Pour les badauds et les riverains du chantier « Chagall », à Massy (Essonne), c’est le clou d’un spectacle qui dure depuis plusieurs mois : la grue SGC90 de Sarens a posé en début de semaine les deux nouveaux ponts des lignes de RER B et C.
L’opération a été menée en moins de 24 heures avec la mise en place dans la nuit de lundi à mardi du pont de Chartres, 1375 tonnes et 86 mètres de long (ligne B, gérée par la RATP), puis, mardi après-midi, celle du pont de Gallardon, 950 t et 57 m (ligne C, SNCF Réseau).
Nouvelles rames
Leurs prédécesseurs dataient respectivement de 1923 et 1928. Outre le rajeunissement nécessaire d’infrastructures centenaires, le projet Chagall – pour Chartres et Gallardon – permettra de faire circuler les nouvelles rames du RER B, les MI20, qui arriveront sur la ligne en 2025-2026. « Contrairement aux ouvrages précédents, les nouveaux ponts seront ballastés, offrant un meilleur confort vibratoire et acoustique aux voyageurs et aux riverains », explique Gilles Gautrin, directeur de la modernisation et du développement pour SNCF Réseau Ile-de-France.
15 000 heures de soudage
Les nouveaux ponts – un modèle treillis de type Warren et une structure métallique à poutres latérales (RaPL, dit aussi « bac à fleurs ») – ont été construits par Berthold au prix de 8000 heures de montage et 15 000 h de soudage, un chantier inédit pour l’entreprise. Assemblés puis stockés de l’autre côté de l’avenue qui longe les voies, les ouvrages ont été posés sur des chariots automoteurs de grande puissance qui les ont amenés au plus près de la grue géante, située en contrebas des installations ferroviaires.
8 degrés par minute
Une fois les élingues fixées, chaque pont a été levé à une trentaine de mètres afin de les faire passer au-dessus du talus et des poteaux caténaires. La grue, d’une capacité de 1650 t, a ensuite lentement pivoté – sa vitesse maximale de rotation est de 8 degrés par minute – pour placer les structures métalliques au-dessus de leur emplacement. Les compagnons ont ensuite dirigé la descente via des câbles.
Le calage, un travail d’horlogerie
Les appareils d’appui intégrés aux ouvrages ont été guidés par des cales coniques en bois posés sur les culées jusqu’à des vérins hydrauliques permettant de les ajuster parfaitement. « Le réglage des appareils d’appui s’apparente à de l’horlogerie, explique Jean-Marie Brito, du département ouvrages d’art de SNCF Réseau, l’unité est le milliradian ! » Une fois les appareils d’appui correctement positionnés, l’espace a été rempli d’un mortier spécialement formulé.
Couper la ligne TGV
Réalisées avec une quinzaine d’heures d’avance par rapport au planning initial, les opérations ont nécessité de couper la circulation sur la ligne du TGV Atlantique qui passe sous les deux ponts pour 54 heures, après une première coupure pour la dépose des anciens ouvrages, réalisée les 18 et 19 juillet. « C’est un temps contraint dans lequel nous devons absolument nous inscrire », souligne
Gilles Gautrin.
Fondations profondes
Les nouveaux ponts reposent sur 22 pieux forés tubés plongeant à 47 m de profondeur tandis que les 4500 t de la grue géante et son anneau de rotation de 35 m de diamètre s’appuient sur une dalle de béton armé reposant sur 64 pieux de 25 à 30 m de profondeur. A la manœuvre, Demathieu Bard (mandataire du groupement) et Botte Fondations (Vinci), qui ont dû s’accommoder d’une emprise particulièrement réduite entre les voies et l’avenue.
Projet commun RATP-SNCF Réseau
Ce projet à 116 millions d'euros a été réalisé sous co-maîtrise d’ouvrage RATP Infrastructures-SNCF Réseau. « Il était impensable de faire les travaux séparément », explique David Courteille, maître d’ouvrage de l’opération de remplacement du pont de Chartres chez RATP Infrastructure, qui salue « un chantier patrimonial majeur ». Les Jeux olympiques empêchant les grands travaux en Ile-de-France à l’été 2024, les prochains chantiers d’ampleur attendront désormais 2025.