Siège des grandes Maisons de Champagne (Moët & Chandon, Mercier, Pol Roger…), l’avenue de Champagne joue un rôle majeur dans l’activité économique et touristique de la ville d’Epernay, qui accueille chaque année quelque 450 000 visiteurs. Cela lui vaut d’ailleurs d’être surnommée « les Champs-Elysées » d’Epernay. Pour conforter son statut prestigieux, mettre en valeur l’architecture de ses hôtels particuliers, mais aussi en faire un lieu de promenade agréable, la Ville a donc décidé d’engager la rénovation de cette voie vieillissante et très passante. Celle-ci a été confiée aux architectes Bernard Althabégoïty et Annick Bayle, qui se sont fait connaître pour le traitement sobre et efficace de leurs espaces publics et leurs détails de calepinage particulièrement soignés.
La première étape de ce grand chantier a consisté à dévier une partie du transit sur une nouvelle voie, la rue de Verdun, et à diminuer la largeur de l’avenue, ramenée de 10,2 m à 5,60 m, au profit de trottoirs élargis (à 5,4 m dans la section type) et généreusement plantés avec plus de 300 arbres. Ces derniers ont été disposés en bouquets irréguliers, sur deux rangs - sauf dans la partie résidentielle de l’avenue, pour maintenir le stationnement -, mariant des espèces variées, des érables champêtres, tulipiers, frênes, mélèze, ginkgo biloba, ifs…, qui renvoient davantage à l’image d’un parc. Ces plantations irrégulières, inhabituelles pour une avenue, permettent ainsi de préserver les perspectives sur les cours intérieures des hôtels particuliers.
Règles de calepinage
Autre principe, celui de maintenir une fluidité maximale sur les trottoirs pour le confort des piétons, en misant sur une continuité parfaite du revêtement. C’est un parquet, assemblant quatre types de pierre calcaire - finition flammée - oscillant du beige clair au beige plus soutenu (voir détail), et traitées avec un oléo-hydrofuge. Le motif, créé sur 24 rangs pour paraître aléatoire, introduit un rythme sur la longueur de cette avenue de plus de 900 mètres. Les architectes ont retenu le calcaire, « moins plébiscité dans l’espace public que le granit, mais pour de mauvaises raisons, car le calcaire ne s’encrasse pas comme le granit, il se patine ». Les règles imposées à l’entreprise étaient peu nombreuses, mais strictes sur cette avenue qui accuse un dénivelé de 12 mètres entre le point haut et le point bas : joints décalés de 10 cm minimum d’un rang à l’autre, et à une distance de 30 cm minimum de la bordure de rive. Pas de grille d’arbres également, pour garder la continuité du sol, avec un détail précis pour le scellement des pierres sur la dalle amovible. Les pierres elles-mêmes n’ont pas de longueur fixe, ce qui engendre trop de perte et donc coûte cher, mais oscillent entre 45 et 60 cm de longueur.
Quant à la chaussée, elle est constituée de pavés mosaïques de grès d’Inde (comme les seuils d’entrée des Maisons de Champagne) posés en arceaux, qui assurent une bonne stabilité. Ils reposent sur des fondations peu épaisses, de la grave bitume pour éviter les phénomènes de vibration : plus de 200 millions de bouteilles sont en effet juste en dessous, dans les caves privées des Maisons de Champagne !
