Marchés publics Les accords cadres

Les accords-cadres représentent l'innovation la plus marquante du Code 2006 des marchés publics. Bien utilisés, ils constituent un élément de souplesse, et donc d'efficacité de l'achat public. Explications.

Réservé aux abonnés

Les accords-cadres représentent l'une des innovations les plus importantes du Code 2006, qui transpose sur ce point les dispositions de la directive du 31 mars 2004. Les accords-cadres sont évoqués dès l'article 1er du nouveau Code des marchés publics. Mais, ils ne sont pas des marchés publics. L'accord-cadre est une étape préalable qui peut aboutir à la conclusion d'un ou plusieurs marchés. Il s'agit donc bien d'un contrat public puisque le pouvoir adjudicateur se propose, par la suite, de commander au(x) titulaire(s) de l'accord-cadre. Réciproquement, les entreprises se portent candidates à des marchés futurs, alors même que toutes les caractéristiques des contrats à venir ne sont pas encore fixées, le cahier des charges n'étant pas obligatoirement exhaustif. La procédure d'achat peut ainsi gagner en souplesse.

La définition générale issue de la directive précitée est rappelée par le Code : « Les accords cadres sont les contrats conclus entre un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d'établir les termes régissant les marchés à passer au cours d'une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées » (article 1er du Code 2006).

Les accords-cadres constituent un système clos dans lequel personne ne peut entrer par la suite, ni du côté des acheteurs ni du côté des fournisseurs, les marchés passés, en application des accords-cadres, ne devant pas contenir de modifications substantielles.

La Commission européenne souligne la polysémie des termes « accord-cadre » en droit communautaire. Elle désigne autant ceux dont tous les termes sont fixés dès le départ (« contrats-cadres »), que ceux dont seuls certains termes sont déterminés à l'avance (« accords-cadres » stricto sensu).

La conclusion des accords-cadres

Pour conclure un accord-cadre, les pouvoirs adjudicateurs recourent aux procédures de droit commun, c'est-à-dire aux procédures ouvertes ou restreintes, ou, lorsque les conditions sont remplies, à une procédure négociée avec ou sans publication préalable. Aucune disposition de la directive n'interdit explicitement de conclure des accords-cadres à l'issue d'un dialogue compétitif ; il est difficile cependant d'imaginer des cas où les conditions pour le recours à un dialogue compétitif seraient remplies et où un accord-cadre serait envisageable.

Par conséquent, les règles habituelles, notamment en matière de publicité, délais, critères d'exclusion, de sélection et d'attribution s'appliquent de manière générale. Elles sont seulement modulées en fonction de la procédure choisie.

La durée des accords-cadres est limitée à quatre ans et c'est aussi la durée des marchés fondés sur ces accords-cadres. En effet, les marchés fondés sur un accord-cadre sont passés dans les limites de celui-ci « par application des termes fixés . », ou par une remise en concurrence sur la base des mêmes termes. Toutefois, il reste bien entendu possible d'utiliser l'accord-cadre jusqu'au bout, même si l'exécution du marché spécifique basé sur l'accord-cadre se poursuit après l'expiration de l'accord-cadre lui-même. Ainsi, dans un accord-cadre triennal portant sur la fourniture de papier pour photocopieurs, il serait parfaitement possible d'organiser deux semaines avant l'expiration de l'accord-cadre une remise en concurrence pour une fourniture concrète, même si le papier en question doit être livré deux semaines après l'expiration de l'accord-cadre.

De même, imaginons un accord-cadre qui porterait sur la fourniture de photocopieuses et, accessoirement, sur des services de manutention pendant une période de garantie de deux ans. En un tel cas, rien n'empêche le pouvoir adjudicateur d'utiliser l'accord-cadre un an avant son expiration, même si les services de manutention sont assurés pendant une année après l'expiration de l'accord-cadre.

On notera que les accords-cadres peuvent avoir une durée supérieure à quatre ans, dans des « cas exceptionnels dûment justifiés » (article 76-V du Code des marchés publics).

Les accords-cadres qui ne fixent pas tous les termes (les accords-cadres stricto sensu)

Dans le cas des accords-cadres stricto sensu, certains aspects ne sont pas fixés dans l'accord, mais sont laissés de côté pour être fixés plus tard lors de la remise en concurrence, dans le cas des accords-cadres multiples, ou par la consultation subséquente avec le seul opérateur économique, dans les cas prévus à l'article 76-IV du Code des marchés publics.

Les termes de l'accord-cadre stricto sensu ne peuvent en aucun cas être substantiellement modifiés ultérieurement (article 76-III-3° du Code des marchés publics).

De même, les pouvoirs adjudicateurs doivent veiller à préciser les critères d'attribution - non seulement pour l'attribution de l'accord-cadre lui-même, mais aussi pour l'attribution des marchés issus de l'accord. Ces critères ne sont pas forcément les mêmes que ceux qui seront utilisés pour l'attribution des contrats individuels, lors de la remise en concurrence. Il est donc nécessaire que les cahiers des charges relatifs aux accords-cadres précisent bien si les pouvoirs adjudicateurs entendent ne pas fixer tous les termes dans l'accord-cadre lui-même, ouvrant ainsi la voie à une remise en concurrence - ou s'ils entendent en revanche fixer tous les termes, renonçant ainsi à la possibilité d'une remise en concurrence (article 76-III-5° du Code des marchés publics).

