L'industrie des mortiers se situe en aval d’industries de base (chimie, ciment et chaux, industries extractives) mais n’est pas elle-même une industrie lourde. Son process se ramène principalement dans des opérations de dosage de produits en quantité différente, puis de conditionnement. Il est rare que les producteurs intègrent des activités amont (carrières…). Le « how-know » des industriels et la valeur ajoutée des produits résident bien sûr dans la formulation laquelle suppose une bonne analyse des besoins des utilisateurs et des technologies de la construction et concentre également les efforts de R et D. En terme de marché cible, la prédominance de la façade (46 % des ventes en comptant l’ITE) est une spécificité du marché français.
La typologie des groupes opérant sur le marché des mortiers en général est très variée. Les ténors de la spécialité, Saint-Gobain Weber et ParexLanko et d’autres nationaux, comme par exemple VPI (Vicat Produits Industriels), s’inscrivent historiquement dans la tradition de l’industrie minérale (chaux, ciment, plâtre)(1). D’autres intervenants sont liés aux géants de la chimie : Bostik (Groupe Total), BASF Construction Chemicals, Cégécol (Akzo Nobel), etc. Quant à Desvres, il fut l’un des premiers, en 1963, à mettre sur le marché des mortiers-colles pour carrelage. A noter qu’il existe à côté des filiales de grands groupes quelques indépendants comme PRB ou Mapei (groupe italien dont le siège est à Milan).
Deux acteurs de poids
Les fabricants se distinguent non seulement par leur origine mais aussi par leur positionnement actuel. Weber et Parex sont incontestablement les plus généralistes avec une stratégie transversale sur l’ensemble des segments. PRB, n° 3 français du marché des enduits de façade (132 M€ de CA en 2008, 350 personnes) a accru ses efforts commerciaux dans les mortiers-colles pour le carrelage, indique Bernard Trichet, responsable marketing-communication. Cantillana semble avoir un positionnement comparable, mais opère surtout dans le nord de la France. Mapei est un multispécialiste (colles à carrelage, revêtements souples, traitement des bétons) qui n’intervient pas sur le segment « façade ».
En terme de poids économique, les deux principaux acteurs sur le marché français sont donc Weber et ParexLanko. Le premier est leader mondial des mortiers industriels, suite notamment au rachat du groupe Maxit en 2008. Weber est également leader mondial en colles et joints à carrelage (source : Saint-Gobain). Il réalise un chiffre d’affaires mondial de près d’1,8 milliard d’euros. Quant à ParexLanko, c’est la filiale de Parex Group, elle-même filiale de Materis(2). Parex Group réalise un chiffre d’affaires de l’ordre de 600 millions d’euros, dont environ 47 % en France.
Sur le marché français, ces deux groupes privilégient une organisation industrielle décentralisée avec une dizaine d’usines dans le cas de Weber et six dans celui de Parex-Lanko, complété par des dépôts, ce qui permet de livrer rapidement les négoces, lesquels ne stockent surtout que des produits de 20/80. Le troisième acteur du marché, PRB présente une stratégie différente : ses activités sont concentrées sur l’impressionnant site de La Mothe-Achart (encore agrandi en 2009), en Vendée. PRB dispose par ailleurs d’un réseau de dépôts permettant de couvrir l’ensemble du territoire national. De plus, le partenariat commercial de PRB semble très fort dans certaines régions comme la Bretagne; pour les zones plus éloignées de ses bases, il s’appuie davantage sur une vente directe aux façadiers (ce que s’interdisent les deux leaders). Les questions logistiques sont particulièrement importantes dans le domaine des mortiers pour la façade, car ce sont des produits à marge plus tendue que les mortiers de spécialité. Autres raisons : il s’agit de marchés très régionalisés, chaque région ayant ses coloris et ses aspects. D’où la nécessité d’une forte proximité commerciale avec la prescription et les façadiers. On notera que parmi les acteurs ayant une dominante enduits de façade, VPI (70,5 M€ de CA) estime avoir gagné des parts de marché en 2009 et stabilisé son activité sur le marché Bâtiment.
Aider les façadiers à se diversifier
C’est à l’évidence une des priorités commerciales des industriels présents sur ce segment, car c’est le plus impacté par la baisse de la construction neuve. Il y a encore quelques années, les entreprises de façades opéraient essentiellement sur le segment du logement neuf en appliquant des mortiers monocouches projetés. A présent, on note un retour d’intérêt pour les solutions bicouches (corps d’enduits enduits de parement) en rénovation des façades anciennes. Surtout un enjeu important est l’emploi des mortiers dans le domaine de l’ITE (isolation thermique par l’extérieur), à la fois pour la pose de l’isolant sur la maçonnerie et pour l’enduit de parement. Dans ce domaine, des formulations à base de chaux aérienne sont proposées, notamment par Weber en alternative aux revêtements plastiques épais (qu’il possède lui-même de longue date dans sa gamme). L’appui technique des industriels (formation, journées techniques des négociants, centre de relations clients) joue un rôle de plus en plus important sur ces marchés. Quant aux industriels à dominante “ chimie du Bâtiment ” (comme Mapei, Sika, BASF) qui ne sont pas présents sur le marché de la façade, ils disposent sans doute de marchés plus stables dans le second œuvre. Des groupes comme Mapei semblent ainsi accroître leur audience auprès du négoce. Les produits pour le gros œuvre et les TP (réparation des ouvrages d’art, travaux de voierie, étanchéité des maçonneries enterrées) qui relèvent de cette spécialité sont pourtant assez exposés.
