« Un projet comme celui-ci n’a lieu que tous les vingt ans », Sébastien Bliaut (Vinci Construction Grands projets)

La construction du plus long tunnel immergé routier et ferroviaire du monde a débuté au mois de janvier 2021. Situé entre l’Allemagne et le Danemark, l’ouvrage de 18 km de long passera sous la mer Baltique, à 40 m de profondeur. Sébastien Bliaut, directeur du secteur Europe du Nord chez Vinci Construction Grands Projets, fait le point avec le Moniteur.fr sur les enjeux de ce méga-chantier.

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Femern
Vue du chantier du tunnel du Femern, entre le Danemark et l'Allemagne

En quoi consiste ce projet de liaison entre le Danemark et l’Allemagne ?

Le tunnel du Femern sera un passage routier et ferroviaire. Avec 18 km d’infrastructure immergée, il sera quatre fois plus long que le tunnel de l’Øresund que nous avions construit dans la même région il y a vingt ans. Toutefois, ce nouvel ouvrage étant plus imposant, nous avons dû multiplier les chaînes de production. Nous en mobilisons ainsi cinq, contre deux à l’époque pour l’Øresund.

Pour le construire, nous prévoyons d’acheminer quatre-vingt-neuf caissons préfabriqués de plusieurs dizaines de milliers de tonnes en mer, et de les installer à 40 m de profondeur. Le projet, en comptant les parties maritimes et terrestres, est estimé à 3,8 milliards d’euros hors taxes. Il doit durer neuf ans puisque la livraison du tunnel est espérée pour 2029.

Des premières campagnes géotechniques ont été menées l’année dernière. Toutefois, le génie civil n’a débuté qu’au mois de janvier 2021. Au pic de l’activité, nous attendons 1500 compagnons sur place.

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Vue d'artiste du futur tunnel du Femern

Vous utilisez la même technique de réalisation que pour le tunnel de l’Øresund il y a vingt ans. En quoi ce chantier reste-t-il un défi sur le plan constructif ?

La technique de base, à savoir l’immersion de caissons, reste en effet la même que sur le projet de l’Øresund. Depuis, cette technique constructive est rentrée dans le domaine public et plusieurs tunnels du même type ont été entre temps construits de cette manière en Chine ou en Corée, mais nous voulions conserver une longueur d’avance pour nous démarquer de nos concurrents.

Deux innovations seront donc déployées sur ce chantier, et c’est d’ailleurs grâce à elles que nous avons remporté les trois lots. La première concerne la pose du lit de graviers, qui servira de fondation aux caissons. Elle sera assurée à l’aide d’un chariot autoporteur robotisé piloté à distance.

La seconde innovation concerne la réalisation des caissons eux-mêmes, qui n’ont plus besoin d’être ballastés. Cette opération utilisée lors des précédentes campagnes nécessitait de recourir à des pompes pour remplir l’élément et le faire couler. Elles pouvaient tomber en panne, ce qui exigeait de faire intervenir des plongeurs, une opération risquée.

Pour y remédier, les caissons seront acheminés par un catamaran qui pourra supporter leur charge pleine, à savoir près de 73 000 t. Concevoir ce bateau a été un véritable défi sur le plan mécanique, car il faut qu’il puisse supporter des charges lourdes et variables, les caissons n’étant pas tous aux mêmes dimensions. 

Ce marché représente donc un « chantier vitrine » pour Vinci ?

Oui, en quelque sorte. Le projet du Femern est un chantier phare pour notre entreprise. Il peut non seulement nous permettre de recruter des jeunes, mais aussi de progresser techniquement et nous amener à sortir de notre zone de confort. Il faut comprendre qu’un projet comme celui-ci n’a lieu que tous les vingt ans.

Une initiative de ce type peut donc clairement avoir un « effet locomotive ». Par ailleurs, malgré les apparences, ces travaux ne sont pas si éloignés de ceux que nous menons sur d’autres projets d’infrastructures comme des ponts.

Cela nécessite aussi de recourir à des caissons pour les voussoirs par exemple. Le projet du Femern peut nous permettre de progresser non seulement dans le domaine de la réalisation de tunnels immergés, mais aussi sur d’autres types de constructions.

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