La ville chinoise de Yangzhou installée sur un réseau de canaux est liée à Shanghai non seulement par le fleuve du Yangzi mais aussi par son activité industrielle. Elle accueille les plus grands chantiers navals du pays. A l'évidence, pour les architectes, il fallait tirer profit de ce savoir-faire en chaudronnerie très spécifique à la région.
Le matériau de prédilection était donc la tôle. Les architectes et ingénieurs ont réussi à mettre en place une portée de plus de 66 mètres en plissant et chaudronnant une double feuille de tôle. L'ouvrage pèse 50 tonnes et sa largeur varie de 3 à 5,70 mètres, un ratio relativement faible, qui indique sa légereté. La géométrie souple de la parcelle donne à lire le cheminement des efforts le long des courbes qui s'inversent. En extrémités, on trouve deux encastrements et au centre une articulation. L'inertie varie tout au long de la structure.
Symétrique, le parcours est composé de deux séries d'emmarchements qui rappellent les modèles de passerelles chinoises dans les jardins typiques. Ils se rencontrent au sommet et forment une esplanade plane plus large, se présentant implicitement pour le promeneur comme une pose. C'est une invitation à profiter de la vue, de cette situation unique permise par l'ouvrage qui prend de la hauteur pour laisser passer le trafic fluvial.
La passerelle témoigne par sa finesse de la justesse des calculs et de la maîtrise de sa géométrie mais aussi de la qualité du travail des ouvriers chinois. C'est en cela que pour Marc Mimram, la Chine est un lieu d'expérimentation extraordinaire car sans le mélange des savoir-faire jamais un tel ouvrage n'aurait été construit.
Pour sa légèreté, les habitants de Yangzhou l'ont appelé "Liu Shu" : feuille de saule, arbre qui borde généreusement les canaux de Yangzhou. La passerelle semble admirablement bien s'insérer dans le site.