Le dialogue interdisciplinaire revient comme un refrain, dans l’épopée chantée le 6 avril par les auteurs et financeurs de l’étude « Végétal et espaces de nature dans la planification urbaine ».
Dès son origine en 2018, la commande est née d’un besoin de liens : « Plante & Cité s’était concentré jusqu’ici surtout sur la gestion du végétal. Nos adhérents ont exprimé le besoin de remonter vers les aménageurs et les acteurs de la planification », rappelle Sandrine Larramendy, chargée d’étude Paysage et urbanisme.
Besoins de liens
Durant ces trois ans-et-demi, le besoin de liens a trouvé une première réponse dans le groupe de 20 personnes fédérées par le centre de ressources sur le végétal en ville basé à Angers, pour conduire le projet : « Des professionnels de la filière horticulture et paysage, des chercheurs et des collectivités », énumère Sandrine Larramendy.
Deux consultations nationales menées auprès des professionnels et du bloc local ont orienté les travaux, souvent inspirés par le retour d’expériences des villes classées au palmarès du concours « capitale française de la biodiversité ».
L’identification des freins renforce le besoin de liens : le manque de connaissances et de dialogue interservices relègue les plantes au second plan, au moment des arbitrages. Parmi les élus qui prennent le taureau par les cornes, l’adjoint au maire de Lyon en charge de la biodiversité précise le défi : « Il s’agit non seulement d’organiser le dialogue à l’intérieur de la collectivité entre les services d’espaces verts et d’urbanisme, mais aussi entre la ville et la métropole, laquelle gère notamment les arbres de bord de route », rappelle Nicolas Husson.
Nantes relayera le message le 29 septembre, en accueillant la prochaine journée technique nationale de Plante & Cité sur la planification.
Mobiliser le privé
Au stade de la mise en œuvre, l’articulation entre l’art et la science ne coule pas de source : « Il ne suffit pas de planter. Une vision 100 % horticole ne répond ni aux attentes du public, ni aux exigences de durabilité, ni à celles de la biodiversité », tranche Philippe Clergeau, professeur émérite au muséum national d’histoire naturelle et président du conseil scientifique de Plante & Cité.
D’accord pour « réinventer l’horticulture à l’aune de l’écologie », l’interprofession du végétal et du paysage fédérée par Val’hor identifie deux autres exigences exprimées par son secrétaire général, le paysagiste Michel Audouy : « Mobiliser le foncier privé des entreprises et des particuliers, car les collectivités arrivent au bout de leur capacité à agir ; associer les professionnels en amont des projets, pour éviter les écueils d’une approche participative parfois naïve ».
Nouvel arsenal
Pour relever le défi, l’étude de Plante & Cité révèle la bonne nouvelle : les outils existent, à toutes les échelles, depuis les clôtures jusqu’aux orientations d’aménagement et de programmation en passant par les coefficients de biotope.
La loi Climat & Résilience ajoute sa panoplie détaillée par Jean-Baptiste Butlen, sous-directeur de l’aménagement durable aux ministères de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires : « Identification des secteurs de renaturation dans les schémas de cohérence territoriale, obligation de traçage de la trame verte et bleue dans les plans locaux d’urbanisme, bonus de constructibilité conditionnées par la création d’espaces verts... ».
Co-financeur de l’étude de plante & Cité, l’Etat promet l’émergence de nouvelles références, à l’issue de l’appel à manifestation d’intérêt sur les « démonstrateurs de la ville durable », lancé dans le cadre du quatrième programme d’investissements d’avenir.
Cherche plantes, cerveaux et bras
Tout en se réjouissant de ces belles perspectives, les professionnels alertent les collectivités sur les obstacles à court terme : « Faute d’anticipation sur la palette végétale, les appels d’offres risquent de se heurter à un manque de fournitures. Actuellement, les reports d’ouverture de chantier renforcent ce problème de disponibilité des ressources : le vivant n’attend pas, contrairement à l’inerte », rappelle Catherine Muller, présidente de Val’hor.
Le déficit de main d’œuvre aggrave la difficulté exprimée non sans inquiétude par Laurent Cuquel, directeur du centre de formation professionnelle et de promotion agricole d’Antibes spécialisé dans l’horticulture : « Avec quels cerveaux et avec quels bras allons-nous végétaliser la ville ? ».