Avec les certificats d'économie d'énergie (CEE), les collectivités territoriales, notamment, disposent d'un levier financier innovant pour promouvoir la maîtrise de l'énergie. Mais encore faut-il que ces dernières sachent le combiner avec les règles de la commande publique.
Marché d'échanges de CEE. Le dispositif des CEE oblige les fournisseurs d'énergie (électricité, gaz, chaleur, froid, carburants… ), appelés « les obligés », à réaliser ou faire réaliser un volume triennal d'économies d'énergie. A l'issue de ces trois années, ils doivent justifier d'un montant de CEE attestant de l'atteinte de leurs objectifs réglementaires sur un registre national, sous peine de pénalités. Les certificats sont obtenus à la suite d'actions réalisées par eux-mêmes ou en incitant les consommateurs d'énergie, tous secteurs confondus (logement, tertiaire, industrie, transports, réseaux et agriculture), à en effectuer, par l'achat de certificats auprès d'autres acteurs ayant accompli des opérations d'économies d'énergie ou par la justification d'investissements financiers dans des programmes éligibles aux CEE.
Les collectivités, l'Anah, les bailleurs sociaux, les SEM et les SPL, appelés « les éligibles », bénéficient de ce dispositif, créant ainsi un marché d'échanges de CEE avec les fournisseurs. Or ces éligibles sont soumis au régime de la commande publique.
Trois hypothèses. Pour rappel, seuls les achats sont soumis aux règles de la commande publique : toute opération qui s'analyse en une vente en est exclue. Il faudra donc examiner si le recours aux CEE s'apparente à un achat ou à une vente afin de déterminer si les règles des marchés publics s'appliquent.
Hypothèse d'une vente de CEE à un fournisseur d'énergie ou à un délégataire (1) par un acheteur public à la suite de l'exécution d'un marché de travaux ou de travaux en régie.
Si l'acheteur, après avoir mené à bien les travaux d'économie d'énergie dans le cadre d'un marché de travaux ou de travaux en régie, se borne à constituer, sans intermédiaire, la demande de CEE pour son propre compte auprès du Pôle national des certificats d'économie d'énergie et à vendre directement les CEE à un ou des fournisseurs ou délégataires, il réalise une simple vente. Elle ne relèvera pas des règles de la commande publique dès lors qu'il n'y a pas de prestation réelle en contrepartie.
Hypothèse d'une cession des CEE convenue à l'avance par l'acheteur public à un fournisseur ou son délégataire.
Pour le Conseil d'Etat, un « contrat d'accord d'incitation financière CEE » ne constitue pas un marché public
Si l'acheteur a décidé de vendre exclusivement les CEE à un fournisseur ou à un délégataire, sans évoquer avec lui les travaux d'économie d'énergie avant leur réalisation, quelle est la nature de ce partenariat ? Le Conseil d'Etat a récemment considéré qu'un tel « contrat d'accord d'incitation financière CEE » n'était pas un marché public et constituait une vente de droit privé. En effet, il ne comportait pas de prestation de service réelle émanant du partenaire de l'acheteur, la contrepartie à la cession des CEE étant uniquement le paiement d'un prix (). Il en irait différemment si cette convention s'accompagnait de prestations de conseil par exemple.
Hypothèse où l'acheteur prévoit la valorisation des CEE dans les marchés publics comme un élément du prix du marché. Dans son marché de travaux, l'acheteur peut décider que les éléments du prix seront constitués soit par le versement d'une somme d'argent, soit par un volume de CEE. Il peut également autoriser au titre des variantes la valorisation des CEE.
Cette valorisation dans les contrats publics est légale à condition de prévoir également le paiement en numéraire afin de ne pas réserver l'accès des marchés aux candidats qui ont la possibilité de répondre sous forme de CEE, c'est-à-dire aux obligés.