Un budget de planification écologique

Alors que le gouvernement doit résoudre la difficile équation « lutte contre l’inflation + baisse du déficit + investissements », le projet de loi de Finances pour 2024 consacre 7 Mds € de crédits aux dépenses favorables à l’environnement.

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Bruno Le Maire, ministre de l'Economie et Thomas Cazenave, ministre des Comptes publics le 27 septembre 2023 à Bercy
Thomas Cazenave, ministre des Comptes publics, et Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, ont présenté les orientations du projet de loi de Finances pour 2024, le 27 septembre 2023 à Bercy.

Bruno Le Maire l’a assuré en ouverture de la présentation du projet de loi de Finances pour 2024 ce mercredi 27 septembre : « Notre croissance – estimée à 1% en 2023, 1,4% en 2024 - dépend de l’investissement. Nous faisons le choix de la prospérité par l’investissement contre toute politique de décroissance ». Des investissements que l’Etat a décidé de « verdir » au maximum.

Ainsi,  les crédits alloués à la décarbonation et à la planification écologique sont-ils conséquents : 7Mds € en crédits et 10 Mds€ en autorisations d’engagement.

Logement

Pour la rénovation des logements, le budget de MaPrimeRénov' sera porté à 5 Mds € par an (+1,6 Md€). Et l’éco-PTZ sera prolongé jusqu’en 2027. Une procédure simplifiée est prévue pour financer le reste à charge des travaux de rénovation énergétique éligibles à MaPrimeRénov’.

Mais c’est sur le soutien à la construction de logements qu’était attendu le gouvernement après un CNR dont les orientations n’avaient pas été suivies. « Le logement est une priorité absolue vers les 5% du taux de chômage en 2027 », a lancé Bruno Le Maire.

Traduction dans les textes : le PTZ sera prolongé jusqu’en 2027, mais recentré sur le neuf en zone tendue et conditionné à des travaux de rénovation dans l’ancien en zone détendue.

La FPI craint l'arrêt de la production de logements neufs

"Le PLF 2024 est très en-deçà du minimum vital pour sortir le secteur du logement de la paralysie", a réagi la Fédération des promoteurs immobiliers dans un communiqué. La FPI dénonce "l’absence de mesure d’urgence pour resolvabiliser les ménages et leur permettre d’acquérir un logement" et alerte : "sans dispositions concrètes et robustes à effet immédiat, la production de logements neufs va totalement s’arrêter et par effet dominos, achever de bloquer tout le parcours résidentiel des ménages, toutes générations confondues."

Le régime fiscal du logement intermédiaire est élargi afin d’accroitre l’offre de logements abordables. Et une « révision flash » du zonage ABC est en cours pour étendre le nombre de communes dans lesquelles les dispositifs associés sont accessibles.

La valse des étiquettes

Interrogé sur l’évolution du calendrier d’interdiction de la mise en location des passoires thermiques, Bruno Le Maire s’est montré en même temps clair et évasif : « Pas question de modifier le calendrier. Mais il faut réfléchir à comment être plus simple et plus clair. L’interdiction  à la location pose des problèmes dans les copropriétés et le ministère de la Transition fait un travail remarquable sur le sujet. Mais ne faut-il pas revoir les DPE ? Je veux une transition écologique simple, claire et accompagnée », a conclu Bruno Le Maire.

Collectivités

Pour les collectivités, si l’on savait déjà que le Fonds vert serait porté à 2,5 Mds € pour accélérer notamment la rénovation des écoles, on connait désormais les crédits alloués au plan eau (455 M€ dès 2024) et à la biodiversité (264 M€).

Le Fonds chaleur est porté à 300 M€. Le financement de 700 M€ pour les projets de RER métropolitains est confirmé et 550 M€ seront dévolus à la rénovation énergétique des bâtiments publics.

Bercy a d’autre part promis le lancement de MaPrimeAdapt’ : 68 M€ pour l’adaptation des logements au handicap et au vieillissement, la mise en place du dispositif « seconde vie » pour le logement social, soit une exonération de taxe foncière de 25 ans pour permettre la rénovation des passoires thermiques (1 million) atteignant au moins la classe B du DPE et une rallonge de 50 M€ au budget de l’Anru.

Infrastructures

Concernant les infrastructures, le choix du ferroviaire contre le "tout routier" est confirmé : une forte hausse des investissements en faveur des transports collectifs et ferroviaires est prévue. Les ressources affectées à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) atteindront ainsi 4,6 Md€, en hausse de +0,8 Md€ par rapport à 2023.

Et Bruno Le Maire a annoncé l’instauration en 2024 d’une nouvelle taxe sur les concessions autoroutières et les grands aéroports - selon leur chiffre d'affaires et leur rentabilité - qui doit rapporter 600 millions d'euros annuels. Somme qui sera fléchée vers le ferroviaire. « Ce sont des infrastructures de transport polluantes, que ce soit la route ou l'aérien », a justifié le ministre de l’Economie, assurant que cette augmentation de la fiscalité ne se répercuterait « pas sur l'usager » grâce au maintien de « la définition des tarifs de péage ».

Vinci, par la voix du président de Vinci Autoroutes Pierre Coppey, a prévenu qu'une hausse des taxes signifiait "inévitablement une hausse des tarifs des péages", s'appuyant sur les contrats avec l'Etat. Les concessions stipulent en effet "qu'en cas de modification, de création ou de suppression (…) d'impôt, de taxe ou de redevance spécifique aux sociétés concessionnaires d'autoroutes", ces dernières ont droit à "des mesures de compensation, notamment tarifaires", a relevé récemment le Conseil d'Etat. Augmenter la fiscalité "serait non seulement une violation de la parole de l'Etat", mais aussi "un contre-sens à un moment où il est urgent d’investir pour décarboner la route", a-t-il défendu dans un message transmis à l'AFP.

Enfin, toujours au niveau des taxes, la bascule vers une fiscalité verte est enclenchée. « Après une concertation et un dialogue de six mois avec le secteur des Travaux publics pour regarder comment faire évoluer la fiscalité favorable au gazole vers une fiscalité favorable aux biocarburants, nous avons acté la fin progressive de la niche fiscale sur le gazole non routier », a rappelé Bruno Le Maire.

Ainsi, le prix du litre de GNR augmentera de 5,99 centimes d’euros chaque année. Première étape : un passage de 18,82 c€/l à 24,81 en 2024. Le rendement attendu de cette hausse de la fiscalité pour les TP est estimé à 110 M€, une somme que Bercy entend réaffecter au développement d’une filière biocarburants.

Au global, L’Etat, dont l’objectif est de revenir en 2027 sous les 3% du PIB de déficit dépensera, en 2024, 5 Mds € de moins qu’en 2023 (491 v 496).

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