PME, achats innovants, démat’: un décret modifie les règles de la commande publique

Le décret portant diverses mesures relatives aux contrats de la commande publique est paru le 26 décembre au « Journal officiel ». Ses mesures, déjà entrées en vigueur, visent notamment à donner un coup de pouce financier aux PME accédant aux marchés publics.

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Le décret portant diverses mesures relatives aux contrats de la commande publique est paru

Le tout premier Code de la commande publique, tel que publié au début du mois de décembre aura donc tenu... 19 jours. En cause : le décret du 24 décembre 2018 portant diverses mesures relatives aux contrats de la commande publique, qui vient notamment modifier la partie réglementaire du code. Mais pas de grande surprise au rendez-vous, puisque ce texte était attendu. Une consultation avait d’ailleurs été organisée par Bercy l’été dernier.

Une expérimentation pour les achats innovants

Le premier point à retenir de ce texte (article 1er) est le lancement d’une expérimentation visant à permettre la conclusion de gré à gré des marchés portant sur des achats innovants en deçà de 100 000 euros. Plus précisément, pendant trois ans, les acheteurs publics pourront « passer un marché public, y compris de défense ou de sécurité, négocié sans publicité ni mise en concurrence préalables portant sur des travaux, fournitures ou services innovants [...] et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes ».

Le caractère innovant est défini, par renvoi à l’article 25 du décret marchés publics du 25 mars 2016, de façon relativement large : « Sont innovants les travaux, fournitures ou services nouveaux ou sensiblement améliorés. Le caractère innovant peut consister dans la mise en œuvre de nouveaux procédés de production ou de construction, d'une nouvelle méthode de commercialisation ou d'une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques, l'organisation du lieu de travail ou les relations extérieures de l'entreprise ».

Les acheteurs publics peuvent donc contractualiser plus librement dans ce domaine de l’innovation, mais ils doivent néanmoins veiller « à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu'il existe une pluralité d'offres susceptibles de répondre au besoin », comme le précise le décret du 24 décembre 2018. En outre, l’article 2 du texte oblige les acheteurs à déclarer leurs achats innovants auprès de l'Observatoire économique de la commande publique (OECP). En ce sens, un arrêté du 26 décembre 2018 (NOR: ECOM1827804A) précise que « l'acheteur appose la mention « procédure expérimentale innovation » dans la rubrique « Commentaires » du modèle annexé à l'arrêté du 21 juillet 2011 relatif au recensement économique de l'achat public. »

Par ailleurs, un changement notable est intervenu entre le projet de décret mis en consultation et le texte publié. Initialement, l’expérimentation faisait référence aux PME, avec qui les acheteurs pouvaient contracter librement. Or, cette notion a disparu dans le texte final. De plus, les marchés de sécurité et de défense ont été ajoutés à la suite de la consultation publique.

Les mesures en faveur des PME

Parmi les autres mesures issues de ce décret, deux vont impacter directement les PME. Il s’agit tout d’abord, concernant les marchés publics passés par l'Etat, du relèvement à 20% (contre 5 % précédemment) du montant minimum des avances, et ce lorsque le titulaire du marché public ou son sous-traitant admis au paiement direct est une PME (article 7).

Par ailleurs, toujours pour les marchés de l’Etat avec des PME, le décret instaure cette fois-ci une réduction du taux de la retenue de garantie, passant de 5% à 3% (article 8). Il s’agit pour rappel d’une somme retenue par le donneur d’ordres sur les versements effectués pendant toute l’exécution du contrat, destinée à couvrir les éventuelles réserves formulées lors de la réception, ainsi que celles pouvant apparaître durant la période de garantie.

Avec ces deux mesures, l’objectif affiché est clair : soulager la trésorerie des entreprises afin de leur faciliter l’accès à la commande publique.

Les autres dispositions du décret

Des précisions sont apportées sur la dématérialisation des marchés publics, obligatoire depuis le 1er octobre 2018. L’article 6 offre ainsi expressément aux acheteurs la possibilité de régulariser les candidatures des soumissionnaires lorsqu’elles ont été déposées - à tort - en papier. Pour ce faire, il est ajouté un alinéa au I de l’article 55 (modalités de vérification des conditions de participation) du décret marchés publics. L’acheteur doit alors veiller à bien autoriser tous les candidats concernés à transmettre leurs candidatures par voie électronique pour les régulariser, dans un délai identique pour tous.

A noter également (article 5) l’introduction d’un seuil pour l’obligation de mise à disposition des documents de la consultation sur le profil d’acheteur, modifiant au passage l’article 39 du décret marchés publics. Désormais, seuls les marchés répondant « à un besoin dont la valeur estimée est égale ou supérieure à 25 000 euros hors taxes et dont la procédure donne lieu à la publication d'un avis d'appel à la concurrence » y seront soumis. Le décret précise par ailleurs que « lorsque certains documents de la consultation sont trop volumineux pour être téléchargés depuis le profil d'acheteur, l'acheteur indique dans l'avis d'appel à la concurrence ou dans l'invitation à confirmer l'intérêt les moyens électroniques par lesquels ces documents peuvent être obtenus gratuitement » (article 5).

En matière de dématérialisation toujours, il est à présent prévu noir sur blanc dans le décret du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession (nouvel article 32-1) que « le contrat de concession peut être signé électroniquement, selon les modalités fixées par un arrêté du ministre chargé de l'économie ».

Enfin, le décret (article 12) prévoit qu’à partir du 1er janvier 2022, les avis de marché au-delà de 90 000 euros HT et sous les seuils européens devront être rédigés selon un modèle qui sera fixé par arrêté du ministre chargé de l’économie. Un groupe de travail planche déjà sur l’élaboration de ce modèle d’avis, avait indiqué Bercy fin 2018.

Un texte à double détente

L’architecture du décret paru à Noël est particulière, phase de transition oblige. Il modifie en effet dans un premier temps le décret marchés publics du 25 mars 2016, qui sera en vigueur jusqu’au 31 mars 2019. Puis il insère les mêmes nouveautés dans le Code de la commande publique, qui sera, lui, applicable à compter du 1er avril. Au passage, le gouvernement profite de ce décret pour introduire dans le code une disposition découlant de l'application de la loi Elan. A savoir, celle supprimant l’obligation de concours pour désigner un maître d’œuvre pour des ouvrages de bâtiment réalisés par des organismes HLM, des SEM ainsi que des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous).

Décret n° 2018-1225 du 24 décembre 2018 portant diverses mesures relatives aux contrats de la commande publique

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