Les députés Christophe Caresche (SRC, Paris) et Michel Piron (UDI, Maine-et-Loire), rapporteurs de la MEC (mission d'évaluation et de contrôle) « sur l'optimisation des aides à la construction de logements sociaux » ont présenté jeudi 18 juillet devant la commission des finances de l'Assemblée nationale, leur rapport, rédigé au terme d'une série d'auditions des acteurs du secteur, menées depuis le début de l'année 2013, notamment Cécile Duflot, ministre de l'Égalité des territoires et du Logement, l'UESL-Action Logement , l'USH, la Caisse des dépôts, l'administration et les services déconcentrés, ou encore des aménageurs, des élus locaux et la société immobilière Perl .
Trois grands champs d'actions se dégagent des 51 recommandations que Christophe Caresche (SRC, Paris) et Michel Piron (UDI, Maine-et-Loire), rapporteurs de la MEC (mission d'évaluation et de contrôle) « sur l'optimisation des aides à la construction de logements sociaux » ont soumis à la commission des finances de l'Assemblée nationale jeudi 18 juillet. Les deux députés préconisent en effet de recentrer l'allocation des aides, d'optimiser les instruments de politiques publiques et de mieux organiser la mobilisation des collectivités territoriales en faveur du logement social.
Regroupement des bailleurs sociaux
Les rapporteurs plaident tout d'abord en faveur d'un renforcement des « dispositifs d'identification des besoins du terrain et de connaissance des loyers des marchés locaux », et ce alors que le ministère de l'Égalité des territoires et du Logement expérimente actuellement la mise en oeuvre des observatoires locaux de loyers. Ils estiment à cet égard que « l'observation des loyers doit, au moins, être faite en lien avec celle des niveaux de revenus », et recommandent « que l'État se concentre sur la récupération et la synthèse des données qui remonteraient des territoires intercommunaux et régionaux ». « Disposant ainsi d'un balayage assez fin du terrain, [ce dernier] pourra jouer son rôle d'arbitre entre tous les territoires. » Par ailleurs, ils « invitent » les collectivités locales « à croiser leurs études avec le diagnostic patrimonial dressé par les bailleurs sociaux dans leurs plans stratégiques de patrimoine ».
Les deux députés « rejoignent » en outre « le point de vue de la Cour des comptes et de l'USH », plaidant pour « la définition d'un zonage propre à la programmation de logements sociaux ». Partant de là, ils « confirment le bien-fondé d'une démarche privilégiant le développement du logement social dans les zones où les besoins sont les plus importants », mettant toutefois en garde contre le risque de « sacrifier les attentes légitimes des autres zones », et soulignant la nécessité de « tenir compte des bassins d'emplois prioritaires et de l'offre en capacité de mobilité des territoires ».
« Même si ce ne peut être une solution systématique », Christophe Caresche et Michel Piron « préconisent » en outre « vivement » le regroupement des bailleurs sociaux « au sein d'entités de taille conséquente disposant des mêmes ressources, compétences et expertises, et constituant de ce fait une véritable 'force de frappe' en vue de la construction de logements sociaux, en association avec les collectivités locales ». Pour mémoire, le projet de loi Alur impose aux offices HLM d'être rattachés à un EPCI à compter du 1er janvier 2017 sans les obliger à fusionner, bien que le ministère soit favorable aux rapprochements et mutualisations entre organismes. Du côté de l'ex 1 % Logement, les coopérations et autres fusions se poursuivent .
« Explorer de nouvelles pistes d’optimisation des prêts »
En ce qui concerne la mobilisation des moyens financiers, les deux députés « rappellent la nécessité d'intégrer les besoins d'entretien et de rénovation des logements sociaux existants dans les projections financières et les programmations relatives au développement du parc » et « recommandent que soient étudiés avec attention l'impact de la fin des exonérations de TFPB dont profitent les nouvelles opérations de logements sociaux [ainsi que] l'intérêt qu'il y aurait à prolonger quelques années encore leur bénéfice ».
Par ailleurs, ils reprennent à leur compte « les propositions que leur a soumises la Caisse des dépôts » lors de son audition, afin d'optimiser les prêts qu'elle délivre aux bailleurs sociaux. Il s'agirait ainsi de « réaménager la dette existante » contractée par les bailleurs sociaux auprès de la Caisse, d' « augmenter temporairement la quotité de prêt pour les opérations nouvelles », ou encore d'allonger « temporairement », « de 10 ans », la durée des prêts accordés aux bailleurs. Ils recommandent également de « baisser la commission de centralisation des livrets A » versée par la CDC aux établissements bancaires.
