Versailles poursuit son règne végétal

Aménagement -

La restructuration du secteur Versailles-Chantiers fait naître un nouveau pôle urbain où ville et nature s'entrelacent.

 

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Dans la clairière centrale du jardin des étangs Gobert requalifié, un banc en béton blanc de 93 m de long se déploie en serpentant sur la verdure, comme une sculpture géante de land art.

Une forme rare d'espace urbain est née en bordure de la gare Versailles-Chantiers (Yvelines) requalifiée en pôle multimodal : une gare routière qui n'est pas la zone logistique dissimulée dans un interstice urbain, mais une place publique qui fédère autour d'elle un nouveau condensé de ville multifonctionnelle : logements, bureaux, commerces, services, parc public… Un premier scénario, écrit au début des années 2000, incluait un centre commercial assorti d'un multiplexe. Auraient alors disparu sous une dalle béton les espaces boisés et le site historique des étangs Gobert, réservoirs d'eau aujourd'hui asséchés qui alimentaient les fontaines du château. Quant aux petits commerces du quartier et à la salle de cinéma Cyrano, ils auraient fini écrasés par la concurrence.

En 2008, fidèle à sa promesse de campagne, François de Mazières, nouveau maire de la ville, annule le projet, jugé destructeur pour l'environnement, dispendieux à l'excès et inadapté aux besoins des Versaillais. Des compensations financières -et l'attribution de la maîtrise d'ouvrage pour les futurs bureaux et logements - ont convaincu Nexity et Unibail-Rodamco, promoteurs de l'ancien projet, d'annuler leur recours devant le tribunal administratif. Sous la houlette de l'architecte Jean-Marie Duthilleul, concepteur du projet urbain, une nouvelle histoire s'est écrite.

Le projet s'inscrit dans la politique urbaine menée par la municipalité avec l'objectif de faire de la ville du Roi Soleil une « ville nature » selon la formule de François de Mazières, avec des espaces naturels préservés et une végétalisation du tissu urbain renforcée. Cette démarche s'inscrit en continuité de l'urbanisme versaillais du XVIIe siècle qui avait mis sur un pied d'égalité paysage végétal et masses bâties. C'est d'ailleurs avec l'avenue de Sceaux, un des grands axes royaux qui mènent au château, que ce nouveau pôle urbain Versailles-Chantiers est raccordé. « Les terrains étant coincés entre les voies ferrées et le jardin des étangs Gobert, le fil conducteur du projet a été le désenclavement du secteur », explique Jean-Marie Duthilleul.

Parcours de circulations douces. La requalification paysagère par Michel Desvigne intègre donc un parcours de circulations douces qui relie le quartier de la gare à l'avenue de Sceaux, en traversant le jardin des étangs Gobert requalifié. Longtemps abandonné, ce dernier était envahi par une végétation spontanée qui avait fini par constituer un espace boisé. « Nous nous sommes livrés à un exercice minimaliste : sculpter ce “ petit bois ” enjouant sur les densités, les pleins et les vides, pour former des bosquets et des clairières qui démultiplient les lieux », détaille le paysagiste. Dans la clairière centrale, un banc en béton blanc de 93 m de long conçu par l'architecte Inessa Hansch se déploie en serpentant sur la verdure, comme une sculpture géante de land art. L'accès des autocars à la gare routière s'effectue par une nouvelle voie de circulation, sorte de tranchée creusée dans la colline qui divise en deux parties le site des étangs Gobert, avec d'un côté le jardin et de l'autre une ferme urbaine.

« J'avais montré à Jean-Marie Duthilleul un quai de gare en Autriche, planté d'arbres, où tous les aménagements étaient en bois », se remémore François de Mazières. Si les abribus sont bien construits en mélèze, avec un complexe végétal en toiture, les longs alignements d'arbres souhaités étaient incompatibles avec la réalisation du parking souterrain. Dommage… Ils auraient créé une jolie continuité entre les deux opérations qui se font face, chacune à une extrémité de la gare routière : à un bout, un grand îlot de logements conçu par Elizabeth de Portzamparc ; à l'autre, un ensemble de bureaux réalisé par Christian de Portzamparc, chaque opération ayant son cœur d'îlot aménagé par David Besson-Girard en un grand jardin où l'on circule parmi les arbres.

Le programme de logements favorise les rencontres entre générations et catégories sociales, car mixant résidence seniors, logements étudiants, sociaux, en accession libre. Le rez-de- chaussée rassemble les espaces collectifs des logements seniors, une crèche et un espace de coworking. « Situé à l'extrémité du quartier, avant que le tissu urbain ne vienne s'interrompre par de grandes voies de circulation, le bâtiment ferme la perspective en accueillant la ville », décrit Elizabeth de Portzamparc. D'où une frontalité affirmée qui stabilise le site.

Ruban. En face, l'îlot de bureaux s'ouvre sur la gare routière et se déploie en un ruban qui s'adapte à des situations urbaines différentes (voirie, parvis, petite place, etc.). « J'étais impressionné de construire à Versailles et j'ai choisi d'intégrer le bâtiment dans la ville par un certain classicisme en décomposant le volume en trois pavillons à l'ordonnancement régulier », raconte Christian de Portzamparc. Entre ces deux îlots, bordant la gare routière sur sa longueur, le siège social de Nature & Découvertes, conçu par Patrick Bouchain, est installé dans un bâtiment en bois, clipsé dans la structure métallique d'une ancienne halle ferroviaire, dépositaire de l'histoire industrielle des lieux.

Maîtrise d'ouvrage : Ville de Versailles, Nexity, Unibail-Rodamco.

Maîtrise d'œuvre : Jean-Marie Duthilleul, architecte (projet urbain et gare routière) ; Michel Desvigne, paysagiste (jardin des étangs Gobert) ; Elizabeth de Portzamparc, architecte (logements, environ 21 400 m2) ; Christian de Portzamparc, architecte (bureaux, environ 23 200 m2) ; Patrick Bouchain (siège Nature & Découvertes, environ 3 000 m2). Livraisons : 2013 à 2020. Coût de l'opérationpour la Ville : 20 millions d'euros HT.

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