Malgré les crises successives du BTP, le marché de la distribution et des produits de la construction « pèse » encore, en France, un poids conséquent : 210 milliards de francs environ. On comprend donc que la lutte soit âpre entre les trois acteurs du secteur : les grandes surfaces de bricolage (GSB), le négoce généraliste et multispécialiste et les grands noms des filières spécialisées (Rexel et Sonepar dans l'équipement électrique ou Agora dans la peinture) ; sans oublier les grands régionaux, Albertini ou Zolpan, par exemple.
La percée des groupes allemands
Avec la déprime des marchés de construction neuve, l'artisan devient le coeur de cible. Bien que détenant les deux tiers du marché en volume, les généralistes innovent face à la pression des GSB, voire des groupes de distribution comme Carrefour qui va vendre du ciment dans les prochains mois... Ainsi, Poliet vient-il d'élargir son offre en inaugurant, à Nanterre, sa première « plate-forme du bâtiment ». Suivront : Nice, fin avril, puis Lyon avant la fin 1998. Gérard Aspar, qui a passé vingt ans à la direction générale de Lapeyre, GME et K par K, est le directeur général de ces plates-formes. Avec cette nouvelle forme de distribution, il vise, d'ici à trois ans - durée estimée pour atteindre le point d'équilibre - une part de marché de 5 % sans rogner sur le territoire des filiales existantes du groupe (voir encadré).
Les groupes allemands, marqués par une conjoncture déplorable sur leur marché intérieur (1), investissent la France. C'est le cas du leader de la GSB outre-Rhin, Knauf Bauprodukte (12 milliards de francs de chiffre d'affaires en 1997), qui a racheté Isodéco (GSB) en 1994 et créé Knauf Isodéco (une centaine de millions de francs de chiffre d'affaires), avec une implantation en Ile-de-France et peut-être une nouvelle ouverture prochainement. Pour son P-DG, Hans-Jörg von Rade, « en France, la concentration va se poursuivre. Même si le marché devrait être stagnant, avec peut-être une légère hausse des produits du bâtiment. En 1998 pour notre société, je table au total sur une hausse d'au moins 5 % de notre activité cette année car nous avons le bon concept ». A savoir, une spécialisation GSB poussée et une approche marketing privilégiant la qualité et le long terme plutôt que les seuls prix.
De plus petits groupes sont aussi tentés par l'expérience. C'est le cas de RHG Raffeisen, filiale du groupe bancaire allemand Raffeisen (voir aussi p. 104), qui ouvrira en mars prochain à Wissenbourg (Alsace), un premier point de vente de matériaux de construction (4000 m2) à l'enseigne RHG. Au lieu de viser les agglomérations de 400 000 habitants, cette fois, ce sont les villes de 5000 habitants qui sont visées, mais avec une offre mixte, visant à la fois les particuliers et les artisans. Dans les dix prochaines années, cinq autres magasins de ce type ouvriront dans l'Est de la France.
(1) Helvig (5 milliards de francs de CA 1997) pourrait disparaître et Stinness (près de 6 milliards de CA 1997), filiale du groupe Veba, pourrait, elle aussi, être vendue.
GRAPHIQUE : Trois frands acteurs Marché de la distribution de produits de la construction et du bâtiment (Source Poliet)
Sur ce marché de 210 milliards pour la distribution des matériaux de construction GSB et négoce spécialisé luttent sur le créneau des artisans.