Les incendies spectaculaires restent dans les mémoires. C’est le cas pour celui de la Maison de la Radio en octobre 2014 et, plus récemment, pour celui du futur centre commercial Vill’Up accolé à la Cité des sciences et de l’industrie, à Paris. A chaque fois, le feu s’est déclaré dans une zone en chantier, peu de temps avant la fin des travaux. Une période à hauts risques donc, qui ne fait l’objet d’aucune obligation technique particulière. « D'abord, toutes les opérations nécessitent de protéger les travailleurs, c’est donc le Code du travail qui prime, indique Alex Maire, directeur des opérations chez Casso et Associés. Ensuite, dans le cas d'un établissement recevant du public (ERP), l’arrêté du 25 juin 1980 s’applique, en particulier l’article GN 13 ».
A chacun de faire appel au bon sens, donc ? Ce n’est pas si évident pour Florian Gayraud, chargé d’affaires chez Delta Partners, société spécialisée dans les missions d’ordonnancement, coordination et pilotage du chantier (OPC) : « Quand plusieurs entreprises interviennent au même moment sur un chantier, avec des objectifs de délais et de budget serrés, les précautions de sécurité risquent de passer au second plan ». Plusieurs solutions, relativement simples à mettre en œuvre, réduisent les risques de départ de feu et limitent sa propagation.
Protection active
La protection active concerne les réseaux électriques provisoires. Ces installations possèdent des caractéristiques techniques particulières et à ce titre doivent respecter des règles spécifiques. Ce qui est d’autant plus important qu’elles doivent fournir des puissances électriques importantes. « Or, malgré les normes en vigueur, il arrive que la sécurité ne soit pas optimale avec ces systèmes », note Florian Gayraud.
Une autre solution, souvent mise en œuvre en immeuble de grande hauteur (IGH), consiste à mettre en place le plus tôt possible le réseau d’adduction d’eau pour la sécurité incendie. « Ce système sera mis en place sur le chantier du nouveau Palais de justice de Paris, dans le quartier des Batignolles, car les pompiers n’auront tout simplement pas accès aux étages les plus hauts du bâtiment qui culminera à 160 m », explique le chargé d’affaires.
Protection passive
La protection passive fait davantage appel au bon sens. Il s’agit d’éviter de stocker ensemble des produits dont la combinaison est susceptible de provoquer une réaction chimique, et d’éviter de sur-stocker dans un seul et même espace. « Nous préconisons de répartir les matériaux dans différentes zones et de veiller à la propreté du site, afin d’éviter la propagation des flammes en cas de départ de feu », indique Florian Gayraud. Delta Partners va même plus loin et vise, en appliquant la technique industrielle du Lean (1) à la construction, à optimiser les livraisons et les approvisionnements, pour éviter les stocks. Une livraison « en juste à temps » permet d’optimiser l’espace disponible et de savoir précisément où sont les matériaux dont on a besoin. C’est aussi un gage de rapidité et d’efficacité sur le chantier.
Le Lean sert aussi à gérer la co-activité sur les chantiers. « Outre le fait que différents corps de métier interviennent au même moment, il est important de sensibiliser les compagnons aux risques », souligne Alex Maire, avant d’énumérer : une cigarette encore allumée, plusieurs appareils électriques en fonctionnement, des soudures qui provoquent des embrasements… les risques sont nombreux. Afin de les réduire, Delta Partners organise la co-activité sur le chantier : les séquences de travaux sont organisées par zone où les différents corps d’état se succèdent. Enfin, les incendies peuvent être évités en coupant systématiquement le courant en fin de journée et organisant des rondes de surveillances. C'est d'ailleurs un responsable de sécurité qui a donné l'alerte lors de l'incendie du centre commercial Vill'Up.