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S’approvisionner à 100% en matériaux issus du réemploi, bio et géosourcés ou présentant au moins 15% de matières recyclées, provenant en priorité de Paris et d’Ile-de-France ! C’est à ce cahier des charges que s’est plié le projet de réhabilitation de la maison des Canaux, située sur les quais des Seine dans le XIXe arrondissement.
Le bâtiment, construit en 1882 pour l’administration des services des Canaux, est une construction en brique et pierre d’environ 600 m² répartis sur trois niveaux. Après le départ de l’administration en 2010, la Ville a décidé de le convertir en une Maison des économies solidaires et innovantes, vitrine de l’économie circulaire, portée par l’association Les Canaux. Le projet s’inscrit dans le Plan Climat Air Energie et le Plan Economie Circulaire de la ville.
Une réhabilitation en deux temps
Une première phase de travaux a abouti, à l’été 2017, au réaménagement intérieur du R+1 et R+2 aujourd’hui à usage de bureaux. Pour cette étape, 95% des matériaux, produits et équipements utilisés étaient issus du réemploi, biosourcés et/ou éco labellisés. De même, la grande majorité (95%) des matériaux et des déchets sortants ont été réemployés, réutilisés ou recyclés. Pour ces travaux, le maître d'ouvrage a remporté le Territoria de bronze dans la catégorie « Aménagement de l’espace public – Urbanisme » décerné par l’Observatoire national de l’innovation publique en 2018.
La seconde phase s’achève actuellement, après un marché de conception-réalisation de 1,7 million d'euros, passé en mars 2020, sous la houlette de l’agence d’architecture Grand Huit, mandataire du groupement. Le programme consistait cette fois à réaménager le rez-de-chaussée et à créer une terrasse extérieure, en affichant toujours des ambitions environnementales élevées. Après une dépose soigneuse de l’existant, afin de faciliter le réemploi de certains matériaux sur place ou leur valorisation, la construction a pu commencer.
Des poutrelles métalliques réemployées en gros œuvre
Côté réemploi, de nombreux maîtres d’ouvrage ont accepté de participer à ce projet en créant des synergies inter-chantier et en donnant à la ville de Paris des matériaux et produits de construction. Des contrats de cession à titre gratuit ont sécurisé juridiquement les responsabilités de chacun. Les entreprises se sont également fournies sur les plateformes physiques et numériques de réemploi. Poutrelles, portes palières, paillasses, mobiliers… une dizaine de matériaux ont ainsi été sauvés de la benne, transformés en atelier pour être réemployés sur site.
Exemple remarquable du projet, dans le cadre d'une déconstruction sur la ZAC des Rives de l’Ourcq, à Bondy (Seine-Saint-Denis), les poutrelles métalliques d’un hangar ont été déposées et données par Sequano, l’aménageur de l’Établissement public territorial Est ensemble. Assemblées puis posées par Général Métal Edition, elles constituent l'essentiel de la structure de la terrasse extérieur et sa pergola. Exemple unique de réemploi pour le gros œuvre, la mise en place de ces poutrelles a nécessité un protocole rigoureux de caractérisation et un accompagnement sur les questions assurantielles par Bellastock, coordonnateur du programme européen "Facilitating the circulation of the reclaimed building elements in northwestern Europe" (FCRBE).
Un écran thermique lattis bois et enduit plâtre sur isolant biosourcé
Côté matériaux bio-géosourcés, les maîtres d’œuvre ont choisi de réhabiliter une technique parisienne ancienne pour l’isolation intérieure des murs du rez-de-chaussée. Un écran thermique constitué d’un lattis bois et d’un enduit de plâtre, vise à protéger du feu un isolant biosourcé composé de coton issu du recyclage de textiles effilochés. Outre son caractère coupe-feu, cette technique permet de s’affranchir du treillis métallique imposé par la réglementation sur la sécurité incendie, mais lourd sur le bilan carbone. Ce dispositif a d’ailleurs fait l’objet d’un essai de résistance au feu : elle est de 30 minutes en paroi verticale.
Ce complexe isolant associé à une ventilation naturelle avec récupération de la chaleur et à une chaudière à pellet permet de diviser par deux les consommations d'énergie. L'édifice est également équipé d'un système de récupération des eaux pluviales pour l’arrosage des plantations.
Fiche technique
Maîtrise d'ouvrage : Ville de Paris - Direction du logement et de l'habitat, Association Les Canaux (exploitant), Apave (bureau de contrôle), Tribu Energie (AMO performance énergétique). Maîtrise d’œuvre : Grand Huit (architecte mandataire), Tisco (structure), Switch (chauffage ventilation plomberie), Bellastock (réemploi structure métal). Entreprises principales : Travail et Vie (curage et logistique), Duarte Construction (gros œuvre), Apij-Bat Cooperative (second œuvre), General Metal (constructeur métallique), Elips (pierres sèches), David et Fils (menuiseries extérieures), AS Net (parqueteur), À Travers Fil (menuiserie), Atelier R-Are (menuiserie), Les Resilientes (textiles), Bego-Reemploi (parement de sol à partir de béton scié), Stu-Dio (parement en céramique à partir de terre du Grand Paris). Coût des travaux : 1,7 million d'euros TTC pour la 2e phase