Enquête

Travaux publics : pour NGE, la transition passe par l'entreprise à mission

La nouvelle filiale du groupe a comme raison d'être d'améliorer l'empreinte carbone des chantiers qu'elle sélectionne.

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Sur le chantier d'aménagement des abords de la Halle du réemploi à Rillieux-la-Pape, NGE Transitions a réussi à diviser par trois les émissions de CO2 par rapport au projet initial.

Une entreprise de BTP peut-elle refuser des chantiers qui manquent d'ambition environnementale ? NGE Transitions répond clairement oui. La dernière-née du groupe NGE est une entreprise à mission dont la raison d'être, « construire des aménagements cohérents avec la transition écologique en accélérant la décarbonation des pratiques des travaux publics », lui impose de « sélectionner et réaliser des chantiers qui contribuent aux transitions environnementales et sociétales ». « Nous avons élaboré une grille de décision sélective qui donne le “go” ou le “no go” sur les chantiers auxquels nous répondons », confirme Laurence Lavit, directrice de la RSE de NGE et présidente du comité de mission de NGE Transitions. Ainsi, l'entreprise peut s'interdire de postuler à certains appels d'offres auxquels, par ailleurs, le groupe NGE pourrait, lui, répondre.

A la naissance de la filiale, en mars 2024, il a donc fallu créer un « arbre de décision » qui permette d'analyser, sur un certain nombre de critères, les appels d'offres et les clients : qui sont-ils, à quoi sert le projet, NGE Transitions possède-t-elle vraiment les cartes pour aider à décarboner le chantier ? « Imaginons un client qui lance un appel d'offres et qui ne veut rien changer dans son programme. Nous n'avons pas d'intérêt à postuler parce que l'ouverture à la discussion, nécessaire pour interroger un certain nombre d'éléments de l'aménagement afin d'y inclure de la sobriété carbone, est peu probable », illustre Bruno Marion, directeur général délégué de NGE Transitions. « Idéalement, nous travaillons en amont, dès la conception, pour suggérer des variantes qui permettent d'aborder différemment le sujet de l'empreinte carbone et proposer des solutions de décarbonation », ajoute-t-il.

« Contribuer sans nuire »

L'approche de l'entreprise se veut holistique. « La philosophie, c'est vraiment de contribuer sans nuire, explique Bruno Marion. Le but n'est pas de faire du bas carbone à tout prix, en ne regardant que ce critère-là. Il faut envisager également les impacts sur d'autres sujets environnementaux : la biodiversité, l'empreinte de l'eau, etc. Une solution très bas carbone, qui consomme trop d'eau ou de ressources naturelles ou qui relève de la chimie très polluante n'est pas pertinente. » Exemple sur le récent chantier d'aménagement des abords de la Halle du réemploi à Rillieux-la-Pape (Rhône) pour le compte du groupe Geim : NGE Transitions a favorisé l'utilisation de matériel électrique (35 %) ou de biocarburants (65 %) en remplacement total des énergies fossiles, travaillé avec des matériaux bas carbone (béton bas carbone avec une formule 50 % moins émissive, enrobés basse température) et recouru un maximum au réemploi (72 % des matériaux avec l'utilisation de ballast, bordures, dalles, pavés et autres matériaux déjà existants) et aux matériaux recyclés (15 %), comme le PVC, des agrégats d'enrobés ou des granulats. Résultat : les émissions de CO2 du chantier ont été divisées par trois par rapport au projet initial, et l'intensité carbone par deux et demi, ramenée à 271 kg éq. CO2 /k€ de chiffre d'affaires (CA).

Assurer des chantiers net-zéro

Au regard des résultats obtenus, la sélectivité ne devrait donc pas peser sur le volume d'affaires. « C'est ce que NGE veut tester. Aujourd'hui, on ressent une préoccupation environnementale chez de plus en plus de donneurs d'ordres. Et tout le monde est de toute façon contraint par la réglementation », rappelle Bruno Marion. A NGE Transitions d'assumer ensuite le respect de son engagement phare : réduire de 50 % ses émissions par rapport à un chantier équivalent pour atteindre une intensité carbone maximum de 275 kg éq. CO2/k€ de CA et, grâce à une compensation des émissions résiduelles, assurer des chantiers net-zéro in fine pour le client. C'est ce mécanisme qui fait office de « bâton ». « Nous établissons un budget de compensation environnementale en fonction des émissions estimées en amont. Si nous les dépassons, nous devons compenser davantage et dont payer plus », confirme Laurence Lavit.

Le respect de ses engagements, mesuré par un comité de mission qui se réunit trois à quatre fois par an et suit les indicateurs de performance de ses objectifs et sous-objectifs, est donc primordial pour NGE Transitions : « Il en va de notre crédibilité, à la fois auprès de nos clients, mais aussi de nos collaborateurs et de la société au sens large. Il y a une attente sociétale qui est forte », estime-t-elle. Et vraisemblablement aussi une attente du secteur : « Notre initiative a été très bien reçue, assure Bruno Marion. Dans l'univers des travaux publics, elle est plutôt innovante et suscite l'intérêt. Cette démarche demande du temps, mais les maîtres d'ouvrage y sont plutôt favorables », conclut-il.

Entreprise à mission, mode d'emploi

  • Créée par la loi Pacte en 2019, la société à mission va au-delà de son but lucratif et se fixe, dans ses statuts, une « raison d'être » et des objectifs sociaux et environnementaux qui y sont liés.
  • L'obtention de ce statut suppose aussi de définir comment l'entreprise va assurer le suivi de l'exécution de sa mission, via des indicateurs et la désignation d'un chargé de mission ou d'un comité de mission (suivant la taille de la structure) qui devra établir un rapport annuel.
  • La qualité de société à mission doit être déclarée au tribunal de commerce et inscrite au Registre du commerce et des sociétés.
  • L'entreprise doit se soumettre à l'audit d'un organisme tiers indépendant au moins tous les deux ans. S'il s'avère qu'elle n'a pas respecté ses objectifs sociaux et/ou environnementaux, elle pourra se voir retirer son statut.
  • En cas de manquement flagrant causant un préjudice, par exemple d'image, à l'entreprise, la responsabilité civile des dirigeants pourra même être engagée.
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