énergies (Ogre) qui va permettre de prendre conscience du chemin qui reste à parcourir. L’idée étant de prendre conscience de l’ampleur des enjeux, puis de montrer que des solutions existent. Ces dernières concernent relèvent aussi bien de nouvelles filières de recyclage et de réemploi ou d’isolants biosourcés, que de construction passive. La gestion de l’eau, le stress hydrique ou l’économie de la décarbonation seront également au programme.
Enfin, pour prendre un peu de hauteur, nous accueillerons deux personnalités de premier plan avec le philosophe André Comte-Sponville et Serge Darrieumerlou, ancien directeur de l’innovation de Somfy et de Decathlon, à l’origine de la cellule innovation de la grande enseigne.