Maîtrise d'ouvrage L'expertise du ministère de l'Intérieur

-Le ministère de l'Intérieur a développé une expertise propre aux équipements complexes qu'il construit. -Ouverte à la diversité des concepteurs, la commande d'architecture privilégie les projets «équilibrés et responsables».

Avec 1 200 millions de francs TTC d'investissement immobilier en 1997, dont 200 millions consacrés au logement de ses fonctionnaires, le ministère de l'Intérieur est un maître d'ouvrage public qui compte. La direction de la programmation des affaires financières et immobilières est l'ordonnatrice de ce budget conséquent dont l'une des caractéristiques, souligne son directeur Alexandre Jevakhoff, est d'être affecté à des programmes très variés. Même si la police nationale, avec ses hôtels de police et ses commissariats - une trentaine seront livrés d'ici fin 1999 - se taille la part du lion.

Car l'expertise de la direction est aussi mise à contribution sur des projets de délocalisation très spécifiques, comme la sous-direction de la police technique et scientifique de la PJ à Ecully pour l'administration centrale, ou le stand de tir du RAID à Bièvres et l'école des maîtres-chiens à Ussel pour la Police nationale.

Mise en sécurité

L'administration territoriale est aussi bonne cliente. Il ne s'agit pas tant de construire de nouvelles préfectures ou sous-préfectures que de réaménager celles qui existent, notamment pour des raisons de sécurité : une conséquence inattendue des mesures prises pour rendre la carte grise et la carte d'identité infalsifiables a été de transformer les bons vieux faussaires d'antan en braqueurs, capables de monter un hold-up sur la sous-préfecture pour se procurer les fameux rectangles de plastique ! Si l'on ajoute à cela les bâtiments de la sécurité civile et les édifices culturels d'Alsace-Lorraine, la direction produit « dans les années fastes », quelque 100 000 m2 HON neufs ou réhabilités. Auxquels s'ajoutent les logements des personnels. Pour répondre aux besoins, estimés à 800 logements par an, Alexandre Jevakhoff a entrepris de constituer un patrimoine par acquisition (la conjoncture est favorable) et signé une convention originale avec l'UNPI, l'Anah et le Crédit foncier. Elle permet aux fonctionnaires d'accéder au marché locatif privé à des coûts raisonnables, le paiement des loyers étant garanti en contrepartie aux bailleurs. Ainsi libérés de la question du logement, les services peuvent se consacrer à leur expertise de maîtres d'ouvrages d'équipements complexes.

Accueillant au citoyen

Répartis en trois bureaux de la sous-direction des affaires immobilières (voir page suivante), ils sont une dizaine d'ingénieurs et architectes à organiser et suivre (1) la commande d'architecture : une vingtaine de concours annuels pour la police, une dizaine pour les bâtiments territoriaux et l'administration centrale. Première condition d'une bonne réponse des concepteurs, le programme. «Il doit aller à l'essentiel», souligne Georges Loison, ingénieur au BAIPN. Pour les petites et moyennes opérations (jusqu'à 5 000 m2), Béatrice Melon, ingénieur-architecte au même BAIPN, a développé un logiciel de programmation avec une quinzaine de paramètres. Au-delà, il est fait appel à un programmateur. Mais les futurs utilisateurs sont toujours consultés, comme ils le seront sur la finalisation du projet lauréat après concours. Résumé d'un programme de commissariat de police par Béatrice Melon : « Accueillant au citoyen, résistant au voyou, agréable à vivre pour le fonctionnaire qui y passe parfois plus de 24 heures d'affilée. »

Pour le choix des concepteurs, Alexandre Jevakhoff récuse toute recherche de signature : « Nous n'avons pas vocation à construire des immeubles-cartes de visite ; ce qui compte, c'est que l'ouvrage corresponde aux besoins des missions, respecte l'enveloppe financière et soit d'une maintenance aisée. » Ce pragmatisme n'exclut pas la diversité, ni l'ouverture aux jeunes concepteurs, toujours représentés dans le « panachage » des candidats retenus. Ainsi peuvent s'exprimer des personnalités aussi différentes que Ricardo Porro (cantonnement de CRS à Velizy) et Michel Remon (Police technique et scientifique d'Ecully) ou Marie-Christine Gangneux (Centre René Cassin d'accueil des étrangers à Bobigny), alors que les projets confiés à de jeunes architectes (commissariat de Vaucresson à Fabienne Bulle, de Draveil à Suzel Brout, sous-préfecture de Meaux à Patricia Leboucq) montrent que leurs candidatures ne sont pas, comme trop souvent, des alibis.

Aptitude à dialoguer

Pas de parisianisme non plus. Le choix d'architectes tels qu'Albert Constantin (Lyon), Marc Delanne (Bayonne), Gouwy-Grima-Ramès (Toulouse), Christian Kock (Saint-Etienne), et bien d'autres, témoigne de la connaissance des ressources du milieu, y compris en régions. Dans la phase sélection (100 à 150 dossiers de candidature par concours en moyenne pour 4 à 5 équipes retenues), l'aptitude à communiquer une démarche au travers du dossier est déterminante (attention aux mauvaises diapos). Importante aussi, la prestation à l'oral du concours et ce qu'elle révèle de clarté d'expression et d'aptitude au dialogue.

Mais être beau parleur ne suffit pas : Alexandre Jevakhoff se dit attentif aux réactions des jurys et à la façon dont ils « décodent » les projets. En dernier ressort, c'est la capacité à résoudre de façon réaliste la quadrature du cercle des superpositions de fonctions et d'images qu'exige un hôtel de police ou une sous-préfecture qui l'emportera. De l'aveu des architectes qui s'y sont confrontés, c'est un défi prenant et difficile à relever. Mais, comme le note Christian Labbé, auteur avec Béatrice Dollé de l'hôtel de police de Rambouillet (p. 30), « au-delà de leur complexité fonctionnelle, ces bâtiments sont chargés de sens et de contradictions. C'est de la résolution de ces contradictions que naît l'architecture ».

(1) La conduite d'opération est ensuite assurée par les SGAP (services généraux de l'administration préfectorale), les services de préfecture ou les DDE.

L'INVESTISSEMENT EN 1997

Il s'élève à 1 200 millions de francs (hors gel budgétaire de 85 millions) répartis entre :

Police nationale : 600 millions.

Administration territoriale : 290 millions.

Administration centrale : 111 millions.

Services sociaux : 23 millions.

Sécurité civile : 20 millions.

Cultes : 7 millions.

Acquisition de logements : 11 millions de francs.

S'y ajoutent 200 millions consacrés aux réservations de logements.

L'ORGANIGRAMME

Direction de la programmation des affaires financières et immobilières : Alexandre Jevakhoff, inspecteur des finances, directeur.

Sous-direction des affaires immobilières : Claude Ballade, administrateur civil, sous-directeur.

Bureau des affaires immobilières de l'administration territoriale (BAIAT) : Olivier Filliette, administrateur civil, chef du bureau.

Bureau des affaires immobilières de la police nationale (BAIPN) : Alain Perret, administrateur civil, chef du bureau.

Bureau des affaires immobilières de l'administration centrale (BAIAC) : Hervé Louvin, ingénieur en chef, chef du bureau.

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