Patrimoine : quand Henri-IV entre dans le XXIe siècle

Planchers renforcés, façades rénovées, nouvelles constructions : un collège de Poitiers se modernise en finesse, sans perdre son caractère.

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Le pied de l'ensemble bâti du collège Henri-IV a été décaissé sur plusieurs mètres, pour y accoler un nouvel espace de restauration.

Situé sur un terrain escarpé, le collège Henri-IV de Poitiers (Vienne), fondé en 1604, fait aujourd'hui peau neuve. Orchestré par l'Atelier d'architecture Philippe Prost (AAPP), spécialisé dans le patrimoine, ce chantier à la fois délicat et colossal constitue l'opération de ce type la plus importante qu'ait connue le département. De fait, il s'agit de réhabiliter un ensemble hétéroclite et historique afin qu'il réponde aux exigences techniques et environnementales actuelles et accueille au mieux ses 500 élèves à la rentrée 2025.

Reprise des planchers. Les travaux se concentrent sur la partie du XIXe siècle qui se caractérise par un chaînage de pierre et un remplissage en brique. Sa restauration implique d'enlever la chair pour arriver au squelette en s'assurant de sa solidité. Les missions de curage commencées en juin 2022 ont apporté leur lot de surprises : « Outre la présence d'amiante et de plomb mise en évidence par les sondages, la charpente et certains planchers étaient à reprendre significativement », indique Nabil Guettal, directeur travaux pour AAPP.

La reprise des planchers constituait d'ailleurs l'un des postes les plus techniques. Les ferraillages de deux des bâtiments donnant sur la cour principale s'avérant insuffisants, les charpentiers de l'entreprise Bourloton les ont renforcés à chaque niveau. Pour ce faire, ils ont

réalisé des empochements dans les murs en vue d'accueillir les poutres métalliques de renfort. « Les plus longues mesurant 9,40 m, il a fallu les suspendre à la grue à l'extérieur et les glisser ensuite à l'intérieur après avoir démonté quelques briques en façade », décrit le directeur de travaux.

Les compagnons de l'entreprise Art de Bâtir ont de leur côté repris les façades. Ils ont su préserver le calcin des chaînages et jambages en pierre. Certaines briques ont été remplacées par des neuves, qui ont été sablées et rognées pour se confondre avec les anciennes. A l'intérieur, un isolant en panneaux souples à base de coton, de chanvre et de lin a été mis en place. Des fenêtres en chêne à double vitrage se sont substituées aux menuiseries d'origine, tandis que des escaliers et des ascenseurs ont été ajoutés pour répondre aux normes de sécurité incendie et d'accessibilité.

Décaissement sur plusieurs mètres. Outre ces travaux de réhabilitation qui doivent s'achever à la fin de l'année, l'agence s'est penchée sur les annexes érigées dans les années 1960. L'espace restauration, trop dégradé, a été entièrement démoli. A sa place, le nouvel édifice en construction sera bien moins haut que son prédécesseur, pour ne pas obstruer la vue. « Les ouvriers ont au préalable décaissé le terrain sur plusieurs mètres de hauteur, en pied du bâtiment du XIXe . Au fur et à mesure du terrassement, des parois berlinoises en bois et des butons métalliques assuraient la stabilisation des terres. Dans le même temps, des relevés en continu permettaient de surveiller l'ouvrage existant. Seuls des étrésillons au niveau des baies sont venus le renforcer en phase provisoire », explique-t-il.

Une fois ces étapes achevées, fin 2023, des recherches archéologiques ont pu être menées. Elles ont permis de découvrir 14 sépultures. « Sur l'ensemble du site, chaque tranchée que nous creusions était soumise à un suivi. Un réel défi pour l'avancée des travaux », souligne Nabil Guettal.

Reste aujourd'hui la réhabilitation du gymnase attenant, une passoire thermique dotée d'une couverture arrondie en aluminium sur charpente bois et de façades ajourées de verre armé. Son enveloppe sera entièrement revue, et son extension conçue en structure bois sur un socle en béton. Autour de ces ouvrages, l'ensemble des accès sera repensé par un jeu de rampes, qui donnera davantage de visibilité à la cour d'entrée et répondra aux 15 m de déclivité entre les deux extrémités du site.

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Certains planchers ont été intégralement refaits, avec des solives bois de 50 cm de haut connectées à une dalle béton.

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La plupart ont été renforcés par des poutres métalliques, glissées depuis l'extérieur jusqu'à l'intérieur au moyen de chariots roulants.

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En plus de la restauration de l’ensemble du XIXe siècle, la cantine et le gymnase sont entièrement transformés.

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L’extension du gymnase des années 1960 est en structure bois sur socle en béton.

Information technique

Maîtrise d'ouvrage : département de la Vienne. AMO : Sistra.

Maîtrise d'œuvre : Atelier d'architecture Philippe Prost (mandataire), Lancereau & Meyniel (architectes cotraitants). BET : Egis (TCE), Gamba (acoustique), FL Ingénierie (économie).

Entreprises principales : EGD (désamiantage, déplombage, curage), BDS (démolition), SAS Breuil, CIE (structure, couverture), Bourneuf (menuiseries extérieures), Art de Bâtir (façade), Bourloton (charpente métallique), Millet (charpente bois), R-Use (réemploi).

Début des travaux : juin 2022.

Livraison : mai 2025.

Montant de l'opération : 42,5 M€ HT (global) dont 28 M€ HT de travaux.

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