Avec la menace qui pèse sur le lycée agricole intégré à l’ensemble scolaire Fénelon de Vaujours (Seine-Saint-Denis), la filière francilienne du paysage craint la perte d’un de ses fleurons pédagogiques.
Bataille de chiffres
Aux 400 000 euros de déficit annoncés par la direction pour justifier la décision, le comité social et économique oppose les 700 000 euros de capacité d’autofinancement démontrés par une contre-expertise. D’une moyenne proche de 240, le nombre d’élèves a fléchi au début des années 2010 pour se stabiliser autour de 160. A partir de la quatrième technologique, l’offre pédagogique se déploie jusqu’à la licence professionnelle en développement de projets de territoire.
Toile de fonds de la bataille de chiffres, le site de 6 hectares intéresse la ville pour l’implantation d’équipements, à proximité de la gare RER du Vert Galant. L’attractivité foncière a entraîné en 2017 la constructibilité de l’ancienne zone naturelle, actuellement ponctuée de ruchers, serres, vergers et parcelles dédiées à la permaculture. Le projet de création d’un BTS spécialisé dans le tourisme permettrait à l’établissement diocésain de valoriser ce terrain sans se séparer du château du XVIIIe siècle qui constitue son joyau patrimonial.
Equipe de passionnés
« Ce serait une catastrophe », n’hésite pas à prévenir Laurent Chatelain, P-DG des pépinières éponymes au Thillay (Val-d’Oise), mais aussi président du Groupement d’intérêt économique Pépinières franciliennes. Ancien élève de Vaujours, ce chef d’entreprise emploie une dizaine de salariés issus du même lycée, soit le quart de ses troupes. Composée d’entreprises et de collectivités, sa clientèle comprend également nombre de diplômés de l’école.
« L’équipe pédagogique de passionnés a sauvé un grand nombre de gamins, en réussissant à leur transmettre l’amour du végétal. Sans l’école, beaucoup d’entre eux n’auraient pas réussi leur insertion professionnelle », ajoute Laurent Chatelain.
Mobilisation locale
« Il s’agit d’une perte énorme pour la Seine-Saint-Denis puisque la formation accueille des élèves venant de tout le département, profitant ainsi au développement futur de celui-ci », analyse de son côté Philippe Jorgji, porte-parole du collectif d’enseignants qui tente de résister à la décision de fermeture.
Le président du conseil départemental et deux sénateurs de Seine-Saint-Denis ont apporté leur soutien aux défenseurs du lycée, tout comme le collectif Carma, qui réunit les associations porteuses du projet de territoire développé en opposition à celui d’Europa-City, désormais abandonné, sous le cône d’envol de l’aéroport de Roissy.
Pour poursuivre leur chemin vers le bac en sciences et technologie de l’aménagement et du vivant, les élèves devraient se résigner à choisir les internats de Saint-Germain-en-Laye (Hauts-de-Seine) ou Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne). Des options moins éloignées se présenteraient aux élèves en BTS d’aménagement paysager, en cas de confirmation de la fermeture du lycée.
Après l’ordonnance de référé qui a suspendu la résiliation du contrat entre le lycée et le ministère de l’Agriculture, le tribunal judiciaire de Bobigny se prononcera sur le fond le vendredi 19 juin. En attendant, le site internet de l’établissement catholique continue à vanter « un lycée qui forme à des métiers d’avenir », « situé sur un parc paysager ouvert sur la plaine de Roissy-en-France"…