Ce 29 février 2024, une foreuse de 60t sortait d’une fouille de 15m de profondeur, levée par une grue de 350t. Une opération très technique, qui marque la fin d’un chantier de fondations tout aussi impressionnant. Sur le site historique des usines Renault, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), c’est un trou béant de 1 ha qui a été creusé pour réaliser les fondations de quatre bâtiments de logements et bureaux dont le futur siège du groupe Renault. S’épannelant du R+8 à R+14 avec trois à quatre niveaux de parkings en infrastructure, ils seront livrés fin 2025.
Purges
Après un an sur place, les équipes de Spie batignolles Fondations en groupement avec Eiffage Fondations achèvent leur mission. « Et elle a été aussi lourde qu’extraordinaire », confie Jolly Fèvre, directrice de travaux pour Spie batignolles Fondations. Le site industriel a d’abord dû être purgé de tout élément pyrotechnique, mais aussi des réseaux et des fondations existantes. Les terres ont ensuite été dépolluées, puis la réalisation d’une plateforme de 9000m² en béton fibré a ensuite permis de sécuriser le chantier et d’organiser les différents ateliers de travail.
Parois moulées
Une fois ces travaux préparatoires exécutés, 25 compagnons ont réalisé les parois moulées. De 62 à 82cm d’épaisseur pour 38m de profondeur, elles ceinturent les fouilles et soutiennent les terres attenantes sur 450m linéaires. « 12 000m3 de béton ont été employés pour les mettre en œuvre entre février et aout 2023, à raison d’un panneau par jour », indique Jolly Fèvre.
Les parois moulées terminées, six puits de pompage disposés le mois suivant rabattaient la nappe phréatique jusqu’en fond de fouille. « Ils évacuent un débit résiduel de 50 m3/h, alors qu’ils sont dimensionnés pour un débit maximal de 180 m3/h », poursuit la directrice. Pour les vidanger, une station de traitement des eaux spécifiques a été installée. Quatre filtres à sables et deux filtres à charbon les dépolluaient à une vitesse de 200m3/h, avant leur rejet en Seine, acté dès le mois d’octobre.
Tirants d’ancrage
La « boite » rendue étanche, les travaux se sont poursuivis par le terrassement des anciennes alluvions. Pour limiter la déformation des écrans de soutènement lors de l’excavation, des tirants d’ancrage ont été réalisés sur tout le pourtour de la fouille. « Le premier lit de près de 70 tirants a pu être ancré hors nappe, foré classiquement à la bentonite. Mais le second et le troisième lit, respectivement à 8,5m et 12m de profondeur, devaient composer avec la pression de l’eau », développe Jolly Fèvre.
Ils ont donc été mis en œuvre avec des sas de forage. « La technique consiste à réaliser un forage à l’eau sous tubage. Lorsque le tube à manchette est passé au travers du sas jusqu’à l’intérieur des terres, il est équipé des faisceaux de câbles en acier sur 20 à 25m de profondeur. L’ensemble est in fine bloqué avec un bouchon en bois, tout simplement », s’amuse la technicienne, qui rappelle que Spie batignolles Fondations a été la première entreprise à développer cette méthodologie.
En partie ouest, le terrain étant adjacent à un local technique du Grand Paris Express, les parois ont dû être butonnées à l’avancement au moyen de trois lits de butons métalliques provisoires de 38 m de long pour les plus grands. Dessous, 24 barrettes ont été fondées à 41 m de profondeur, depuis la plateforme haute. Une gageure, là encore. Le terrassement et le soutènement se sont achevés en janvier 2024.

Le deuxième lit de tirants qui permettra de soutenir la paroi moulée est en train d'être ancré. © Spie batignolles Fondations
Fondations des grues
Spie batignolles Fondations a aussi travaillé en tant que sous-traitant pour l’entreprise de gros œuvre Legendre à la réalisation des pieux à l’intérieur et à l’extérieur de la fouille, sous les futurs bâtiments. « L’entreprise est arrivée sur le chantier mi-octobre, en avance, ce qui a obligé à positionner leurs quatre grues à l’extérieur, pour nous laisser le temps d'achever le terrassement », raconte Jolly Fèvre.
Pour l'une des quatre grues, les fondations ont été construites sur un terrain aussi étroit qu’un couloir. « La foreuse pour réaliser quatre pieux à 22m de profondeur étant trop imposante, nous avons préféré fonder 16 micro-pieux à 25m de profondeur », explique-t-elle. Faute de place, le montage de la grue s’est ensuite déroulé depuis l’intérieur de la fouille. « Nous avons remblayé le terrain afin de créer une plateforme à 5 m de profondeur, ainsi qu’une rampe d’accès depuis le haut du site, de façon à amener les éléments ainsi que la grue de montage. Un phasage incroyable alors que nous étions en plein terrassement et réalisation des ancrages », s’exclame la directrice travaux.

Alors que les étapes de terrassement se poursuivent, une rampe et une plateforme ont été crées dans la fouille pour amener la grue mobile servant au montage de la grue située au nord de la parcelle. © Spie batignolles Fondations
Pieux
En décembre, les équipes se sont ensuite attelées à la réalisation des 285 pieux de fondations des futurs bâtiments à l’intérieur de la fouille. La rampe réalisée précédemment a été mise à profit pour descendre les foreuses. Les pieux pouvaient alors être forés à la tarière continue, qui permet d’excaver jusqu’au fond avant de relever la tarière, de bétonner sous faible pression depuis le bas du forage afin de remplacer la terre du site, avant de glisser la cage d’armature métallique. « Cette technique nous a permis de tenir le terrain lors de l’excavation tout en optimisant la cadence », soutient Jolly Fèvre. En pointe, 10 pieux de 620 à 1020 mm de diamètre pour 25 m de profondeur ont pu être réalisés chaque jour.
Ce 27 février, tous les pieux étaient fondés. « Un soulagement, car Legendre monte une cinquième grue à l’intérieur de la fouille les 7 et 8 mars. Nous évitons ainsi les problématiques de co-activité », avoue la directrice travaux.

Les foreuses fondent les 285 pieux qui ancreront dans le sol les futurs bâtiments © Spie batignolles Fondations
Pieux d’essai
À la fin du mois, l’heure était donc à la sortie des engins de la fouille. Ces étapes ne signent pourtant pas la fin des fondations. 30 pieux doivent encore être fondés à l’extérieur, à la pointe est de la parcelle, jusqu’à la mi-mars, afin d’ancrer le quatrième bâtiment. « Nous allons profiter de ce chantier pour réaliser deux pieux d’essai. Les retours d’expérience que nous en tirerons nous serviront à renouveler notre cahier des charges pour la réalisation de pieux à la tarière continue de type 3. Nous allons en effet vérifier la cohérence avec nos calculs, analyser leur aspect sur toute la hauteur de terrassement, contrôler les paramètres de frottement avec le sol, etc. », indique Jolly Fèvre. Autant de vérifications qui devront permettre d’optimiser la dimension des pieux et leur portance pour d’autres chantiers. La construction de la superstructure peut désormais démarrer…
Maîtrise d’ouvrage : Bnp Paribas Real Estate / Eiffage Immobilier
Aménageur : SPL Val de Seine
Architectes : Chartier Dalix (coordinateur), BIG, AAVP et ECDM
Maîtrise d’œuvre d’exécution?: Artelia
Bureaux d’étude : Kephren ingénierie (Structure), Géotechnique Appliquée IDF (Géotechnique), Systra (Environnement)
Entreprises principales : Brezillon (terrassement), SEP Spie batignolles Fondations (mandataire) et Eiffage Fondations (soutènement), Legendre (gros œuvre) avec Spie batignolles Fondations en sous-traitance pour les pieux
Surface : 12 800 m² de logements et 40 000 m² de bureaux
Montant des travaux de soutènement et de fondations : 13 M€