En donnant à 7 kilomètres de route nationale le statut d'un projet architectural, la DDE du Territoire de Belfort prend les devants : « La France doit s'adapter au droit commun européen en matière d'ingénierie privée. Ce projet tranche avec la traditionnelle confusion des rôles de maître d'ouvrage et de maître d'oeuvre dans les services de l'Equipement », souligne Olivier Frérot, directeur de l'équipement du Territoire. Du côté de l'Equipement, l'apprentissage du dialogue entre une maîtrise d'ouvrage et une maîtrise d'oeuvre clairement séparées ne va pas sans difficultés. Les épisodes qui ont abouti, au premier trimestre 2001, à l'élaboration d'un avant-projet modificatif illustrent ces écueils : sur la base d'un projet remis en août, le Service d'études techniques des routes et autoroutes du ministère a opposé mi-décembre un avis défavorable au projet de viaduc. Les 8 arches évasées posées sur des appuis fins inspiraient des craintes de dérapages financiers et techniques. Lauréat en octobre 1999 du concours lancé par la DDE pour le remodelage de l'extrémité orientale de la RN19, l'architecte-ingénieur Marc Mimram a dû réviser sa copie, mais sur la base d'autres arguments : plutôt que de figer le lit de l'Allaine entre les piles du viaduc, la direction régionale de l'environnement a préféré un reméandrement du cours d'eau, afin de préserver son espace d'expansion. Du coup, les appuis fins ne se justifiaient plus. S'il reconnaît qu'un tel contexte « insécurise nos équipes », Gilles Quérini, responsable des grands travaux à la DDE, reste confiant : « Au bout du compte, les étapes actuelles contribueront à améliorer le projet. » Un facteur objectif justifie cet optimisme : un consensus existe autour de la route, ce qui permet à la DDE d'en faire un laboratoire de la transparence de l'action publique. « Le site Internet (www.rn19.net), préfigure une pratique qui devrait se généraliser », estime Olivier Frérot.
Au cas où le suivi d'exécution des travaux serait aussi assuré par l'équipe de Marc Mimram, le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre approfondissent un débat provoqué par le projet : « Habituées à la confusion des rôles, les DDE savent à peu près payer des études, mais pas le suivi d'exécution », estime Marc Mimram. Olivier Frérot déplore, lui, les structures artisanales de l'architecture hexagonale : « Si nous nous étions appuyés sur un grand bureau d'études, nous n'aurions pas eu à nous interroger sur la part de la sous-traitance dans le suivi du projet. » Décidément, la DDE du Territoire n'élude pas les questions difficiles...
FICHE TECHNIQUE (p.137) :
Maître d'ouvrage : DDE du Territoire de Belfort
Maître d'oeuvre des ouvrages d'art, viaducs et aménagement paysager : Marc Mimram, associé à Acanthe, paysagistes (Guillaume Geoffroy-Dechaume)
Maître d'oeuvre des terrassements et voiries : DDE du Territoire de Belfort
Coût : 60 millions de francs TTC pour les deux ouvrages non courants (viaduc de 300 m sur l'Allaine et pont de 40 m au croisement de la D26), 35 millions de francs pour les sept ouvrages courants, 6 millions de francs pour le traitement paysager
Financement : Etat (75 %), région (12,5 %), conseil général (12,5 %)
Calendrier prévisionnel : automne 2001-fin 2003
DESSINS PHOTO : Projets de viaduc et d'ouvrage d'art courant de Marc Mimram, architecte-ingénieur en charge du remodelage de la section de la RN19.