CTB - Quelles ont été selon vous les innovations techniques les plus importantes en 2018 en France ?
En prenant en compte la manière dont le monde évolue, les grandes tendances que sont la transition écologique, l'urbanisation croissante, et tout ce que cela engendre notamment sur la mobilité, le changement d'habitude des utilisateurs entre l'économie du partage et l'économie de propriété et l'accélération de la transformation digitale, nous avons identifié quatre technologies que nous devons investir. La première, c'est tout ce qui touche à la réalité virtuelle, augmentée et mixte, et qui, dans un projet immobilier, par exemple, permet de raccourcir les délais et d'avoir une meilleure perception d'ensemble.
La deuxième technologie clé est celle de la blockchain, qui sécurise l'échange d'énergie entre les mondes tertiaire et résidentiel - le dispositif est en test sur Lyon Living Lab -, mais également la signature de contrats. La troisième touche à l'internet des objets et au big data. Chez Bouygues, Objenious permet de remonter l'ensemble des données de l'internet des objets via le réseau LoRa jusqu'aux managers de terrain.
La quatrième concerne l'intelligence artificielle. Au sein du groupe, nous avons déjà identifié 70 cas d'utilisation d'IA dans nos métiers, à des niveaux de maturité différents. On sent bien que le BIM est au cœur de tout cela avec, pour Bouygues Construction, le projet de plate-forme numérique en lien avec Dassault System.
CTB - Pouvez-vous citer des innovations notables à l'international ?
Il y a notamment tout ce qui a trait à la construction modulaire. Nous sommes là-dessus un peu aux avant-postes à Singapour, où nous venons d'inaugurer une nouvelle usine de production et où nous réalisons les tours du projet Clement Canopy 1 qui va comporter les deux tours les plus hautes du monde en construction modulaire béton. Ces projets sont rendus possibles grâce au BIM, et, de manière plus générale, grâce à la transformation digitale qui en est la tendance de fond.
Ils font suite à d'autres constructions modulaires à Singapour, comme le Crowne Plaza, un 5 étoiles sur la plate-forme de l'aéroport, dont les dix étages ont été montés en 28 jours, et un hôpital de jour de trois à quatre étages.
CTB - Quels sont, selon vous, les freins et les leviers à l'innovation ?
Un certain nombre de pays comme les États-Unis ou Singapour sont en train d'aller très loin dans la construction modulaire. En France, nous sommes peut-être un peu plus frileux, il faut respecter les normes spécifiques du bâtiment. À côté de cela, il y a le poids des habitudes. Je suis toujours frappé de voir qu'aux États-Unis la construction de base est en bois ou en métal, alors que, chez nous, elle est en béton. Par ailleurs, en France, la construction modulaire ne représente que 10 % de ce qui se fait en Angleterre, et elle y est davantage en bois.
