Décryptage

Marchés conclus rarement revus

Immobilier - Alors que la crise des matériaux met les entreprises sous pression, les promoteurs ne sont pas toujours enclins à réviser leurs prix.

 

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Entreprises de construction et promoteurs immobiliers sont dans le même bateau. Mais ils ne rament pas dans le même sens. Avec la crise des matériaux, les premières voient leur marge se réduire à peau de chagrin et demandent à réviser leurs prix sur les contrats passés. Une requête qui reste souvent lettre morte auprès des seconds, tout comme nos sollicitations de certaines majors du secteur (Altarea, Icade et Nexity). D'autres, comme Arnaud Bekaert, directeur général du pôle UrbanEra de Bouygues Immobilier, estiment que sur les marchés passés, « les approvisionnements doivent être réalisés au moment de la passation des contrats. Les entreprises peuvent légitimement rencontrer des problèmes, mais elles doivent le démontrer ». Encore faut-il que leur patron « ait su anticiper et qu'il ait eu à sa disposition la trésorerie nécessaire pour faire entrer les matériaux dans les temps », rappelle Norbert Fanchon, président du directoire du Groupe Gambetta, qui estime à 20 % le nombre de chantiers concernés par une demande de révision des prix.

« Remettre le lot en concurrence ». Dans les faits, les promoteurs se montrent donc peu enclins à changer les termes du contrat. « Sur les chantiers déjà lancés ou précommercialisés, quand une entreprise présélectionnée nous annonce une révision de prix, nous n'avons souvent d'autre choix que de remettre le lot en concurrence, de négocier ou d'adapter le projet à la marge », confirme Virginie Leroy, directrice générale Immobilier résidentiel et des régions de Vinci Immobilier. Il faut dire que le modèle économique du logement neuf laisse peu de marge de manœuvre aux promoteurs : ces derniers lancent le chantier quand l'opération est précommercialisée à 50 % environ. Difficile alors de rehausser le prix de sortie. Et impossible de densifier à ce stade un programme immobilier.

Pour le dirigeant d'une ETI qui souhaite rester anonyme, « les maîtres d'ouvrage privés considèrent le plus souvent que les grandes entreprises générales doivent assumer leurs risques. La situation semble différente en corps d'état séparés : l'un des intervenants peut alors menacer d'arrêter le chantier. Dans ce cas, le client aurait plus à perdre en refusant de négocier ». Virgnie Leroy déplore quelques abandons de chantier, mais n'a pas cédé. « A chaque fois, nous réussissons à remplacer la société par une autre avec laquelle nous avons noué une relation partenariale. Jusqu'à présent, aucun de nos chantiers n'a été à l'arrêt de façon durable. »

Appels d'offres infructueux. Sur les appels d'offres en cours de lancement, la dynamique est encore différente. « Il y a quinze jours, tout allait bien. Maintenant, nous avons une visibilité sur une semaine, déplore Norbert Fanchon. Depuis trois ans, la profession faisait déjà face aux appels d'offres infructueux ; jusqu'à présent, à force de discussions, nous arrivions à rentrer dans nos prix. Aujourd'hui, plus on prend du temps pour négocier, plus l'équilibre est menacé par la hausse des cours des matériaux. » Certains ont trouvé la solution. « Lorsque nous ne sommes pas engagés par une date de livraison, nous pouvons choisir de laisser passer quelques mois, suggère Philippe Depasse, directeur général délégué aux régions chez Sogeprom. Il y a encore du stock chez les fournisseurs. Quand ils auront trouvé d'autres sources d'approvisionnement, mêmes plus chères, nous y verrons plus clair. » Actuellement, les surcoûts de construction sont évalués à 5 % par Arnaud Bekaert. « Nous allons devoir travailler sur tous les postes du bilan, car le client ne pourra pas absorber ces hausses de prix », prévient-il. Quitte à se désengager de certains fonciers. Aucun des promoteurs interrogés n'a dû s'y résoudre… mais tous ont connaissance de concurrents ayant dû renoncer à certaines acquisitions.

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