Villes moyennes 4/5 : Châteauroux joue sur tous les tableaux

Gratuité des transports publics, développement de zones d’activités périphériques, campagnes de communication, reconversion de friches ou encore revitalisation des commerces en centre-ville… la préfecture de l’Indre s’appuie sur de multiples leviers pour renforcer son attractivité.

Réservé aux abonnés
Balsan'éo Châteauroux
Initialement prévu en périphérie, le centre nautique Balsan’éo a été construit en centre-ville dans le quartier Balsan, une ancienne friche industrielle en pleine mutation.

20 ans de gratuité dans les bus de ses 14 communes donnent une longueur d’avance à Châteauroux Métropole (73 000 habitants).

La gratuité, ça rapporte

Aujourd’hui reprise par de nombreux candidats écologistes aux dernières élections municipales, l’audacieuse décision du maire UMP de l’époque, Jean-François Mayet, relevait moins de l’idéologie que du pragmatisme : les transports publics locaux souffraient d’une très faible fréquentation.

Sans alourdir la charge de la collectivité, la gratuité a multiplié par trois le nombre d’usagers. Ils ont joué un rôle moteur pour relancer l’attractivité commerciale du centre-ville. Depuis, le mouvement a inspiré Aubagne, Castres, Figeac, Gap, Niort ou plus récemment Dunkerque.

Nouvelles activités

En plus des commerces de centre-ville, « la gratuité des transports en commun facilite l’implantation d’activités économiques sur le territoire », assure Gil Avérous, maire LR et président de Châteauroux Métropole depuis 2014.

Et l’élu de citer l’implantation d’un atelier de maroquinerie de luxe avec une soixantaine de salariés dans un ancien supermarché du centre-ville piétonnier. « Cette localisation a parfaitement convenu à l’entreprise dont la main d’œuvre, essentiellement féminine, n’a pas toujours une facilité de mobilité, faute de permis ou de véhicule », détaille Gil Avérous. Dans la foulée, un projet d’école de maroquinerie devrait voir le jour dans des locaux vacants voisins.

Stratégie multi-leviers

Réélu au premier tour des dernières élections municipales avec plus de 70 % des voix, Gil Avérous a fait de l’attractivité un des marqueurs de son action.

« Notre stratégie est multi-leviers. Le renouvellement de la population et de l’activité conditionne la réactivation des commerces. Cela implique un travail sur l’habitat, mais également sur les leviers économiques » résume-t-il. 

27 actions pour le cœur de ville

Le programme Action Cœur de Ville décline cette stratégie autour de trois objectifs : ramener des habitants au centre-ville, animer les rues et les rez-de-chaussée et apaiser les circulations. La Ville et l’agglomération ont signé une convention-cadre en septembre 2018 et un avenant en février 2020. « Nous avons été parmi les premiers financés car nous avions déjà des projets prêts » explique Gil Avérous.

« La mise en place de ce dispositif porté par le gouvernement nous a permis de booster les résultats et d’avoir un centre-ville qui n’a rien avoir avec celui d’y a 5 ans » reconnait l’élu. Quelques 27 actions mobiliseront 30 à 35 millions d’euros d’investissement.

Dynamique partenariale

La dynamique partenariale impulsée par le programme national se traduit dans l’opération programmée d’amélioration de l’habitat – renouvellement urbain (OPAH-RU) en faveur du logement dans le centre-ville. Outre ses prêts, la Banque des Territoires contribue au financement d’études d’ingénierie conduites par des prestataires extérieurs. Action Logement orchestre la réhabilitation des bâtiments anciens. L’organisme a notamment contribué à créer 12 studios meublés dans l’ancienne école Pigier. 

L’activation des rez-de-chaussée commerciaux passe par une aide aux locataires : pendant un an, la collectivité prend en charge 75% du montant du loyer, pour les commerçants qui s’installent dans un local vacant depuis plus de 6 mois.

Les petits commerces attirent les grands

« Depuis le 1er janvier 2017, cela nous a permis d’installer 37 établissements de plus dans le centre-ville », comptabilise Gil Avérous. Ce succès coïncide avec l’installation d’une locomotive : la Fnac occupe quatre locaux acquis et réhabilités par la Ville, sur 780 m2.

