Le principe est simple, les exceptions plus subtiles, illustre la décision rendue le 8 février 2021 par le Tribunal des conflits. Dans cette affaire, deux entreprises, membres d’un groupement chargé d’exécuter un marché de travaux confié par un centre hospitalier, recherchaient mutuellement la responsabilité l’une de l’autre en raison des préjudices liés à une interruption des travaux. Saisis, le juge administratif et le juge judiciaire ont estimé l’un après l’autre ne pas être compétents pour trancher ce litige.
Le juge administratif, "sauf si"
Le Tribunal des conflits fût alors sollicité par le juge administratif pour désigner l’ordre juridictionnel compétent.
Il rappelle tout d’abord le considérant de principe, bien établi depuis le célèbre arrêt « de Castro » de 1997 (T. confl., 24 novembre 1997, n° 03060, publié au recueil Lebon) : « Le litige né de l’exécution d’un marché de travaux publics et opposant des participants à l’exécution de ces travaux relève de la compétence de la juridiction administrative, sauf si les parties sont unies par un contrat de droit privé ».
Exécution d'un contrat de droit privé
Pour autant ici, même si les adversaires étaient effectivement unis par un contrat de droit privé, le Tribunal des conflits estime que c’est le juge administratif qui doit les départager.
En effet, il relève que les requérantes invoquent la responsabilité quasi-délictuelle de leur cotraitant et que le litige porte sur « le préjudice qu’elles estiment avoir subi à raison de fautes qu’il a commises au cours de l’exécution du contrat conclu avec le maître de l’ouvrage ». Dès lors, ce contentieux « ne concerne pas l’exécution de ce contrat de droit privé et […] implique que soient appréciées les conditions dans lesquelles un contrat portant sur la réalisation de travaux publics a été exécuté ».
Conclusion, l’affaire relève de la juridiction administrative.
Attractivité de la notion de travaux publics
Selon le commentaire publié par le Tribunal des conflits, cette décision, qui traduit une fois de plus « l’attractivité de la notion de travaux publics », s’inscrit dans la lignée de la décision « de Castro », et ne fait que délimiter la portée de l’exception liée à l’exécution d’un contrat de droit privé. La dérogation à cette compétence de principe du juge administratif, « introduite par la décision de Castro se justifie dans les seuls cas où, en dépit de l’existence de travaux publics, le litige a pour objet l’exécution d’un contrat de droit privé – par exemple de celui qui lie le titulaire du marché à son sous-traitant ».
T. confl., 8 février 2021, n° 4203, mentionné aux tables du Recueil Lebon