« Faciliter » la vente HLM
Michel Piron et Christophe Caresche pointent en outre le besoin en ressources propres soulevés par les bailleurs sociaux. Ils « insistent » à cet égard sur « la nécessité d'appliquer fermement le dispositif des suppléments de loyer de solidarité » et « recommandent le maintien du versement de l'APL, même en cas de défaillance du locataire en faveur des bailleurs sociaux en contrepoids du rationnement que le conventionnement impose à leurs recettes ».
« Afin de faciliter les ventes de logements sociaux, on pourrait envisager d'accorder des facilités aux préfets pour les autoriser avant que les travaux de remise aux normes ne soient entrepris », écrivent-ils encore, non sans ajouter qu'il faudrait alors, pour « rassurer » les collectivités locales, « réfléchir à tout ce qui permet une meilleure gestion des copropriétés, notamment quand il existe une mixité entre logements sociaux et propriétaires occupants ».
Enfin, les deux députés estiment que « l'accession d'un logement social doit être réversible dans de bonnes conditions pour les anciens locataires accédants », et suggèrent « d'étudier les moyens de relancer le levier du PTZ+ pour les ventes HLM ».
« Priorité à la construction »
Christophe Caresche et Michel Piron « conseillent » par ailleurs « de recourir avec modération à la transformation de logements privés existants pour produire du logement social », « avant tout en fonction de la densité ou plus précisément du niveau de disponibilité foncière du territoire cible ». Ils « insistent » sur « la priorité qui doit être donnée à la construction », « seule garante d'un développement de l'offre d'ensemble et plus riche en emplois ».
À ce titre, ils suggèrent qu'un « durcissement plus net des taxes foncières sur les terrains à bâtir en zones tendues pourrait favoriser leur construction ou accélérer leur mise sur le marché », faisant valoir qu' « en outre il apporterait un supplément de recettes locales toujours bienvenu ».
Ils saluent par ailleurs les « mesures favorisant la densification » adoptées dans le cadre de la loi « habilitant le gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction », « susceptibles » selon eux « de contribuer à dégager des marges foncières, trop rares en zones tendues, pour répondre aux objectifs de construction de nouveaux logements ».
Dossier unique et fond de garantie
Michel Piron et Christophe Caresche formulent ensuite une série de recommandations relatives à la gouvernance territoriale de la politique du logement, rappelant au préalable leur attachement à un pilotage intercommunal de cette politique. Il faut « au moins », selon eux, "viser l'instauration d'un dossier unique de financement des logements sociaux et l'harmonisation du calendrier des financeurs ». « Au-delà, pour plus de cohérence, de complémentarité et par suite, d'efficacité, il serait pertinent que les différents financeurs d'un territoire harmonisent davantage leurs priorités en matière de logements sociaux et les programmations qu'ils en déduisent. »
Les rapporteurs « considèrent » en outre que « dans la mesure où ils sont déjà adossés à une collectivité, les offices publics d'HLM pourraient être systématiquement exonérés de garantie sur leurs emprunts auprès de la CDC ». « Plus généralement, partant des constats que l'ensemble du secteur est surveillé de près par de nombreux organismes et que les accidents financiers y sont très rares, il pourrait être envisageable de rendre gratuite la garantie de la CGLLS quand elle est sollicitée après défection des collectivités. » À défaut, « il serait utile d'étudier la création d'un fonds dédié alimenté par des cotisations des communes en zones tendues ».
Conditions d’octroi des aides et sanctions
Enfin, Michel Piron et Christophe Caresche « suggèrent que l'octroi des aides à la construction puisse être conditionné à l'existence d'accords de régulation du marché [ou] à des conventions d'objectifs entre les préfets et les intercommunalités qui comprendraient, entre autres, des engagements en termes de localisation domicile-travail et de taux de mobilité ».
« En cas de refus de délivrance des permis de construire nécessaires à la production de logements sociaux dûment prévue dans les documents de planification », ils proposent « la substitution d'office » des intercommunalités aux communes, et s'interrogent « sur la possibilité de moduler la dotation globale de fonctionnement en cas d'insuffisance des efforts de rattrapage des communes en matière de construction de logements sociaux ou, a minima, en cas de constat de carence ».