Passation des marchés fondés sur l'accord-cadre

Les accords-cadres fixant tous les termes et conclus avec un seul opérateur économique. Ce cas de figure vise, par exemple, les « contrats à bon de commande ». Si l'accord-cadre fixe déjà tous les termes de manière contraignante, il n'y a pas lieu de compléter l'offre initiale et les commandes peuvent être passées.

Les accords-cadres multiples fixant tous les termes (les contrats cadres multiples). L'attribution des marchés fondés sur ce type d'accord-cadre se fait au bénéfice des titulaires de l'accord-cadre qui ont présenté les offres plus avantageuses.

Une manière pour ce faire est la méthode dite « en cascade », c'est-à-dire celle consistant à contacter d'abord l'opérateur économique dont l'offre pour l'attribution de l'accord-cadre fixant tous les termes (du contrat-cadre) a été considérée la meilleure, puis à s'adresser au deuxième, uniquement dans le cas où le premier n'a pas la capacité ou n'est pas intéressé à fournir les biens, services ou travaux en question.

La décision quant à l'opérateur économique auquel il faut adresser une commande peut également se faire selon d'autres critères, pourvu qu'ils soient objectifs, transparents et non discriminatoires. Ainsi, imaginons une grande institution qui, ayant des photocopieuses de marques différentes, conclut des accords-cadres fixant tous les termes sur la manutention et le dépannage de ces appareils, avec une série d'opérateurs économiques de manière à assurer la présence d'au moins un spécialiste pour chaque marque de photocopieuses dans son parc. Pour l'attribution des accords-cadres, le pouvoir adjudicateur a utilisé des critères d'attribution tels que le prix, la rapidité d'intervention, l'éventail de marques pouvant être pris en charge etc. Il est évident que la commande d'une intervention sur, par exemple, une Rank Xerox peut se faire auprès du spécialiste de cette marque, même si l'offre concernant les Canon était classée première.

Les accords-cadres ne fixant pas tous les termes et conclus avec un seul opérateur. Les marchés individuels fondés sur un accord-cadre conclu avec un seul opérateur économique sont passés dans les limites (notamment en ce qui concerne la gamme de produits, services ou travaux couverts, ainsi que les quantités) des termes fixés dans l'accord-cadre, en consultant cet opérateur par écrit pout lui demander de compléter son offre. La formulation de la disposition du deuxième alinéa du paragraphe 3 pourrait laisser croire que cette consultation et l'apport de compléments à l'offre initiale seraient en tout cas facultatifs. Cette formulation est nécessaire parce qu'elle vise aussi bien les accords-cadres qui fixent tous les termes que ceux qui ne le font pas. Dans ce dernier cas, il y a par définition des éléments qui ne sont pas fixés de manière contraignante (cf. la définition ci-dessus) et qu'il est donc nécessaire de fixer en complétant l'accord-cadre initial (article 76-IV).

Les termes de la demande ne peuvent pas être substantiellement modifiés par rapport à l'accord initial.

Les accords-cadres multiples ne fixant pas tous les termes. L'attribution des marchés individuels basés sur l'accord-cadre fait suite à une remise en concurrence selon les modalités prévues au paragraphe III de l'article 76. La remise en concurrence est basée sur les « mêmes termes, si nécessaire en les précisant, et, le cas échéant, d'autres termes indiqués dans le cahier des charges de l'accord-cadre », bien entendu sous réserve de l'interdiction des « modifications substantielles » des termes fixés dans l'accord-cadre. Lors de cette consultation écrite, les pouvoirs adjudicateurs indiquent l'objet du marché spécifique pour lequel les offres sont demandées, ainsi que le délai pour leur présentation. Conformément à l'article 32 (paragraphe 4, deuxième alinéa, deuxième tiret, point d), l'attribution se fait « sur la base des critères d'attribution énoncés dans le cahier des charges de l'accord-cadre ».

Il convient de préciser que ces critères d'attribution ne sont pas forcément les mêmes que ceux appliqués pour la conclusion des accords-cadres eux-mêmes, mais ils doivent avoir été précisés dans le cahier des charges initial.

Les accords-cadres combinent, à la fois, la souplesse des techniques de référencement, qui dispensent d'une mise en concurrence trop lourde juste avant la conclusion du marché, et la rigueur d'une procédure de passation destinée à s'étendre sur plusieurs années (quatre ans et même plus dans des cas exceptionnels).

Appréhender uniquement les accords-cadres comme un instrument de souplesse, en faisant abstraction des exigences liées à la nécessité de mener une procédure alignée sur la même définition du besoin à satisfaire, conduirait certainement à quelques déconvenues. Les accords-cadres doivent, au contraire, être perçus comme un moyen de stimuler la concurrence. Il faudra encore, pour cela, assimiler la technique et, surtout, parfaire la définition des besoins et la programmation des achats.

Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires