Alors que le grand ensemble de Maurepas est inclus dans un programme de renouvellement urbain des quartiers prioritaires de la ville d’Ille-et-Vilaine, le Musée des beaux-arts y a ouvert le 1er février de nouvelles salles d’exposition au pied d’un immeuble de logements sociaux. Conçu par l’agence nantaise Titan, ce lieu culturel incarne la volonté politique d’ouverture de Maurepas sur la ville.
Marie-Douce Albert
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Programme complet
Le Musée des beaux-arts n’occupe qu’une partie (en jaune) du local qui constitue une extension de la «Banane». L’agence Titan poursuit actuellement le chantier de la ludothèque et des lieux d’accueil pour la petite enfance qui viendront compléter le programme vers la fin de l’année 2025.
Avant le musée
Dans les grands ensembles construits des années 1950 aux années 1970 autour du centre Rennes, les pieds d’immeubles ont souvent été dotés de «mètres carrés sociaux», des locaux collectifs notamment à destination des associations. Le volume bâti au pied de la «Banane» a par exemple abrité un foyer pour personnes âgées. Reconnaissable à ses parements de façade en granit très «couleur locale», l’équipement était à l’époque accessible par le niveau R+1.
Un patio pour des expos
Le projet de l’agence Titan, qui avait été retenue dans le cadre d’une procédure adaptée, a nécessité une restructuration importante du bâtiment d’origine. Ainsi la principale salle d’exposition s’est coulée dans l’espace d’un ancien patio en plein-air. Le volume excavé offre désormais une belle hauteur sous plafond. Cette salle blanche tire son éclairage naturel de la galerie haute mais aussi d’un oculus zénithal.
Cabinets de curiosité
De plus petites salles ont été aménagées à l’étage, dans les volumes d’anciens appartements. «Nous avons respecté la forme des lieux et la fonction s’est adaptée», explique l’architecte François Guinaudeau, l’un des trois associés fondateurs de Titan. Ces cabinets ont été équipés de vitrines très fines, haut-de-gamme. Elles ont été produites par la marque Goppion qui fournit de grands musées dans le monde entier comme, en France, le musée de la Bibliothèque nationale - site Richelieu qui a rouvert en 2022.
(Julien Lanoo/Julien Lanoo)
Fondu au noir
Le noir choisi pour ces espaces crée une plus grande intimité, mais floute aussi les contours de ces pièces limitées par leurs plafonds bas et les murs de refend en béton des anciens appartements. Toutefois, des rideaux qui occultent la lumière de part et d’autre, peuvent être ouverts, permettant une vue en balcon sur la grande salle ou sur le quartier alentour. Ici une œuvre de l’exposition inaugurale de l’artiste Isabelle Arthuis.
(Julien Lanoo/Julien Lanoo)
Béton en flocons
L’agence Titan a opté pour un traitement des espaces qui pour être qualitatif, demeure très sobre. Dans les petites salles de l’étage, le curage fin des murs de refend a révélé le béton d’origine et la nature de son procédé de fabrication : le matériau avait été fabriqué à grand renfort de gros granulats et non vibré. Il demeure aujourd’hui apparent.
Colonne de parpaings
Le recours aux matériaux bruts se retrouve aussi dans la colonne de l’ascenseur qui dessert les deux niveaux, ceinturée de parpaings courbes. Ces éléments sont simplement des blocs à bancher.
Cercles à répétition
Oculus, colonne d’ascenseur circulaire, mais aussi escalier hélicoïdal, le rond est la marque du musée. Jusqu’à la forme du casier jaune de rangement des sacs encombrants, dessiné par Titan. Les architectes revendiquent un vocabulaire géométrique et coloré inspirée par le Bauhaus et les toiles du peintre Vassily Kandisky (1866-1944). La future ludothèque et les espaces petite enfance auront aussi leur motif et leur couleur de référence : le carré, le triangle, le rouge, le bleu.
