Saudi Oger, chute d’un géant du Moyen-Orient

L’autre grand du BTP d’Arabie saoudite avec Bin Laden est en faillite. Le groupe créé par Rafiq Hariri, et qui est toujours la propriété de la riche famille libanaise, paye la chute du cours du pétrole… mais pas seulement.

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Chantier Saudi Oger

Saudi Oger a son siège en Arabie Saoudite, mais son propriétaire est la célèbre famille libanaise Hariri. La double origine du constructeur explique en partie la descente aux enfers qu’elle connaît depuis plusieurs mois et qui devrait aboutir à sa mise en faillite courant juillet. Ce géant, qui réalisa jusqu’à 10,4 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2012 et employait 38 000 salariés, dont des Français, devrait ainsi disparaître de la carte.

Le groupe a été fondé en 1978 par Rafiq Hariri, qui décrocha en Arabie saoudite toute une série de contrats, ce qui en fit l’autre poids lourd du BTP local avec BinLaden Group. Dès 1979, le groupe rachète l’ingénieriste français Oger International, détenu depuis via une filiale, Fradim. Rafiq Hariri assassiné en 2005, le groupe Saudi Oger est confié à ses enfants, et notamment à l’actuel Premier ministre libanais, Saad Hariri. Dès les années 2000, une gestion hasardeuse provoque les premiers problèmes au sein du groupe, mais deux éléments fondamentaux ont abouti à sa chute. La dégringolade du cours pétrole, d’abord, qui a remis en cause les grands projets de construction de l’Arabie Saoudite. Et, ensuite, les tensions politiques entre l’Arabie saoudite, l’Iran et indirectement le Liban. À travers Saudi Oger, Riyad voudrait punir Beyrouth pour les positions antisaoudiennes du gouvernement libanais, dominé par le Hezbollah pro-iranien, alors que le camp de Saad Hariri, pèse de moins en moins dans le pays.

Oger International entraîné dans sa chute ?

Saudi Oger pourrait entraîner dans sa chute Oger International, qui fait l’objet d’une procédure de Sauvegarde de l’entreprise depuis septembre 2016. L’ingénieriste français compte aujourd’hui encore 225 salariés. Plus pour longtemps : 87 suppressions d’emplois sont programmées. Les licenciements interviendront probablement courant juillet. L’ambiance est lourde à Saint-Ouen, siège du groupe, qui fait face à une ardoise de 45 millions d’euros laissée par Saudi Oger. Malgré une décision de la justice française, il est peu probable que le groupe saoudien règle cette dette très lourde à porter pour Oger International qui réalisait, en 2015, un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros et qui ne serait plus que de 60 millions en 2016. La procédure de Sauvegarde, surveillée par le Tribunal de commerce de Bobigny, gèle pour le moment les dettes. La vente du siège de 17 000 m² de Saint-Ouen, évaluée à 70 millions d’euros, serait une piste. Mais il est la propriété de Fradim, l’actionnaire d’Oger International, qui ne porte pas la dette. 

Historiquement, Oger International profitait de l’activité florissante de Saudi Oger en Arabie Saoudite, où le groupe était attributaire de fastueux chantiers de la famille royale. Un réservoir qui s’est tari. Pour espérer voir le bout du tunnel, Oger International doit solder sa dépendance à Saudi Oger, sachant que l’Arabie Saoudite pesait jusqu’à 60% du chiffre d’affaires ces dernières années. Le cabinet français compte toujours sur ce pays et ses pétrodollars, à travers un nouveau relais, le groupe de BTP Macc. Créé par des anciens de Saudi Oger, mais toujours dans le sillage de la famille Hariri, Macc pourrait récupérer certains des contrats de Saudi Oger. « Notre savoir-faire en matière d’ingénierie est reconnu en Arabie Saoudite », confie un salarié d’Oger International. Le groupe travaille aussi à sa diversification géographique. En France, d’abord, où le groupe est intervenu ces dernières années en maîtrise d’œuvre d’exécution pour les centres commerciaux d’Ikea à Bayonne et Caen. La direction miserait aussi beaucoup sur le Maghreb, où Oger International compte des filiales au Maroc et en Tunisie.

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