En inaugurant, le 9 juin dernier, sa plateforme de recyclage de dernière génération, l'entreprise alsacienne de travaux publics Vogel entendait marquer son ambition de rester à l'avant-garde de la valorisation matière des déchets inertes du BTP au fur et à mesure que celle-ci gagne en importance et en exigence. Cet enjeu, la PME familiale de 140 salariés (26 M€ de chiffre d'affaires en 2022 en terrassements-VRD, renforcés depuis cette année par les travaux fluviaux), ne le découvre pas. Sous l'égide d'une filiale dédiée, VVK Recyclage, elle a ouvert dès 2001 une plateforme de 2,5 ha à Ebersheim (Bas-Rhin) où elle traite chaque année de 80 000 à 100 000 tonnes de béton usagé, gravats, briques, tuiles et autres vieux enrobés et terres excavées.
Usage selon la granulométrie. Mais en comparaison des filières mises en place jusqu'alors, sa nouvelle installation la fait changer de dimension. Résultant d'un investissement de 5 M€ avec ses aménagements annexes - dont 3 000 m2 de panneaux photovoltaïques en toiture procurant une quasi-autonomie énergétique -, elle emmène l'entreprise sur la voie du zéro enfouissement et d'une valorisation de plus en plus pointue, en fonction de la granulométrie obtenue au terme du nouveau process.
L'équipement parvient ainsi à délivrer un type de sable particulièrement fin, de moins d'1 mm de diamètre, qui devient un matériau de couverture de canalisations d'eau et de réseaux secs. Son quasi homologue - jusqu'à 4 mm - sert à la formulation de blocs de béton de voirie, grâce notamment à sa faible teneur en argile (2 à 3 %). Les granulats un peu plus épais, de 4 à 16 mm, repartent comme « lit de pose » d'autres canalisations, là où les nappes phréatiques sont plus affleurantes. Les matières de 16 à 22 mm sont réutilisées en drainage tandis que les plus gros cailloux sont concassés pour atteindre une taille leur permettant d'entrer en couche de finition des chaussées.
Capter la matière en circuit court. Ces différentes transformations sont rendues possibles par l'ensemble de matériels conçus et mis en place par CDE, l'équipementier nord-irlandais pour le recyclage des déchets inertes retenu par VVK Recyclage. Adepte du traitement par voie humide, ce groupe a installé une solution « clé en main », qui combine un alimentateur-scalpeur, un débourbeur, un système de lavage de sable, un clarificateur d'eau et un dispositif de filtration « aboutissant à la réutilisation dans le process de 96 % de l'eau », souligne Chahine Benoun, responsable de projets chez CDE.
La capacité atteint les 80 tonnes traitées par heure. De quoi donner la possibilité à la filiale de Vogel TP de valoriser les déchets inertes autres que ceux des chantiers de sa maison mère, et d'aller vers une clientèle constituée de confrères des travaux publics. Mais pas tous azimuts, tempère le directeur général Jean-Luc Vogel. « Nous ne souhaitons pas dépasser un rayon de 30 à 40 km pour la récupération de matière entrante. Instaurer de longs circuits émetteurs de CO2 serait incohérent avec la démarche éco-responsable de ce site. »