Usages (re)liés
A terme, les trois équipements seront reliés pour permettre aux différents publics d’accéder de l’un à l’autre aisément, notamment par cette coursive haute. Cette porosité est sensée inciter les personnes venues pour un usage précis à profiter des autres offres du lieu et, en particulier, des expositions. Une illustration de la volonté exprimée par la directrice du Musée des beaux-arts, Delphine Galloy : «ce lieu est un musée dans son quartier, pas un musée isolé». Pour l’heure la coursive aboutit encore à une porte hermétiquement fermée, afin de protéger les œuvres des nuisances, et notamment des poussières, du chantier en cours dans le reste du bâtiment.
Chantiers en cours
Alors que les travaux menés par l’entreprise Coreva se poursuivent pour permettre l’achèvement de la ludothèque et des lieux d’accueil petite enfance pour la fin 2025, la rénovation de 244 logements sociaux de la «Banane » doit être lancée en mars prochain. Ce dernier projet en a été conçu par les agences d’architecture parisienne H20 (mandataire) et rennaise Atelier L2 (associée) et son chantier devrait durer deux ans.
A Rennes (Ille-et-Vilaine), la création d’un musée au cœur d’un quartier prioritaire est un acte politique assumé. Alors que le Musée des beaux-arts de la ville a ouvert sa deuxième adresse au pied d’un immeuble de logements sociaux du grand ensemble Maurepas le 1er février, l’adjoint à l’Urbanisme, Marc Hervé, insiste sur la volonté d’accroître «l’égalité des chances. Tout enfant de Maurepas doit pouvoir accéder aux équipements culturels rennais. Il faut faire tomber les barrières.»
Sans attendre
Si le lieu est de taille modeste (347 m² de surface utile), l’ambition est grande. Au point que la collectivité n’a pas souhaité attendre, pour ouvrir ce musée «bis», que la barre au pied de laquelle il se trouve soit elle-même réhabilitée. Ces locaux qui avaient été construits en poste avancé de cette longue courbe surnommée la «Banane », ont été restructurés et livrés par l’agence d’architecture nantaise Titan, sans attendre la rénovation des logements sociaux, qui doit débuter le mois prochain.
La nouvelle vocation culturelle d’anciens espaces collectifs de l’ensemble d’habitat a suscité un montage d’opération particulier : le projet a un bailleur social pour maître d’ouvrage, Archipel Habitat, mais les 4/5e des 2,5 M€ TTC de son coût de réalisation ont été financés par d'autres entités : la Ville et la Métropole, la région Bretagne, l’Etat via la direction régionale des affaires culturelles (Drac) et, enfin l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru).
En effet, Maurepas est l’un des quartiers rennais construits dans les années 1950-1970 qui font l’objet d’un programme global de renouvellement étalé sur 10 ans (2016-2026) et doté de 700 M€ d’investissement. Près du musée, deux tours de logements ont déjà été réhabilitées en 2022 et 2023, deux autres sont entrées en chantier l’an dernier.
Dans ce vaste mouvement, le nouveau Musée des beaux-arts se devait de répondre à des attentes contraires : ne pas intimider les potentiels visiteurs mais offrir toute l’excellence requise pour une telle institution. Le programme, lui-même, devrait permettre de vaincre les réticences, puisqu’au lieu d’exposition s’ajouteront bientôt une ludothèque et des espaces dédiés à la petite enfance. Les plans tels qu’ils ont été établis par Titan créeront la possibilité de passer aisément de l’un à l’autre. L’agence d’architecture, enfin, réussit à répondre à cette double exigence par son intervention simple en apparence, avec ses matériaux bruts, mais finement réalisée, d’une précision et une élégance réelles mais discrètes.
BET : Arest (structure), Cab. Lemonnier (économiste), Patrick Tual (fluides) et Dekra (bureau de contrôle).
Entreprise générale : Coreva.
Surface du musée : 347 m² SU.
Surface totale des équipements publics : 946 m² SU.
Coût des travaux du musée : 2,5 M€ TTC.
Calendrier : lancement du chantier du musée en septembre 2023 et livraison en janvier 2025 ; lancement des travaux de la ludothèque et des espaces petite enfance en juillet 2024 et livraison prévue en décembre 2025.
Découvrez le témoignage de Sandrine Porterie qui nous partage son parcours au sein du Groupe et nous plonge au cœur de l’agence d’Aix-en-Provence qu’elle dirige aujourd’hui.