Depuis douze ans qu’il construit en Chine, Marc Mimram a acquis les rudiments de la langue, mais il a surtout su prendre la mesure des usages. Dans ce pays où les « guanxi » - à savoir, les relations et l’art de les entretenir - sont primordiales, l’architecte français a installé une agence à Tianjin et a créé « du relationnel. Ce qui ne veut pas dire qu’on en comprend toujours bien les règles », reconnaît-il. Dans ce contexte, il a trouvé la voie pour établir le contact avec ses clients potentiels. Plutôt que de prendre part à des concours à l’issue incertaine, comme il l’a fait pendant dix ans, Marc Mimram agit, dit-il, « en parallèle des compétitions. Je vais voir les maîtres d’ouvrage pour comprendre leur méthode et je propose une esquisse, juste un dessin au stylo vert ». Si l’exercice est téméraire, il peut être payant. Il lui a notamment permis de décrocher le projet de construction du pont Zhong Sheng Da Dao qui, dans la zone urbaine de Tianjin, au nord-est du pays, permet aujourd’hui de desservir la « ville écologique de Sino-Singapour », un projet urbain dont le développement en cours est porté par les deux pays.
Question d’ambition
« Construit en trois ans » et livré en 2012, l’ouvrage, nominé dans la sélection du Grand Prix Afex 2014, apparaît comme un long nuage laiteux flottant au-dessus d’un lac artificiel. Ce pont double est constitué de grandes coupoles inversées en voile de béton mince, coulé en place. « Pour obtenir cette géométrie complexe de coques à double courbure, nous avons utilisé un coffrage d’acier très sophistiqué, fait de milliers de petites pièces », explique Marc Mimram. Selon lui, de tels chantiers ne sont possibles quasiment qu’en Chine, où existe une convergence rare entre main-d’œuvre bon marché et haut savoir-faire technologique. Pour l’architecte, c’est aussi une question d’ambition : « Les ouvrages qui se construisent affirment la volonté des Chinois de marquer l’époque à travers des projets innovants. C’est aussi pour cela que j’aime travailler là-bas. »



