L’année a été marquée par le rachat d’Innovyze, une entreprise spécialisée dans les systèmes de simulation et de modélisation d’infrastructures hydrauliques. Qu’implique ce rachat ?
L’année a en effet été marquée l’acquisition d’Innovyze en février dernier pour un milliard de dollars ! Il s’agit du rachat le plus important pour Autodesk et cela va nous permettre de prendre une place essentielle dans les logiciels de gestion de l’eau, puisque l’activité historique d’Innovyze se concentrait à l’origine dans les calculs hydrauliques. Depuis, ils ont étendu leurs domaine de compétence avec la gestion de tout le cycle de l’eau. Leurs outils s’intéressent donc aux simulations d’inondations, au traitement de l’eau potable, au dimensionnement des réseaux, à la détection de fuites, aux stations d’épuration, etc. Ils disposent d’un grand nombre de données en la matière.
L’achat d’Innovyze signifie-t-il qu’Autodesk se lance dans une nouvelle activité ?
Cet investissement va nous permettre de compléter des logiciels comme Civil 3D et Infraworks ainsi que notre cloud dédié à la construction. Nous franchissons surtout une étape supplémentaire vers la couverture logicielle de l’ensemble du cycle de vie des projets de construction, puisqu’Innovyze aborde largement la partie programmation des projets en lien avec l’eau.
L’enjeu de l’eau est essentiel car dès 2025, plus de deux tiers de la population mondiale résidera dans des régions déficitaires en eau. Par ailleurs, le marché pour répondre aux besoins en infrastructures hydrauliques mondiales est estimé à 1900 milliards de dollars d’ici à 2030. Et comme l’a rappelé Amy Bunszel, vice-présidente exécutive en charge des solutions de conception pour l’architecture, l’ingénierie et la construction chez nous : environ 41 milliards de mètres cubes d’eau sont perdus chaque année dans le monde en raison de fuites et de ruptures de canalisations prolongées. Le portefeuille de solutions d’analyse et de modélisation des réseaux d’Innovyze nous donne la possibilité d’identifier ces problèmes et de pénétrer ce marché.
De façon générale, Autodesk poursuit ses rachats et ses partenariats ?
En effet, notre objectif est bien de permettre à nos clients d’utiliser nos logiciels sur tout le cycle de vie de leurs ouvrages, qu’il s’agisse de bâtiments ou d’infrastructures. C’est pourquoi, nous avons noué un partenariat avec la société Aurigo afin de connecter les solutions basées dans le cloud à destination des collectivités locales afin qu’elles puissent gérer tous les aspects financiers des projets d’infrastructures. Aurigo complète ainsi Spacemaker qui n’aborde pas le volet financier dans ses simulations 3D.
Dans cette même logique, nous avons développé l’outil Tandem, également à destination des maîtres d’ouvrages, cette fois pour leur permettre de gérer leur patrimoine bâti. Il s’agit d’adapter automatiquement les modèles BIM des bâtiments tel que construit de façon à ce qu’ils puissent être utilisés pour la gestion de patrimoine. Cela représente un véritable défi car le BIM est encore peu utilisé en exploitation car les modèles élaborés en construction ne comportent pas les informations nécessaires à la gestion.
De même, nous poursuivons notre collaboration avec Esri. Leur nouvel outil GéoBIM est d’ailleurs intégré dans notre plateforme cloud. Le partenariat avec Schneider Electric, initié il y a plus d’un an, se poursuit. Les résultats concrets, à savoir des produits BIM pour l’électricité, seront disponibles courant 2022. Enfin, nous avons investi dans Space IQ, une solution de gestion d’espaces de bureaux et de Gestion électronique de document (Ged).
L’enjeu désormais va donc être de rendre l’ensemble de ces solutions interopérables. Comment allez-vous procéder ?
Nous sommes en train de nous embarquer dans un nouveau voyage. Les dix dernières années ont été consacrées au changement de modèle économique avec la transformation des licences perpétuelles en abonnement. Désormais, l’enjeu est de mettre en place une plateforme unique via laquelle toutes ces solutions fonctionnent ensemble de façon interopérable.
Nous allons la concevoir totalement ouverte afin qu’elle puisse servir de réceptacle aux données issues des logiciels Autodesk (AutoCad, Civil 3D, Infraworks, Spacemaker, Revit, Space IQ…) mais aussi des données issues d’autres solutions numériques. Tous les éditeurs de logiciels pourront également y connecter leurs outils. Les connections s’effectueront soit de façon native, soit via des IFC.
Une fois les données disponibles, nous pourrons commencer à les structurer pour automatiser des retours d’expérience sur des chantiers par exemple. Cette fonction sera présente dès la prochaine génération d’Autocad et l’étape suivante concernera le « generative design ».
Quid de l’anonymisation des données ?
D’un point de vue technologique, tout sera possible. Chacun pourra donc choisir de partager ou non ses informations. Aujourd’hui, nous constatons qu’une minorité de professionnels sont déjà prêts à partager leur données de façon anonyme afin d’avoir accès à toutes les données partagées. Il s’agit d’une minorité, mais je constate qu’elle augmente, car ceux qui acceptent de partager leurs informations bénéficient alors d’un accès à davantage d’information.
La prochaine échéance, relative à la mise en commun des données, soit la partie immergée de l’iceberg, sera présentée courant 2022.