Malgré son intérêt indiscutable, le building information modeling (BIM) reste trop peu exploité en rénovation. « Or, en 2050, 80 % des travaux concerneront des logements existants. Leur rénovation devra donc être plus rapide et plus efficace. D'où la nécessité de renforcer les outils BIM dans leurs dimensions environnementales et énergétiques », analyse Antoine Dugué, responsable R & D de l'Institut national pour la transition énergétique et environnementale du bâtiment (Nobatek/ Inef4). L'ingénieur coordonne le projet de recherche européen BIM4Ren, littéralement « le BIM pour la rénovation », qui réunit centres de recherche, universités, industriels et PME. Lancé en 2018, il est financé à hauteur de 7 M€ par l'Union européenne dans le cadre du programme « Horizon 2020 ». Son objectif : accélérer la numérisation du secteur de la rénovation.
Pour ce faire, le consortium a travaillé sur 32 outils et services, testés sur plusieurs sites démonstrateurs en Europe. En France, le groupe Polylogis (80 000 logements) a mis à la disposition des chercheurs deux résidences à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) et Joinville (Val-de-Marne). « L'occasion de constater que, bien souvent, la décision de rénover bénéficie de peu de moyens et ne s'appuie que sur un audit énergétique et des considérations financières, explique le coordonnateur. Pourtant, disposer de davantage de données sur l'existant permet de procéder à des choix techniques plus éclairés. » Sur ces deux sites, les équipes ont commencé par réaliser l'acquisition digitale de l'existant grâce à trois outils. D'abord, le scanner ARtoBuild de Biméo, qui numérise une pièce à partir d'une tablette. Ensuite, le chariot Navvis de BIM-Y qui est équipé d'un scanner laser 3D pour capturer les coordonnées x, y et z de chaque point, et prendre des photos panoramiques. Et enfin, l'application Matterport qui facilite l'export des données vers une plate-forme de travail collaboratif. En parallèle, le software Plans2BIM, développé par Wise BIM, a généré une maquette 3D à partir des plans-masses disponibles.
Outil d'indexation. Ce modèle numérique a ensuite été nettoyé et enrichi avec les données relatives à l'année de construction des immeubles, leur orientation, les caractéristiques thermiques de leurs murs et fenêtres, etc. Afin d'exploiter la documentation disponible, Nobatek/Inef4 a développé un outil d'indexation spécifique. Baptisé Massdoc, il trouve des mots-clés dans les dossiers des ouvrages exécutés (DOE), les rapports de visite de maintenance ou même les factures. L'ensemble de ces données permet de concevoir différents scénarios de rénovation bien plus précis.
Afin de démocratiser l'accès à ces différents outils, le consortium mise pour l'instant sur la plate-forme Kroqi, développée par le CSTB dans le cadre du Plan de transition numérique pour le bâtiment (PTNB). Jusqu'en septembre 2022, ces dispositifs ne seront cependant accessibles qu'aux membres du consortium. A plus long terme, certains services seront commercialisés de façon indépendante de Kroqi, qui cherche toujours son modèle économique.
