Les résultats sont accablants. « Les ménages seuls sont aujourd’hui parmi les plus présents sur les marchés de l’habitat et rencontrent, parfois plus que d’autres, d’importantes difficultés pour se loger », observe la Fondation Abbé-Pierre dans son 25e rapport sur le mal-logement.
Si l’organisation s’intéresse précisément à ce type de ménages, c’est parce qu'ils sont en forte progression. Entre 1962 et 2013, leur nombre est ainsi passé de 20 à 35% de l’ensemble des foyers. « C’est devenu le premier groupe de ménages en France », souligne Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation.
La diminution des familles nombreuses, l’augmentation des séparations et des divorces, l’allongement de la durée des études et la formation plus tardive des couples… sont autant de causes qui expliquent leur augmentation. Ces tendances sont également renforcées par le vieillissement de la population et la hausse du veuvage. Résultat, « entre 1962 et 2014, nous sommes passés de 3 personnes par ménage à 2,2. Ce qui implique d’avoir 7 millions de logements supplémentaires », observe Manuel Domergue.
Offre insuffisante de petits logements
Pourtant, dans un parc de logements conçu autour de la famille et du travail, l’offre reste encore inadaptée.« Si les petits logements (T1 et T2) représentent une part importante du parc locatif privé (55%), ils ne constituent que 25% du parc locatif social », souligne le directeur des études de la Fondation Abbé-Pierre. Or, les ménages d’une personne ont un effet d’échelle moins important. Autrement dit, payer une habitation revient généralement plus cher pour un foyer unipersonnel.
« Pour les personnes à revenus faibles ou moyens, le marché locatif privé est très fermé. Parfois, ces profils sont obligés de se loger dans des chambres d’hôtel », poursuit Manuel Domergue. Le parc social peine pourtant à répondre à la demande. Alors que 918 494 personnes seules ont fait une demande de HLM, seuls 19% d’entre eux ont pu voir leur requête aboutir. « L’offre insuffisante de petits logements et la diversité des publics isolés créent une forme de concurrence dans l’accès au logement », note le rapport de la Fondation.
Lien entre mal-logement et isolement
De fait, la frontière entre isolement et mal-logement peut devenir ténue. « Souvent, les personnes n’osent plus inviter chez elles, et vont moins chez les autres », souligne Manuel Domergue. Surtout, l’accès à l’information peut être plus difficile, à l’instar d’une personne âgée, qui vivrait dans un taudis, mais ne penserait pas à venir demander des informations.
Malgré ce constat alarmant, les acteurs du logement tentent de remédier au problème. Au sein du parc social, un effort de construction est aujourd’hui fait pour les plus petits logements. « Les T1 et T2 représentaient 34% des logements construits en 2010 et 40% en 2017 », abonde Manuel Domergue. De leur côté, les collectivités territoriales s’efforcent de favoriser la production de petits logements, à l’instar de la Ville de Dunkerque et de la Communauté urbaine qui ont en place des mesures favorables à la production de T1 et T2. Le début d'une prise de conscience.