A Ventron, l’hôtellerie supplante le ski

La station vosgienne de moyenne montagne prend un virage radical : entre la modernisation de ses remontées mécaniques et la constitution d’une offre d’hôtellerie haut de gamme, la famille exploitante a choisi cette seconde option, trois fois plus chère mais vectrice selon elle de plus grandes promesses pour l’avenir sur une planète réchauffée.

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Ventron
L'ensemble immobilier retrouvera une cohérence, après l'extension hôtelière confiée à SLA Architecture

La figure tutélaire du Frère Joseph continue de veiller sur la station de Ventron (Vosges), depuis la discrète chapelle érigée à sa mémoire à son décès en 1784. Aucun doute : durant les 33 années qu’il a passées seul sur ce flanc de montagne vosgien, l’ermite religieux a vu la neige tomber en abondance chaque hiver.

Neige erratique

Mais les temps ont changé et le blanc manteau ne recouvre plus qu’épisodiquement les 9 kilomètres de pistes qui s’égrènent entre 900 et 1 100 mètres d’altitude. Plusieurs années de pratiques de ski ainsi rendues erratiques ont conduit l’autre grand nom local, la famille Leduc aux manettes depuis un siècle, à prendre un virage radical.

Elle ne réinvestira plus dans les remontées mécaniques, abandonnant par là même l’activité de sports d’hiver grand public. Celle-ci fait de Ventron l’une des principales destinations du massif vosgien, la troisième sur le versant du département des Vosges après La Bresse et Gérardmer, avec ses 66 000 journées skieurs répertoriées à l’hiver 2019-20, qui n’a commencé pour lui que le 8 février.

Nature en toute saison

La famille exploitante se concentre sur le développement de l’activité « toute saison, autour du bien-être et de la nature dans un site Natura 2000», indique-t-elle. La rénovation et la montée en gamme de l’offre hôtelière découlent de ce choix.

« Investir pour remettre le domaine skiable à niveau nécessiterait 5 ou 6 millions d’euros d’investissements, afin de l’équiper notamment de canons en neige, alors que le projet hôtelier représente un montant estimé à 18 millions d’euros. Nous ne pouvions mener de front les deux projets, gourmands en capitaux l’un et l’autre, en comparaison de notre chiffre d’affaires annuel, de l’ordre de 4 millions d’euros » souligne Thibaut Leduc, président de la SAS Leduc.

Concession départementale

L’arbitrage s’est opéré au bénéfice de l’option hôtelière, plus onéreuse mais en laquelle Thibaut Leduc identifie des perspectives supérieures de retour sur investissement « et d’emploi : nous devrions passer de 35 à 75 salariés en hôtellerie, alors que les remontées mécaniques représentent un effectif de deux permanents ».

La Banque des territoires (groupe Caisse des dépôts) partage cette vision : sa participation à l’investissement hôtelier apportera la solidité financière indispensable à sa bonne concrétisation. Non sans quelques atermoiements, elle a été rejointe par le conseil départemental des Vosges.

Compromis familial

« L’ADN de Ventron, c’est le ski, mais nous comprenons bien que l’exploitant est confronté à la réalité du changement climatique et que continuer sur la même voie pouvait mettre l’entreprise en péril. Le maintien d’une activité de ski nordique et d’apprentissage du ski alpin a constitué le point de rencontre entre nos visions. Le projet hôtelier paraît très pertinent et notre collectivité, qui a déjà engagé les travaux de modification de la route d’accès, y apportera sa contribution », commente son président François Vannsson.

Une nouvelle délégation communale de service public (DSP) remplacera celle qui courait jusqu’en 2031 avec la  SAS Leduc, intégrant ce maintien d’une offre minimale de ski.

Sous la dénomination « Ermitage Resort » et la conception de l’agence francilienne SLA Architecture dans une équipe qui intègre La Fabrique de l'Immobilier, le projet hôtelier consistera en une extension de l’hôtel de l’Ermitage, de façon à accueillir un espace de bien-être et spa et un centre de conférences (2 500 m2 au total), un nouveau restaurant et  une aile supplémentaire d’hôtellerie. Celle-ci portera la capacité du site à 110 chambres (au cumul des deux hôtels de l’Ermitage et des Buttes) et augmentera la part des chambres classées 4 étoiles.

Ambition architecturale

A la place d’un ensemble hétérogène, le complexe hôtelier se réorganisera dans deux directions à partir du nord : vers l’ouest pour l’accueil du public, vers le sud pour regarder vers le bois depuis l’espace bien être. L’architecte Riad Ameyar résume le sens de ce double mouvement : « Requalification de la perspective de l’édifice depuis la chapelle du Frère-Joseph, et création d’un front minéral continu coté pistes, permettant de liaisonner le bâtiment au sol ».

Le projet ambitionne de rivaliser avec ses réputés homologues de la Forêt-Noire, le massif allemand sur l’autre rive du Rhin. Les futures surfaces prendront la place d’un vieux bâtiment qui sera démoli au printemps prochain. Les travaux de construction s’enchaîneront dans la foulée,  dans le but d’une livraison à l’été ou l’automne 2022. Année hautement symbolique : elle marquera le centenaire de l’installation sur place de la famille Leduc.

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