Tribune

« Les GTB ont leur place dans tous les bâtiments »

Pour Luis Liberal, vice-président Digital Energy chez Schneider Electric, il faut accélérer le taux d’adoption de solution de gestion technique dans les petits et moyens bâtiments afin de tenir les engagements du décret BACS.

Luis Liberal est vice-président Digital Energy chez Schneider Electric

Le décret BACS (Building Automation and Control Systems) impose aux bâtiments tertiaires un système d’automatisation et de contrôle, que l’on appelle communément une GTB (Gestion Technique du Bâtiment). Depuis 2024, tous les bâtiments neufs dont la puissance nominale installée dépasse 70kW y sont assujettis. Depuis le 1er janvier 2025, tous les bâtiments existants dont la puissance dépasse 290kW y sont également contraints. Les autres seront concernés en 2027.

Mais à la vitesse actuelle d’adoption, il semble difficile de tenir cette échéance. Selon l’Observatoire National du Déploiement des BACS publié par le GIMELEC (Groupement des entreprises de la filière électronumérique française), le taux global d’équipement est passé de 12% en 2022 à 15% en 2024. A ce rythme, seuls 18% des sites seront équipés en 2027. Si les gros bâtiments, dont la surface dépasse les 20 000 m2, sont bien équipés en GTB (84%), les petits et moyens, dont la surface est comprise entre 1000 et 5000 m2 (soit 300 000 unités) le sont beaucoup moins (moins de 15%). L’enjeu est donc de taille.

Expliquer et convaincre

Comment accélérer le taux d’adoption dans ces petits et moyens bâtiments ? Il faut d’abord expliquer et convaincre. En effet, beaucoup de propriétaires considèrent cette technologie comme réservée aux grands bâtiments. Et comme à peine plus de 50% des GTB déployées sont exploitées, le retour sur investissement n’est pas flagrant. La principale raison est la fragmentation de l’écosystème : promoteurs, occupants, asset managers, property managers, facility managers, fournisseurs de technologie, intégrateurs… La responsabilité est diluée, la maintenance et les évolutions nécessaires peu ou mal assurées. Et les utilisateurs ont tendance à forcer les paramétrages d’exploitation.

Accompagner les utilisateurs

Or, si la technologie est mature et permet d’éviter ce genre de problème, encore faut-il la connaitre et être en mesure de la déployer efficacement. Pour les petits et moyens bâtiments, le nombre d’acteurs concernés est plus réduit et les solutions plus accessibles. Mais les fabricants de GTB doivent accompagner les intégrateurs/installateurs pour adopter une démarche orientée usages, condition indispensable pour les PME qui constituent la très grande majorité de la filière. Cela signifie mettre en place des modèles ciblés pour un domaine d’activité, puis les répliquer à l’ensemble du secteur. Par exemple, tous les acteurs de la restauration rapide auront, peu ou prou, les mêmes points d’attention ; les friteuses qui représentent le plus gros poste de consommation énergétique. Dans le commerce des cosmétiques, c’est le confort des clients qui prime, donc la qualité de l’air. En “modélisant” ces différents enjeux, il sera alors plus facile d’industrialiser le déploiement pour une catégorie de bâtiments et les effets bénéfiques sont très rapidement visibles, plus que dans les grands bâtiments.

Besoin de compétences

Mais pour adopter une telle stratégie de diffusion, il faut aussi disposer des compétences nécessaires. Or les profils à double compétence automatismes et IT sont rares, voire inexistants. La France manque cruellement de formations dédiées à l’automatisme. Si les industriels se mobilisent pour accompagner les intégrateurs et former leurs collaborateurs à l’IT, il faut nécessairement mettre en place des formations automatismes/IT.

Flexibilité

Le dernier enjeu, et non des moindres, pour ces petits et moyens bâtiments tertiaires, est le potentiel qu’ils représentent en termes de flexibilité électrique. Celle-ci consiste à moduler et décaler la consommation en fonction des conditions tarifaires et de disponibilité de l’électricité. Les 300 000 bâtiments concernés représentent un potentiel d’effacement, une réserve en quelque sorte, de 6 GW, soit l’équivalent de la production de 5 à 6 réacteurs nucléaires. Une manne bienvenue à condition que les GTB installée soient Flex Ready.

Paradoxalement, les petits et moyens bâtiments sont les moins équipés en systèmes de GTB alors qu’ils représentent un énorme gisement d’économies d’énergie, morcelé certes, mais accessible Avec une économie moyenne de 20%, c’est l’équivalent de deux fois la consommation annuelle de Paris, soient 26 TWh, qui sont potentiellement évitables. Pourquoi s’en priver ?

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