Il va falloir passer à la vitesse supérieure. » Les Assises du logement organisées début février par l'Etat et la région Bretagne à Quimper (Finistère) pourraient être résumées par ce témoignage choc. Celui d'une Morbihannaise dans l'obligation de quitter son logement avant l'été pour un mobile home au camping… Cette prise de parole pointe le cas problématique des communes touristiques dans une région qui compte 13 % de résidences secondaires contre 9 % sur l'ensemble de la France. Les 21 000 meublés de tourisme recensés sur le littoral et les îles bretonnes pèsent considérablement sur le marché immobilier et l'accès au logement des habitants à l'année. Présente lors de cette matinée, Annaïg Le Meur, députée (Renaissance) du Finistère, espère beaucoup de la proposition de loi transpartisane qu'elle porte « pour rééquilibrer l'offre de logement locatif ». Adopté le 29 janvier 2024, ce projet législatif vise notamment l'alignement de la fiscalité des meublés de tourisme sur celle de la location longue durée.
Report sur le logement social. Au-delà du littoral, cette crise sans précédent touche l'intégralité du territoire comme le démontre l'état des lieux présenté par le Cerur (1). Depuis 2020, la région a accueilli 20 000 nouveaux habitants, essentiellement de jeunes actifs (52 % ont moins de 32 ans) pour moitié en provenance des régions limitrophes ou de l'Ile-de-France. La décohabitation des ménages, plus accentuée ici qu'ailleurs, pèse pour 35 % des besoins de logements.
Les perspectives de production inquiètent, avec un décalage accru entre les logements autorisés et les mises en chantier. Le territoire s'avère de moins en moins accessible financièrement, avec un prix moyen de 4 540 €/m2 pour un appartement neuf en 2023. La demande se reporte donc sur le logement social : elle a quasiment doublé depuis 2013. Or, l'attractivité de la Bretagne, soutenue par un réel dynamisme économique et un marketing territorial efficace, ne se dément pas. Le préfet de région Philippe Gustin a rappelé les prévi-sions de l'Insee : 260 000 habitants de plus attendus d'ici 2050. « L'accès au logement reste le principal souci des EPCI, déclare-t-il. Il est donc nécessaire d'alimenter notre boîte à outils bretonne et de continuer à expérimenter comme nous le faisons avec l'élargissement du dispositif du Pinel, reconduit en 2024. »
Une réponse à muscler. Plusieurs témoignages d'élus et d'acteurs du logement ont illustré le contenu de ladite « boîte à outils » : majoration de la taxe d'habitation pour les résidences secondaires, prix de vente minoré de l'accession grâce au bail réel solidaire, hausse des aides de l'Anah pour la rénovation thermique des copropriétés, proposition de réduction du taux de TVA pour le logement social, constitution d'une foncière régionale… L'ampleur de la crise appelle néanmoins à muscler la réponse. « On n'est pas à la hauteur de cette bombe sociale, a déclaré Stéphane Le Teuff, président de la FFB bretonne. Nous avons perdu 5 000 logements en 2023. Il est grand temps d'agir ! » En conclusion, le président de région Loïg Chesnais-Girard, a appelé à ne pas déplacer les problèmes, visant « l'inadmissible détricotage de la par le gouvernement ».