Ils étaient une dizaine à se rassembler devant l’Anah à Paris, ce lundi 12 mai 2025, en espérant faire entendre leur colère. Une mobilisation amorcée sur les réseaux sociaux par Thierry Flak, qui dirige l’entreprise de rénovation Home Expert Habitat, à Maisons-Alfort (94). Sous le slogan « MaPrimeRénov’ nous tue », l’entrepreneur dénonce « l’abandon des services publics » et notamment les délais «interminables» de l’Anah pour subventionner les chantiers de rénovation énergétique MaPrimeRénov’. En tant que mandataire financier et administratif MPR, il avance au client le coût des travaux, puis attend le remboursement par l’Anah. Selon lui, certains dossiers déposés en 2021 attendent encore un remboursement, sans que lui ait été notifié un motif par l’agence d’Etat. En tout, ses dossiers en attente cumuleraient plus de 800 000 euros dues par l’Anah.
Son entreprise comptait 25 salariés en septembre 2024, et exerçait en région parisienne, ainsi qu’à Cambrai (59) et à Nice. L’agence du Nord a dû fermer ses portes, faute de défaut de trésorerie trop important, entrainant le licenciement de 14 salariés. « Combien d’artisans vont déposer le bilan ? Nous ne sommes pas la banque de l’Etat. Dans 90% des cas, le système fonctionne bien. Mais quand il bloque pour les 10% restants, il nous met dedans. » Le dirigeant oriente désormais son activité vers le B2B pour ne plus avoir à avancer le coût des travaux. Il espère qu’en 2026, le tertiaire représentera 90% de son activité.
Un autre dirigeant d'entreprise de rénovation globale a tenu à se rendre au rendez-vous. Comme Home Expert Habitat, cette entreprise est mandataire financier, car il s’agit selon son dirigeant « d’un levier pour les clients. Pour l’essentiel des ménages, c’est impensable d’avancer 16 000 euros et d’attendre un remboursement. Mais cela crée des gros trous de trésorerie pour nous. » Le dirigeant estime avoir « un peu moins d’un million d’euros dehors », en attente de remboursement.
« Nous demandons surtout de la transparence »
« Ce que nous demandons, c’est de la transparence, pour pouvoir nous organiser. Certains de mes dossiers sont traités en 11 jours, d’autres attendent depuis un an et demi, c’est incompréhensible. Quand on appelle Bureau Veritas, il nous explique que le client n’a pas répondu au téléphone. Beaucoup de clients rejettent les appels inconnus. Si le bureau de contrôle nous appelle en amont, on peut demander nous-même au client de répondre tel jour, à telle heure, mais avec 40 chantiers par mois, on ne peut pas expliquer ça à tous nos clients. Lutter contre la fraude assainit le marché. Mais tout bloquer en imposant ces délais n’est pas la solution. »
La ministre Valérie Létard a fixé l’objectif d’un délai maximum de 4 mois pour les rénovations d'ampleur et de 5 semaines pour les rénovations par geste. « Si l’Anah s’engage à tenir des délais et les respecte, ça nous va », comment Thierry Flak, adhérent FFB. Il regrette la passivité des organisations syndicales, et a donc décidé de venir manifester devant l’Anah. Peu d’artisans ont répondu à l’appel, mais pas de quoi étonner le protagoniste : « On ne sait pas se rassembler naturellement dans notre profession, ça ne fait pas partie de notre culture, pourtant il nous faut faire du bruit. On aurait aimé être reçu par l’Anah. » Les portes de l’Anah sont pourtant restées closes.