Risque de péril imminent. En 2020, le rapport de l'Apave, bureau de contrôle spécialisé dans la maîtrise des risques techniques, est clair. Après cinquante années de bons et loyaux services, la piscine municipale de Guéret (Creuse) doit fermer ses portes du fait des dégradations structurelles des éléments en béton. La municipalité décide alors d'édifier des bassins mobiles sous chapiteau en attendant la construction d'un centre aquatique. « Mais ils ne permettaient d'accueillir que 25 % des scolaires qui s'y rendaient précédemment. Et leur coût, associé à celui des transports pour emmener les enfants ailleurs, était élevé », explique Eric Correia, président de la communauté d'agglomération du Grand Guéret.
Une alternative est alors évoquée. « L'état de dégradation des matériaux de la piscine n'est pas encore catastrophique ce qui permet d'envisager une réouverture sur une durée limitée, de quelques années, à condition de réaliser des renforcements et de mettre en place un suivi grâce à une instrumentation ad hoc », indiquait le rapport de l'Apave. L'agglomération décide alors de solliciter la société d'ingénierie Bérim, spécialisée dans les structures en béton armé, pour les accompagner.
« Dès février 2024, nous avons défini des solutions techniques envisageables et l'enveloppe de travaux associée », se remémore Benoît Bautheney, directeur d'agence Auvergne-Rhône-Alpes de l'ingénieriste. Le marché, très spécifique, a ensuite été remporté en conception-réalisation par Freyssinet, qui a mandaté le laboratoire Sixense pour analyser les prélèvements de béton, avant d'affiner les solutions techniques et d'optimiser le calendrier des travaux pour les limiter à cinq mois.
Torons d'acier. L'entreprise Sodepol a commencé par désamianter l'équipement, avec le procédé robotisé AS Protek, équipé de caméras et de capteurs. L'amiante a été retiré par projection de matériaux abrasifs, grattage et aspiration. Le tout en une semaine. Puis a suivi la reprise des bétons. « Nous avons préconisé un traitement des aciers visibles par passivation, associé au renforcement des poteaux par la mise en œuvre de tissus de fibre de carbone, résistants en traction comme en compression », indique Benoît Bautheney. Les supports ont ainsi été préparés pour solidifier les poteaux, en particulier en pied et en tête, là où les forces les plus importantes interviennent. « La fibre de carbone appliquée sur les nœuds structurels limite en plus les mouvements en rotation, détaille l'ingénieur. Nous avons ensuite préconisé le renforcement de six des neuf poutres des portiques supportant la toiture de la halle principale au moyen d'une précontrainte additionnelle. » Concrètement, des torons d'acier ont été installés de part et d'autre des poutres solidarisées par des blochets, puis tendus par des vérins hydrauliques, pour corriger la flexion et ajouter des forces extérieures.
En parallèle, la société Uby a instrumenté le bâtiment pour observer ses mouvements. « Une station totale robotisée de mesure tridimensionnelle a été installée sur la médiathèque voisine, et de multiples prismes ont été répartis sur les poutres et poteaux afin de suivre un ensemble de points de mesure en 3D avec une précision millimétrique, détaille Nicolas Bernard, directeur des services techniques de l'agglomération du Grand Guéret. Ces données seront transmises en temps réel sur toute la durée de l'exploitation, qui est relancée pour les cinq prochaines années. » Un répit bienvenu en attendant la déconstruction.




Informations techniques
Maîtrise d'ouvrage : communauté d'agglomération du Grand Guéret. AMO : Bérim, Serca (géomètre). Entreprises principales : Freyssinet (renfort structure), Sodepol (désamiantage), Cireme (échafaudage), Hervé Thermique (étanchéité, CVC et traitement d'eau), Sixense (prélèvement et analyse), Uby (instrumentation).
Bureau de contrôle : Alpes Contrôles. Montant des travaux : 849 000 euros HT