Paul Chemetov réagit dans le Moniteur au papier que j’avais écrit et que le Moniteur avait publié sous le titre d’Architecture bling-bling. Il prend la défense de Jean Nouvel dont l’architecture ne mérite pas, selon lui, un tel qualificatif, mais c’est pour mieux descendre en flamme d’autres confrères dont certains projets le méritent, eux, amplement.
Mon papier cependant n’était pas à proprement parler une critique ad hominem de l’architecte Nouvel. Il voulait d’une part se moquer du choix du jury Pritzker en faveur d’un certain type d’architecture et d’autre part, par effet de bande comme dit Chemetov, mettre le doigt sur une tendance de l’architecture illustrée par la production de Jean Nouvel. Cette tendance, qualifiée de bling-bling par référence au goût de notre président pour les marques de prestige (aux dernières nouvelles il a remplacé sa montre Breitling par une Patek Philippe moins voyante mais 4 fois plus chère), transforme en effet les architectes de renom en marques de prestige.
Quand on en a les moyens, on veut du Nouvel comme d’autres veulent du Vuitton. Et les architectes mis dans cette situation sont condamnés à la surenchère, comme le sont les grandes marques de luxe, pour rester à la hauteur de leur réputation. Mais ce qui est déjà exagéré, et parfois indécent, concernant des accessoires d’habillement peut devenir proprement insensé en matière de bâtiments. Insensé par la course à la performance et au coût que cela entraine, et insensé par l’inéluctable indifférenciation qui résulte de ce vain désir de différenciation à tout prix.
Les exemples donnés par Paul Chemetov sont sans doute en effet plus représentatifs de cette tendance que les projets de Nouvel, mais ce n’est pas là l’important. Personne en particulier n’est responsable de cette compétition effrénée, mais nous le sommes tous, mais nous le sommes tous un peu (sinon qui ?), puisque nous y participons tous, à des degrés divers, maîtres d’œuvre, maîtres d’ouvrage, critiques, médias, administrations, etc. Mon papier tentait de mettre en forme ce constat, à toutes fins utiles. Il faut parfois savoir, selon l’expression en vogue, revenir aux fondamentaux, préférer la modestie à l’extravagance.
