En 1989, la France se trémoussait sur la lambada, s'époumonait « pour toi, Arménie », et rêvait de « sombres héros de l'amer ». Sur grand écran, Harrison Ford et Sean Connery lançaient leur dernière croisade, Robin Williams émouvait le monde en prof de lettres et Marty McFly enfourchait son hoverboard. Quant au mur de Berlin, il finissait par succomber aux assauts des coups de pioches et à l'arrivée des temps nouveaux. Wind of Change.
Cette année-là a aussi marqué le climax des grands travaux de François Mitterrand. Certes, du Grand Louvre à l'IMA, de la Villette à Bercy, ces chantiers présidentiels se sont étalés sur deux septennats. Cependant, en 89, à la veille de la fête nationale, un opéra flambant neuf se dressait sur la place où une ancienne prison fut prise un autre 14 juillet. Et l'Arche de la Défense a officiellement ouvert ses portes le 26 août, deux siècles jour pour jour après la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Une époque où de parfaits inconnus remportaient des concours d'architecture.
Cet été, le bicentenaire devient trentenaire. Pour l'occasion, « Le Moniteur » vous propose, entre photos argentiques et anecdotes oubliées, une immersion totale dans une époque révolue. Une époque où-exception faite du choix souverain de Ieoh Ming Pei pour transformer Le Louvre -les concours d'architecture permettaient à de parfaits inconnus venus de l'étranger (Johan Otto von Spreckelsen ou Carlos Ott) comme à la jeune garde française (Jean Nouvel ou Dominique Perrault) de remporter des projets emblématiques. Une époque où, semblait-il, rien n'était trop beau pour magnifier la puissance bâtisseuse de l'Etat.
Et, dans trois décennies, que célébrera-t-on ? De tels projets ne connaissent pas d'équivalents aujourd'hui. La nostalgie pourrait nous les faire regretter. Pourtant, l'énergie et la créativité demeurent, elles se sont simplement déportées ailleurs. Vers des infrastructures gigantesques comme le Grand Paris Express, vers des projets responsables, comme le village olympique. Et vers les métropoles régionales, zones blanches des grandes réalisations mitterrandiennes.