ALU Robert Jan van Santen : «Le mur-rideau offre des possibilités d'expression très variées»

-Architecte exerçant en tant que bureau d'études façades à Lille, Robert-Jan Van Santen répond à nos questions.

Comment abordez-vous la conception d'un mur-rideau ?

C'est d'abord une rencontre avec un architecte, puis avec un projet. Nous dressons ensemble un inventaire des concepts, des contraintes et des fonctions que le mur-rideau doit remplir avant de déterminer la typologie de façade la plus appropriée. De cette analyse effectuée en amont, au stade de l'avant-projet sommaire, résulte un niveau de performances, un choix de matériaux, une esthétique et un budget.

Quels sont les critères de sélection et de choix des matériaux ?

L'acier offre une résistance mécanique naturelle qui le prédispose pour franchir de grandes portées, mais les techniques de mise en oeuvre restent relativement rudimentaires. L'aluminium permet un choix varié parmi les nombreuses gammes des fabricants, bien qu'il présente des inconvénients quant au comportement au feu, à l'isolation thermique et à sa résistance mécanique. Les avantages majeurs de l'aluminium sont la fiabilité de leurs performances, une certaine économie, une finition soignée, la pérennité du matériau et la possibilité de fabrication sur mesure des profils sans surcoût important à partir de façades de plus de 300 m2 environ. Bien que peu présents sur le marché des murs-rideaux, des produits à base de technologies mixtes bois-aluminium, acier-aluminium et polyuréthanne-aluminium peuvent se révéler très pertinents.

Quels sont les différents types de murs-rideaux réalisés aujourd'hui ?

J'en citerais principalement trois. Le grand classique, à base d'une grille de montants et de traverses, support des éléments de remplissage, remonte à l'origine du mur-rideau et se réalise encore aujourd'hui pour de nombreux petits et moyens projets d'immeubles. Les châssis ouvrants sont très marqués. Ces constructions nécessitent une mise en oeuvre sur chantier très soignée par des équipes spécialisées. Le deuxième procédé, apparu avec l'avènement de la technologie VEC et VEP (Verre extérieur collé ou parclosé) est la façade à cadres. Elle consiste à accrocher des cadres, indifféremment fixes ou ouvrants, sur une résille de montants et de traverses. Enfin, le mur-rideau à base de panneaux, en simple ou double peau, qui correspond à la mise en oeuvre de panneaux entièrement industrialisés et accrochés directement sur le gros oeuvre. Des exemples parisiens connus : la Bibliothèque François Mitterand et la Grande Arche de la Défense. A partir de ces trois grandes familles, les Architectes et les fabricants se livrent à un jeu de variations et de déclinaisons sans fin. Les possibilités d'expression sont extrêmement variées et les mélanges souvent intéressants.

Quelle place pour l'acier ?

L'acier, connu comme un matériau du passé, apparaît comme un matériau d'avenir. Il offre une résistance mécanique maximale pour une architecture de grande portée. J'ai réalisé récemment à Lille un mur-rideau de 350 m2 avec des profilés en acier inoxydable extrudé : sur une trame de 3,10 m par 11.50 m de haut la menuiserie n'excède pas 8 x 18 cm de section (pas de coupure thermique). La coupure thermique se traite à l'instar des menuiseries aluminium et les techniques de traitement de surface des aciers courants sont maintenant au point, qu'il s'agisse de métallisation ou de galvanisation, avec ou sans thermolaquage. D'autre part, en matière de tenue au feu (C + D notamment), l'acier reste quasi incontournable.

Prenez-vous en compte la pathologie des murs-rideaux lors de leur conception ?

Il existe un tabou sur ce sujet. Chacun pense qu'il s'agit de problèmes propres à un chantier spécifique, ce n'est pas toujours vrai. Il faudrait développer une réflexion constructive sur ce sujet. Au travers de mon expérience, il me semble que la pathologie résulte de trois causes principales. Au niveau de la maîtrise d'oeuvre, il y a parfois un manque de réflexion et de connaissance sur la technique prescrite, et les répercussions sur les autres corps d'état (structure, thermique, acoustique...) sont traitées tardivement sur le chantier ; au niveau des entreprises, la recherche désespérée d'économies pour rentrer dans un budget calculé trop juste se traduit souvent par une sous-traitance sur le chantier peu qualifiée ; enfin au niveau des fournisseurs où les critères architecturaux, pas toujours normalisés, ne font pas l'objet de toute l'attention souhaitée par les prescripteurs.

Quelles orientations guident actuellement vos études ?

Je souhaiterais d'abord souligner que les textes réglementaires, de plus en plus abondants, tirent de manière générale les performances techniques des produits vers le haut. Associé à la pression économique, cela limite le nombre et la variété de produits développés par les gammistes, qui finissent (à quelques heureuses exceptions près) par se ressembler de plus en plus. Disparition des châssis à coulissement vertical et des pivotants. La mise au point de nouveaux produits est longue et coûteuse ; si le contexte d'un projet le permet, il faut savoir que les quasi inévitables imperfections par-ci ou par-là de la création sur mesure sont de moins en moins justifiables sous prétexte qu'elles agrémentent l'architecture. Actuellement l'informatique participe de manière active à la validation de concepts nouveaux et variés en les évaluant sous un maximum d'aspects. Je considère que le marché émergeant de la rénovation de murs-rideaux des années 60, sans dépose de l'ancienne enveloppe par exemple, constitue un terrain de recherche passionnant. Et en matière de finition, je pense que nous allons assister, malgré son surcoût, au retour du poli-anodisé sur un certain nombre d'opérations d'équipements ou de bureaux.

BIBLIOGRAPHIE

-Glasbau Atlas - Balkow, Schuler, Sobek, Schittich, Staib. Editions Detail, 1998.

-DTU 33.1, façades rideaux, façades semi-rideaux, façades-panneaux, CSTB - Afnor, déc. 1996

-Intelligent Glass Façades (texte anglais), Andrea Compagno. Birkhäuser, 1995.

PHOTO : Robert Jan van Santen : «Les produits mixtes bois-aluminium, acier-aluminium et polyuréthanne-aluminium peuvent se révéler très pertinents.»

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