Recherche : le confort thermique en quête de modèles

A travers l'analyse croisée de données environnementales et physiologiques, le CSTB entend objectiver la sensation de bien-être dans un bâtiment.

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Les signaux physiologiques permettent d’étudier le système de régulation du corps humain et donc la sensation de confort des usagers.

Chacun a déjà fait l'expérience d'être réchauffé par un rayon de soleil à travers une fenêtre en hiver, ou, à l'inverse, de frissonner chez soi quand le temps est gris et humide. Mais comment mesurer ces sensations ? « Jusqu'ici, l'indication du confort thermique se basait sur des grandeurs physiques mesurables, telle que la température de l'air dans une pièce. Or, nous savons qu'elles sont peu représentatives de la réalité perçue », indique Sophie Moreau, directrice du domaine d'action stratégique Bâtiments et quartiers pour bien vivre ensemble au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). L'organisme cherche à objectiver ce qui est subjectif, « en qualifiant les ressentis des occupants dans différents environnements intérieurs », explique-t-elle.

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« L'instrumentation des usagers nous fournit des données précieuses et uniques. » Gwénaëlle Haese, ingénieure au CSTB

Mesures embarquées. Le principe consiste à coupler trois types de données : physiques, physiologiques et déclaratives. « Les premières sont issues soit de mesures in situ (température, taux d'humidité relative, vitesse de l'air, rayonnements…), soit de modèles de calcul. Parfois, elles sont mêmes extraites de la base de données nationales des bâtiments (BDNB), produite par le CSTB », explique Fabrice De Oliveira, ingénieur à la direction climatologie, aéraulique et aérodynamique du Centre. Ces jeux de data sont ensuite croisés avec des mesures physiologiques. « Nous nous appuyons sur la méthodologie Pulse [Pioneering hUman Lab for Sensory Evaluation], qui consiste à instrumenter les usagers pour analyser le rythme cardiaque, la réponse électrodermale, la microcirculation cutanée et la température de la peau », poursuit Gwénaëlle Haese, ingénieure recherche et expertise en analyse sensorielle et physiologie à la direction Eau du CSTB. « Ces signaux permettent de mesurer scientifiquement l'activité du système de régulation du corps humain, qui est faible lorsque celui-ci est dans un état de confort », note Sophie Moreau. Enfin, des questionnaires permettent de connaître le niveau d'habillement des usagers, leur activité et leur taux de satisfaction à différents moments de la journée. Toutes ces données sont intégrées dans un même métamodèle nommé Neuro Human Thermal Model (NHTM), développé dans le cadre d'une thèse en collaboration avec le Laboratoire des sciences de l'ingénieur pour l'environnement (Lasie).

 

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Recherche appliquée. Cette approche innovante a été testée à travers trois pro-jets de recherche. Les deux premiers, EcoDom et CoolDown, ont été menés à la Réunion, où une vingtaine de volontaires se sont vus équipés de capteurs pendant une semaine, les uns dans dix bâtiments de logements sociaux, les autres dans deux immeubles de bureaux. Le projet Renoptim, issu du programme Profeel, concernait, lui, le territoire métropolitain. En juillet dernier, des campagnes de mesures ont été mises en place afin d'optimiser le confort d'été dans les appartements en limitant le recours à la climatisation. Cette fois-ci, les capteurs étaient portés par 80 personnes réparties dans autant de logements sociaux en Ile-de-France, en Gironde et dans les Bouches-du-Rhône.

« Ces méthodes d'instrumentation nous fournissent des données précieuses et uniques, assure Gwénaëlle Haese. Elles nous ont permis d'identifier des seuils d'inconfort spécifiques à un type de population et à un contexte, ce qui aidera à concevoir des environnements intérieurs au-delà des standards. » A la Réunion par exemple, le seuil d'inconfort pourrait se situer dans des plages de température de 28 à 30 °C à partir de 68 % d'humidité relative. Fabrice De Oliveira ajoute : « Alors que les normes actuelles restent inadaptées, cette approche métrique va nous permettre de mettre au point des indicateurs plus précis afin d'optimiser les modèles de prédiction du confort thermique. » Ils seront particulièrement utiles à la filière des matériaux bio et géosourcés.

« Si les professionnels mettent en avant leurs qualités hygroscopiques, c'est-à-dire leur capacité à stocker puis restituer l'humidité de l'air pour réguler l'ambiance intérieure, ce critère reste difficile à évaluer. Avec notre approche, nous parviendrons à objectiver ce ressenti », espère Sophie Moreau. Déjà, un premier projet collaboratif autour de la terre crue baptisé Terac est en cours. Un second sur les isolants bio et géosourcés devrait s'engager. Les industriels du béton suivent, quant à eux, ces travaux avec intérêt.

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