Au centre de Châteauroux, le taux de vacance des commerces est passé de 15,8% en 2013 à 10,8% en août 2021, mais Gil Avérous reste prudent, dans le contexte de crise sanitaire : « Les offres commerciales évoluent dans le temps et redynamiser un centre-ville ne se fait pas en quelques années. En ça, la prolongation du dispositif Action Cœur de Ville jusqu’en 2026 est une bonne chose, essentielle même » déclare-t-il.

Balsan, une friche en mutation

Dans la foulée des commerces, la mutation de l'ancienne manufacture royale de draps, devenu le quartier Balsan, signe le retour des grands projets structurants au centre-ville. Depuis octobre 2020, la Cité du numérique y héberge à la fois le Village by CA réunissant des entreprises et start-ups innovantes, un amphithéâtre de 400 places pour des séminaires, un espace pour le Campus connecté et le Techlab, un atelier de l’école d’ingénieurs HEI.

Cette année, le centre aquatique Balsan’éo (40 millions d’investissement) a ouvert ses portes. « A l’origine, cet équipement était prévu en périphérie mais en 2014, nous avons choisi de le construire dans le centre-ville, afin de contribuer à son animation » rappelle Gil Avérous.

Enfin, l’appel à projets « Réinventons nos Cœurs de Ville » a rendu une vocation à la dernière grosse parcelle disponible dans le quartier Balsan : d’ici 2024 et grâce à l’appui de la région Centre – Val de Loire, Adim y construira un pôle santé et un pôle d’enseignement supérieur à rayonnement national (écoles d’infirmières, d’aides-soignantes et d’ambulanciers) pour le groupe de cliniques Elsan.

Le tournant de 2014

L’effort porté sur le centre-ville remonte à 2014 : « Il y a vraiment eu un revirement de politique, même s’il n’y a pas eu d’alternance partisane, car j’étais le directeur du cabinet de mon prédécesseur », reconnait Gil Avérous. Entre 2000 et 2014, l’agglomération a beaucoup développé les zones périphériques pour y installer des commerces, des activités tertiaires et industrielles ».

Deux pôles commerciaux – Cap Sud et Grandéols – se sont développés à proximité d’échangeurs autoroutiers au nord et au sud de l’agglomération. Dans le même temps, trois zones d’activités ont concentré une grande partie des implantations d’entreprises.

Hub sino-européen

Près de l’aéroport, la zone de la Malterie est rapidement arrivée à saturation, ce qui a ouvert la voie à la Zac d’Ozans (508 hectares dont 325 cessibles), un des rares parcs d'activités économiques certifié HQE-Aménagement.

Après la livraison des premiers hectares en 2013, les aménageurs se sont concentrés sur la reconversion du site militaire voisin de La Martinerie, libéré par l’Armée en 2012. Aujourd’hui, l’ancien terrain militaire entièrement reconverti accueille notamment la partie éducation du hub sino-européen Eurosity. Les Chinois entendent tirer parti de la situation géographique et de la présence d’un aéroport doté d’une piste de 3 500 mètres pouvant accueillir les très gros porteurs. 

Attractivité retrouvée

Sous l’effet du confinement, les Franciliens prennent le relais des Chinois. Deux campagnes de communication ont récemment tenté de les convaincre de s’installer dans le département, à l’initiative de la ville de Châteauroux, puis de l’agence d’attractivité de l’Indre. 

« Après les manifestations de fin 2019, les grèves à répétition dans les transports en commun en début d’année et un confinement souvent mal vécu faute d’accès aux espaces extérieurs, les Franciliens sont de plus en plus nombreux à vouloir changer de cadre de vie » fait remarquer Christian Bodin, président de l'Agence d'attractivité de l'Indre.

Pour l’heure, l’impact se manifeste surtout en zone rurale. Mais la tendance pourrait bien s’inverser : après des années de baisse, la population de Châteauroux commence à se stabiliser. La préfecture de l’Indre émerge dans les classements des villes où il fait bon vivre. Un an après son entrée dans top 50 du Journal du Dimanche à la 46e place, Châteauroux en a gagné 10 en 2021, pour se hisser 36ème rang.

Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires