Dernière ligne droite avant son ouverture prochaine, le musée du quai Branly dévoile aujourd’hui un chantier riche d’expérimentations, arrivant à terme pour prendre la forme, ou plutôt les formes finales imaginées par Jean Nouvel. Structure métallique s’accommodant de poteaux aléatoires, façade vrillée s’ouvrant et se fermant à la lumière comme le rabattement progressif d’une paupière, rampe de circulation sinueuse pour une ascension la plus naturelle possible vers la grotte du plateau des collections de référence, émergence verticale d’une tour de Babel en verre pour la réserve des 9000 instruments de musique, serpent muséographique de déambulation à travers les collections, cabanes scénographiques en suspension dans le vide, brise-soleil coulissants sur sabres japonisants, bâtiment administratif recouvert d’un jardin vertical aux 150 espèces végétales, ambiance Art nouveau pour restaurant panoramique en aile de libellule, théâtre de verdure à ciel ouvert comme un vestige romain retrouvé dans le jardin…
Chaque partie, on le voit, est un ouvrage d’art en soi, conçu indépendamment des autres, mais en même temps que les autres. Ce qui donnera à l’arrivée cet édifice à quatre corps de bâtiments, eux-mêmes constitués de multiples ouvrages qui s’offrent au regard comme autant d’espèces d’architectures, dont aucune ne ressemble à l’autre. Un refus de la répétition que méritait bien l’insondable richesse des œuvres d’art ici contenues.
C’est pourquoi le chantier du musée du quai Branly fait irrésistiblement penser à ce que fut sans doute l’atmosphère des grands chantiers de cathédrale, condensant en une unité de lieu, de temps et d’action, des corps de métiers bien spécialisés, qui se découvrent parfois pour la première fois, œuvrant à cette sorte de symphonie architecturale que représente la construction d’un tel édifice. Et c’est aussi la raison pour laquelle ce «musée bâti autour d’une collection», selon la formule même de Jean Nouvel, naît-il lui-même d’un «chantier de collection», où l’inédit, l’unique et la sensation d’irrationnel dominent. Un résultat qui aura exigé de la part de tous les acteurs du projet, maîtrise d’œuvre, maîtrise d’ouvrage, conservateurs, scientifiques, entrepreneurs de tous secteurs, depuis les fondations jusqu’au multimédia, une inventivité de solutions et une souplesse d’adaptation exceptionnelles. Inventivité et diversité qui en font un vrai chantier de collection.






